Alain Baraton

Alain Baraton

Dictionnaire amoureux des arbres

Portrait 00'07'03"

Philippe Chauveau :

Bonjour Alain Baraton.

Alain Baraton :

Bonjour

Philippe Chauveau :

Votre actualité, ce dictionnaire amoureux des arbres que nous allons évoquer, c'est aux éditions Plon, dans cette. Dans cette belle collection, on vous connaît avec un surnom, quand on dit Alain Baraton : "oui, c'est le jardinier de Versailles". Ça vous colle à la peau ce surnom, vous avez d'ailleurs donné ce titre à l'un de vos livres. Avant d'évoquer d'ailleurs tous ces ouvrages que vous avez écrit, il y en a une vingtaine, quel gamin étiez-vous ? C'est vrai que vous n'étiez vraiment pas bon à l'école et que c'est un peu ce qui a fait votre carrière ?

Alain Baraton :

J'étais un gamin qui s'ennuie à l'école, j'étais un gamin attentif, mais parfois dissipé. Mais en fait, ce qui est sûr, je ne voulais pas suivre l'exemple de mes aînés. Mes ainés étaient de brillants élèves, puis étudiants, ils donnaient totale satisfaction à mes parents. Moi, j'étais le gamin qui inquiète. Moi, la phrase "Qu'est-ce qu'on va faire de toi ?" je l'ai vraiment et souvent entendu. Vous parliez du surnom Le jardin de Versailles, avouez que c'est un joli surnom, car à 17 18 ans, l'autre surnom que j'avais dans ma famille était La bouse. Vous remarquerez quand même qu'il y a du progrès. La bouse, parce que, justement, mes parents, aux vues de mes résultats scolaires, m'avaient inscrit d'autorité à une école horticole. Ce n'était pas vraiment mon truc. Le jardin n'était pas ma passion. Mais par contre, cette idée de mon papa de m'inscrire d'autorité dans cette école m'a permis au moins une chose découvrir les arbres dont je suis tombé amoureux.

Philippe Chauveau :

Néanmoins, est ce qu'il y avait un jardin à la maison ? Est-ce que vous aviez déjà un peu l'habitude de travailler la terre avec vos parents ? Ou pas du tout ? Comment faites-vous vos premiers pas dans ce lycée horticole ?

Alain Baraton :

Alors, mes parents avaient une petite maison du côté de La Celle-Saint-Cloud, avec un jardin que j'entretenais moyennant finances, bien évidemment. C'était le moyen que j'avais pour gagner un peu d'argent de poche, mais surtout à quelques centaines de mètres la maison de mes grands-parents. C'est une maison très, très simple, une maison basse en bois, une maison achetée entre les deux guerres à renfort d'économie. Mais il y avait dans ce jardin qui était grand, un potager sublime et mon grand-père l'était tout autant. Et donc je garde de mon grand-père, l'image de ce jardinier extraordinaire qui avait un jardin d'une beauté rare et pourtant, c'était un potager. Donc, mes premiers pas dans le jardin, c'était la tonte de la pelouse et le ramassage des feuilles moyennant finance. Et la visite de mon grand-père et la découverte de son jardin là, pour le plaisir.

Philippe Chauveau :

Je me permets de revenir sur tous ces souvenirs qui vous ont façonné parce que c'est quand même un clin d'œil du destin qui vous amène dans l'équipe des jardiniers de Versailles. C'est pour un job d’été ?

Alain Baraton :

Un job d'été. Nous sommes en 1976. Je viens de végéter sans aucun jeu de mot, trois ans dans un internat d'une école horticole. Il me faut trouver un emploi parce que chez les Baraton, on se paie ses vacances si on veut partir seul. Et je découvre cet emploi de caissier dans le parc, hier comme aujourd'hui, permet l'accès aux voitures. Je suis donc dans une petite guérite à l'entrée du domaine et je fais payer les voitures. Le jardinier en chef de l'époque, monsieur Chon, que nous appelions Nonoeil ou Zorro, avouez que ce n'est pas très intelligent, se prend je crois de tendresse pour moi, d'affection et il me propose un emploi d'aide jardinier stagiaire. C'est un emploi qui ne me dit pas grand-chose je dois vous l'avouer, mais il me propose avec un logement. Vous avez 19 ans, vous êtes le cinquième d'une famille de sept enfants, vous rêvez de voler de vos propres ailes, on vous propose un emploi et un grand logement. Que faire que d’accepter ? C'est donc en septembre 1976, mon entrée dans les jardins de Versailles.

Philippe Chauveau :

Aujourd'hui, vous êtes toujours responsable des équipes des Jardins de Versailles. Parallèlement, vous vous occupez aussi du domaine de Marly. La passion est la même ? Que ressentez-vous encore aujourd'hui lorsque vous arpenté les allées du parc de Versailles ?

Alain Baraton :

Je reste passionné par ce que je fais, parce que Versailles ce n'est pas qu'un parc historique, c'est 850 hectares de nature. C'est un jardin français, un jardin paysager, un potager. Ce sont des champs. Ce sont des bois. Ce sont des millions en temps normal, bien sûr, des millions de visiteurs. C'est un endroit où nous développons actuellement la biodiversité. Nous regardons et observons la faune. C'est un lieu magique. Aujourd'hui j'ai toujours autant envie de travailler à Versailles que je n'avais cette envie en 1976.

Philippe Chauveau :

J'ai l'impression que vous avez redonné ses lettres de noblesse au mot jardinier. Parce que très souvent, on nous parle des paysagistes. Et il y a peut-être cette petite guéguerre. Quand on n'est pas vraiment dans cet univers là, on a l'impression qu'il y a une guéguerre entre les jardiniers et les paysagistes. Vous, vous avez eu envie de réunir ces deux milieux ?

