Olivier Norek

Olivier Norek

Impact

Portait 00'08'22"

Philippe Chauveau :

Bonjour Olivier Norek.

Olivier Noreck :

Bonjour.

Philippe Chauveau :

2013, c'était Code 93, c'est avec ce titre que vous avez fait votre entrée en librairie. Je rappelle qu'il y a eu un passé qui est toujours d'actualité puisque vous êtes encore policier, même si vous êtes un petit peu dégagé des obligations. C'est comme ça qu'on dit, finalement ?

Olivier Noreck :

On dit en disponibilité et aussi flic de pacotille. C'est à dire je reste flic, je reste capitaine de police, mais je ne vais pas sur le terrain et je ne subis pas tout ce qui se passe actuellement.

Philippe Chauveau :

Donc, vous êtes flic de pacotille ? Je le retiens. Sixième titre aujourd'hui avec Impact. Comment vivez-vous tout ça ? Toutes ces années, depuis 2013, il y a des images qui reviennent, des temps forts, des rencontres importantes ?

Olivier Noreck :

Oui. Le premier temps fort, c'est celui de se dire qu'il y a une fenêtre. C'est à dire que j'ai eu une vie de policier pendant 18 ans, donc une vie de terrain, et que j'avais toujours en moi cette envie aussi d'avoir une vie artistique. Alors, j'ai longtemps pensé que c'était la musique en faisant un peu de saxophone, en faisant un petit peu de musique électro. En créant des groupes à gauche, à droite pour essayer de voir un peu comment je pouvais m'exprimer. Et puis, un jour, il y a eu un concours de nouvelles dont j'ai gagné une des places. Et puis, il y a cette possibilité, à la demande d'un éditeur, d'écrire un bouquin sur ce que je connais, ma vie de policier et d'en faire un roman. Je me souviens très bien du premier jour, alors que je ne me serais jamais attendu à ça. On écrit sur une page blanche : chapitre 1. Cette idée d'écrire chapitre 1, c'est l'infini des possibles. Est-ce qu'il y en aura un deuxième ? Si il y en a un deuxième, est-ce qu'il y aura un bouquin en entier ? Et si il y a un bouquin en entier, est-ce qu'il y en aura d'autres ? Quelle sera ma vie à partir de ce chapitre 1. C'est assez amusant de se dire qu'en écrivant chapitre 1, on écrit aussi celui d'une nouvelle vie.

Philippe Chauveau :

Lorsque l'on est policier, avoir des envies d'écriture, c'est une chose. Mais il faut aussi savoir mettre des mots les uns après les autres. Et vous avez ce talent là, c'est à dire qu'il y a une vraie plume derrière le nom d'Olivier Norek. D'où vient le goût de l'écriture, l'envie d'écrire ? Lorsque vous avez ouvert ce premier chapitre, j'imagine qu'il y a eu une appréhension sur l'écriture.

Olivier Noreck :

Oui. Ce n'est pas tant comment écrire, parce que je pense que si on s'y attelle tous un peu et qu'on fait attention, on peut écrire une ou deux belles pages. C'est comment raconter une histoire en quatre cents pages. C'est beaucoup plus complexe de savoir si, oui ou non, on a l'architecture déjà quelque part dans notre cerveau. Et je n'ai pas cherché ça. C'est vraiment un cadeau. Un jour, je me suis dit je vais écrire un livre et huit mois après, le livre était terminé. Je n'ai aucune une explication sur le fait de savoir construire une histoire ou de créer des sentiments. J'ai peut être une ou deux pistes. La piste, c'est que je n'écris pas des choses qui ne sont pas dans mon ventre ou dans mon cœur, dans mon âme. J'écris des choses qui me concernent, qui me touchent, qui me meuvent ou me révolte, qui me font tomber amoureux ou me mettent en colère. Mais je n'écris rien de ce que je n'ai pas goûté, touché, senti, aimé, détesté. J'essaie de vivre les choses que j'écris et peut être que je trouve les mots parce que, justement, je me mets à l'intérieur de mes histoires.

Philippe Chauveau :

Justement, vous l'évoquez, ce serait très réducteur, de dire Olivier Norek, auteur de polars. Parce que vous abordez des sujets de société, vous vous confrontez à ces problématiques. C'est le cas encore avec celui ci où vous nous parlez de l'écologie mondiale. Si vous deviez donner une définition de votre travail d'auteur, si on met de côté le fait que vous n'êtes pas un auteur de polars, que diriez-vous ?

Olivier Noreck :

Je me dirigerait plutôt vers le roman noir, il a ça d'intéressant qu'il est politico sociale et s'inscrit chez les gens, dans leur quotidien. Il se nourrit de faits divers, de ce qui se passe autour de nous. Dans les romans policiers de demain on va parler des gilets jaunes, de Notre-Dame qui brûle, de groupes de flics masqués à cause de la Covid 19. On intègre ce qui est d'aujourd'hui. Ce qui fait le roman noir est difficilement datable et périmé. En tout cas, il ne peut pas se cannibaliser parce qu'on raconte à chaque fois ce qui se passe aujourd'hui. Alors peut être, on va dire le contraire, mais je considère les Simenon autant comme du polar que du roman noir. Parce que Simenon, qu'est-ce qu'il faisait ? Je me souviens pas vraiment des histoires de Simenon. Je ne me souviens pas avoir réellement des histoires de Maigret, mais je me souviens à chaque fois des milieux sociaux dans lesquels il allait enquêter. Donc, on avait la petite bourgeoisie française. On avait le milieu clérical. On avait aussi le milieu des pêcheurs, des routiers. Voilà, il est allé un petit peu partout et c'est ça aussi qui m'a surtout intéressé en fin de compte. Donc, voilà le roman noir il est socio-politique. Il se nourrit du tous les jours.

Philippe Chauveau :

Si je vous entends sous l'étiquette romancier, c'est aussi une façon parfois de faire un focus sur notre époque et peut être aussi de dénoncer certains thèmes qui vous sont chers ?

Olivier Noreck :

J'avais le choix quand on m'a proposé d'écrire ou j'allais écrire des polars qui n'en était que. C'est à dire il y a un flic, un assassin, à la fin le flic arrête l'assassin. Ou à la fin Le flic est l'assassin. Enfin, les scénarios se répètent un peu. Ou j'allais utiliser le roman comme une tribune et j'ai préféré avoir ça. J'ai réalisé après qu'en fait, c'était mon moteur. Mon moteur, c'est le fait social, mon moteur, c'est ce dont je peux parler et qui touche tout le monde. J'ai besoin de ce moteur en plus, qui nous fait sortir du cadre. Quand j'écris Code 93, je dénonce aussi les trafics des chiffres de la criminalité pour faire rentrer le 93 dans le Grand Paris. Quand j'écris Territoire, je dénonce les collusions entre les délinquants et les politiques. Quand j'écris Surtension, je parle de l'état catastrophique des prisons. Quand j'écris Entre deux mondes, c'est comment on a géré ce mouvement migratoire dans la jungle de Calais. Quand j'écris Surface, je raconte l'histoire d'une fliquette défigurée, mais je raconte surtout ce que c'est de n'être représenté que par sa surface. Le regard de l'autre qui juge, qui interdit, qui freine. Comment on fait en fin de compte, pour être merveilleux, pour être qui on est à l'intérieur de nous mêmes. C'est aussi l'histoire d'un auteur qui ne s'aime pas beaucoup et qui essaie de trouver à l'intérieur de lui même la lumière. Et puis là, dans l'Impact, c'est sur l'écologie. Je sais aussi que si je présente d'abord le sujet qui m'intéresse, c'est à dire le sujet social et que je dis : je vais vous parler pendant 400 pages de la jungle de Calais. Je sais que je vais avoir assez peu de lecteurs. Mais si je fais une sorte d'abus de confiance, une sorte d'escroquerie et que je leur dis d'abord, à mes lecteurs et lectrices, vous allez avoir une grande aventure policière, avec des retournements de situation, avec des chausse trappes, avec des coups de théâtre. Ils vont le lire comme un roman ludique, comme un roman de plaisir. Mais à la fin, on aura quand même lu 400 pages sur le mouvement migratoire, 400 pages sur l'écologie. En fait, je laisse le choix aux lecteurs d'avoir deux lectures, une lecture plaisir et une lecture un peu plus consciente.