Alain Baraton :

Je déteste le terme de paysagiste.

Philippe Chauveau :

D'accord.

Alain Baraton :

Je dis souvent ça, non sans humour, que le paysagiste est au jardinage ce que le visagiste est au coiffeur. Ce sont des termes qui ne veulent pas dire grand-chose. Dans le terme paysagiste il y a la jeune personne qui a fait des études brillantes et qui dirige, et dans le côté jardinage ou jardinier, ce sont des personnes plus modestes qui exécutent. La réalité n'est pas du tout celle-ci. André Le Nôtre était jardinier. Nous sommes jardiniers. J'observe que les plus grands jardiniers d'aujourd'hui, je pense à Gilles Clément. Eux aussi, revendiquent le titre de jardinier. Le jardinier, ne l'oubliez jamais est le plus noble des métiers, ce n'est pas moi qui le dis, c'est Voltaire.

Philippe Chauveau :

Avez-vous le même plaisir à découvrir un jardin accolé à une demeure royale ou princière en tout cas patrimonial qu'à simplement vous promener dans la nature à observer les arbres et les plantes ? C'est la même chose ?

Alain Baraton :

Plus. J'ai beaucoup plus de plaisir aujourd'hui à apprécier ces jardins qu'autrefois. Autrefois, je préférais très honnêtement les grandes parties naturelles, les espaces boisés et les parties sauvages des champs à perte de vue. Aujourd'hui, j'ai conscience que les jardins, quand ils sont bien conçus, sont plus que de simples jardins. Ce sont souvent des œuvres de paix et ce sont des lieux où il fait bon vivre. Et je pense toujours à ceux qui ont eu l'idée de créer ou de restaurer le jardin, d'y planter des végétaux. Moi, quand je vois un arbre dans un jardin, je ne vois pas qu'un chêne ou un frêne, je vois l'homme ou la femme qu'il l'a planté il y a cinquante, cent ans, peut être bien davantage. Et donc, je pense à tous ceux qui m'ont permis, grâce à leur travail, de découvrir leur jardin aujourd'hui.

Philippe Chauveau :

Être jardinier est, semble-t-il, un métier assez solitaire. On est seul au contact de la terre et de la nature. Au contraire, vous, vous avez voulu parler de votre métier. Vous avez publié une vingtaine d'ouvrages. Vous avez des chroniques régulièrement sur France Inter ou sur La 5. Pourquoi cette envie de partager vos connaissances et votre enthousiasme et votre goût pour la nature ?

Alain Baraton :

Le métier du jardinier est certainement le métier où l'on transmet le plus. On ne plante pas pour soi, on plante pour les générations à venir. Quand on a un potager, on ne récolte pas pour soi. Quand on connaît le prix des pommes de terre, est-ce vraiment utile de se baisser aussi souvent dans la journée pour récolter quelques kilos ? On travaille toujours pour les autres et je constate que le métier de jardinier est un métier individualiste, mais où la collectivité compte énormément. On travaille en équipe, on travaille pour les autres et pour le plaisir des autres. Donc, effectivement, moi qui suis un peu solitaire dans le mental, je travaille toujours pour les autres.

Philippe Chauveau :

Et ce partage de cette passion pour le prouvez une fois encore avec ce nouveau titre, c'est le Dictionnaire amoureux des arbres, aux éditions Plon.

  • PRÉSENTATION
  • PORTRAIT
  • LIVRE
  • Si je vous parle de Versailles et de ses jardins, la plupart d’entre vous répondront André Le Nôtre, c’est bien ! Mais si j’évoque le jardinier de Versailles, là, immanquablement, vous me répondrez Alain Baraton. Et vous aurez raison ! Depuis des années maintenant, c’est à ce surnom que répond Alain Baraton qui, depuis 1981, a non seulement su entretenir et embellir le parc royal mais a aussi eu la volonté de valoriser son métier et inciter des vocations. Rien ne prédestinait Alain Baraton à vivre les mains dans la...Dictionnaire amoureux des arbres d'Alain Baraton - Présentation - Suite
    Philippe Chauveau : Bonjour Alain Baraton.   Alain Baraton : Bonjour   Philippe Chauveau : Votre actualité, ce dictionnaire amoureux des arbres que nous allons évoquer, c'est aux éditions Plon, dans cette. Dans cette belle collection, on vous connaît avec un surnom, quand on dit Alain Baraton : "oui, c'est le jardinier de Versailles". Ça vous colle à la peau ce surnom, vous avez d'ailleurs donné ce titre à l'un de vos livres. Avant d'évoquer d'ailleurs tous ces ouvrages que vous avez écrit, il y en a une vingtaine, quel...Dictionnaire amoureux des arbres d'Alain Baraton - Portrait - Suite
    Philippe Chauveau : Ce livre, Alain Baraton, ce Dictionnaire amoureux des arbres, dans la belle collection des éditions Plon, prend place dans une bibliographie déjà conséquente. Lorsque vous avez commencé à prendre la plume pour raconter votre passion, votre amour des arbres et de la nature. Quelle a été votre envie ? C'était un besoin pour vous ? C'était un besoin de transmettre, vous me l'avez dit. Mais entre l'envie et le fait de prendre la plume, il y avait quand même un pas à franchir. Pourquoi ?   Alain Baraton : Et...Dictionnaire amoureux des arbres d'Alain Baraton - Livre - Suite