Philippe Chauveau :

Des sujets qui font polémique, des sujets d'actualité, des personnages qui sont souvent cabossés dans vos différents romans. Un auteur qui ne s'aime pas. Je reprends le terme que vous avez employé. Est-ce que l'écriture vous apaise ? Est-ce qu'en montrant, en pointant du doigt des sujets d'actualités qui font polémiques, qui nous font parfois du mal, est-ce que l'auteur aussi ne s'aime pas beaucoup ? Est-ce que c'est une façon, peut-être, de vous sentir mieux en disant : je fais ma part, je me rend utile.

Olivier Noreck :

C'est un peu ça, c'est le fait d'agir. Quand j'étais policier, on me demandait souvent Mais comment tu fais pour que ton quotidien, ce soit ce que l'homme recèle de pire en lui ? Comment tu fais pour voir quotidiennement des agressions, des meurtres, des enlèvements ? Comment je fais ? En fait, la question, je la retourne. Comment vous vous faites ? Parce que moi, quand on m'appelle le matin et que j'arrive dans une situation d'injustice ou une situation de violence et que j'essaie de rétablir un peu ça, je me dis que j'ai servi à quelque chose, que j'ai agi, que j'ai apporté, sinon ma pierre, au moins mon petit gravier. J'ai été utile, j'ai fait quelque chose et ce n'est pas ce que je fais, quelque chose que la situation est tolérable. Quand je suis redevenu simple citoyen, je ne faisais plus pour l'autre. Je n'agissaient plus pour l'autre. Et là, c'était beaucoup plus difficile pour moi. Réussir à avoir un moteur qui est un moteur de dénonciation, pour être plus éclairé, plus conscient, c'est agir. Donc oui, l'impression de faire quelque chose nous sort de cette sensation de ne pas être utile. Moi, j'ai besoin d'être utile parce que justement, comme je le disais tout à l'heure, je ne m'aime pas beaucoup. Mais c'est dans le regard de l'autre. Si je suis utile pour lui, alors que je trouve ma place dans la société.

Philippe Chauveau :

Votre actualité, Olivier Noreck Impact, votre nouveau titre chez Michel Lafon.

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  • LIVRE
  • C’est en 2013 que l’on découvre Olivier Norek. Ce policier, qui a aussi œuvré pour des associations humanitaires, publie un premier roman « Code 93 » dans lequel il raconte la banlieue comme rarement un livre l’avait fait. Sous couvert d’un polar, c’est bien une peinture de notre société qu’Olivier Norek nous propose alors. Au fil des titres suivants, Olivier Norek va conserver cette spécificité faite d’intrigues complexes et bien ficelées, de personnages parfaitement construits à la psychologie ambigüe mais...Dans les brumes de Capelans d'Olivier Norek - Présentation - Suite
    Philippe Chauveau : Bonjour Olivier Norek. Olivier Noreck : Bonjour. Philippe Chauveau : 2013, c'était Code 93, c'est avec ce titre que vous avez fait votre entrée en librairie. Je rappelle qu'il y a eu un passé qui est toujours d'actualité puisque vous êtes encore policier, même si vous êtes un petit peu dégagé des obligations. C'est comme ça qu'on dit, finalement ? Olivier Noreck : On dit en disponibilité et aussi flic de pacotille. C'est à dire je reste flic, je reste capitaine de police, mais je ne vais pas sur le...Dans les brumes de Capelans d'Olivier Norek - Portait - Suite
    Philippe Chauveau : Voici ce nouveau titre Olivier Norek, Impact. Et c'est vrai que je vous l'ai dit avant que nous fassions l'émission, j'ai reçu ce livre un peu comme un "uppercut". C'est un choc parce que vous nous mettez face à nos réalités. Vous allez nous parler de l'écologie, mais surtout vous proposez un roman donc il y a des personnages. On va faire connaissance au tout début avec un militaire qui s'appelle Virgile. Nous sommes en Afrique, les premières pages sont très fortes, très violentes. Qui est-il, Virgile Solal...Dans les brumes de Capelans d'Olivier Norek - Livre - Suite