Christian Signol

Christian Signol

Là où vivent les hommes

Portrait 00'06'43"

Philippe Chauveau
Bonjour Christian Signol.

Christian Signol
Bonjour.

Philippe Chauveau
Merci beaucoup de votre visite, Là où vivent les hommes, c'est votre nouvelle actualité chez Albin Michel. On vous connaît bien en librairie, on vous connaît bien en bibliothèque. Vous êtes présent depuis 1984 dans la vie littéraire des Français avec Les cailloux bleus. Et puis, il y a eu peut-être une autre vie avant, en tout cas, d'autres influences. Comment l'écriture arrive-t-elle dans votre vie Christian Signol ?

Christian Signol
C'est venu très tôt, dès l'école primaire où je me souviens qu'il y avait au fond de la classe une toute petite bibliothèque de trois étages. Et il y avait là toute la poésie, tous les livres de Victor Hugo et moi, à l'âge de 11 ans, c'est-à-dire avant de partir en 6e, dans ce petit village là, j'ai lu tout Victor Hugo à 11 ans. Ça a été déterminant dans mon amour de la lecture et de l'écriture, et de ce que je suis devenu par la suite. D'ailleurs, il y avait là aussi un instituteur magnifique qui demandait à tous les élèves : qu'est ce que vous voulez faire plus tard ? Et moi, j'ai répondu à cet homme là à l'âge de 11 ans : je veux devenir écrivain. Et cet homme extraordinaire m'a dit : si tu le veux vraiment, tu le deviendras.

Philippe Chauveau
C'était un bon départ dans la vie. Et puis, il y a eu cette envie de la transmission, du partage dans cette autre vie d'avant l'écriture.

Christian Signol
Oui, c'est venu très tôt. J'ai commencé à écrire des petites choses à l'âge de 15-16 ans, mais le chemin était quand même très difficile, parce qu'il était quand même impensable, quand on vit au fin fond de la province, de prétendre publier des livres dans une grande maison d'édition parisienne. Et donc, le chemin a duré dix ans, c'est-à-dire dix ans de manuscrits refoulés par les éditeurs parisiens. Parce que l'écriture, c'est un métier qui s'apprend. Malheureusement, en France, il y a pas d'ateliers d'écriture dans les universités, donc c'est un chemin qu'il faut faire tout seul et que j'ai fait seul, effectivement. Mais je me souviens que chaque fois que je recevais un manuscrit refusé par un éditeur, je me remettais à écrire dès la nuit qui suivait, parce que je travaillais la journée en plus. Et donc, ça n'a pas été facile.

Philippe Chauveau
C'est assez stimulant, finalement, de recevoir des refus. Au départ, c'est aussi une façon de vous dire "allez y, continuez".

Christian Signol
Oui, c'est stimulant. Parce qu'on comprend qu'on est un peu en-dessous de la vérité et qu'il faut travailler davantage, c'est un chemin solitaire finalement. C'est stimulant mais en même temps, c'est aussi parfois un peu accablant. Il faut se remettre en marche alors qu'on a porté beaucoup d'espoir sur un manuscrit en travaillant la journée, en écrivant la nuit. Et donc, c'est difficile. Mais pour moi, finalement, je n'avais aucun mérite parce que l'oxygène m'arrive par les livres. Donc, finalement, je n'ai pas eu le choix.

Philippe Chauveau
Vous avez évoqué Victor Hugo avec ces souvenirs d'enfance. Quels sont les autres auteurs qui vous ont vraiment marqué, qui vous ont influencé sciemment ou inconsciemment et qui, peut être, vous ont donné envie.

Christian Signol
Surtout Giono, bien sûr. Giono, Maurice Genevoix, André Chanson, Stendhal. Tous ces gens qui écrivaient à la fois sur le monde naturel, mais en même temps qui mettaient en scène la grande Histoire. Comme Stendhal avec l'épopée napoléonienne etc. Donc je suis nourri à la fois du monde naturel dans lequel j'ai vécu, dans lequel je suis né, mais également par la grande Histoire, que ce soit par les écrivains ou que ce soit aussi par ma famille. Parce que mes deux grands parents avaient fui la guerre de 14-18, et étaient revenus mutilés alors que c'étaient des ouvriers, parce que mon père aussi était un grand résistant d'un des groupes dans les maquis du Lot. Il faisait partie du réseau Buckmaster, donc je suis nourri de tout ça, en fait.

Philippe Chauveau
Dans vos romans, dans vos livres, il y a une constante, c'est la beauté des paysages. C'est l'envie aussi de nous raconter un monde qui, parfois, n'est plus, un monde qui se meurt, de le confronter avec notre époque contemporaine. En France, on a tendance parfois à mettre un peu les gens dans les cases, et peut-être que vous écrivez des choses qui, aujourd'hui, peuvent sembler non pas dépassées, mais qui ne ressemblent plus à ce que les gens recherchent. Est-ce qu'il y a une sorte de combat, de militantisme dans cette écriture ? Parce qu'on sait très bien, les ventes sont là pour le prouver, que vous correspondez à une attente des lecteurs. Est-ce que c'est une part de militantisme, votre écriture ?

Christian Signol
Je ne dirais pas ça. Je dirais plutôt que c'est un territoire que je défends et une manière de vivre, c'est-à-dire une manière de vivre au contact du monde naturel. Le philosophe Michel Serres a écrit que le Néolithique s'était achevé en l'an 2000, c'est-à-dire que le Néolithique, c'était le contact avec le monde naturel et que la plus grande révolution depuis le Néolithique, c'était les grandes métropoles, ce qui est exact. Mais moi, j'essaye de démontrer le contraire, effectivement, mais ce n'est pas du militantisme. Ça correspond, je crois aujourd'hui à la vérité d'aujourd'hui. C'est-à-dire que les gens, par exemple, qui ont souffert du confinement, à la fin du confinement, ils se sont enfuis vers les campagnes, vers le monde naturel, parce qu'ils ont compris qu'ils avaient besoin d'espace, d'air, de lumière, de forêts, de champs, etc. Etc. Cette tendance suicidaire et tragique qui a consisté à aller s'agglomérer dans des villes, dans les grandes métropoles où les hommes ont trouvé des réflexes animaux de survie, aujourd'hui je pense qu'elle a tendance à s'inverser et c'est pour moi un espoir pour l'avenir.

Philippe Chauveau
Justement, vous devancez ma question, c'est que finalement, vous êtes plutôt un précurseur parce que finalement, vous le dites, la crise sanitaire a mis cela en évidence. Mais il y a cette envie de revenir peut-être à des valeurs en retournant s'installer dans des villes ou dans des campagnes de plus petite taille. Il y a le retour vers tout ce qui est réseau court en producteurs locaux, etc. Donc, ça veut dire que tout ce que vous avez évoqué dans vos livres jusqu'à aujourd'hui, vous étiez un peu précurseurs. Vous étiez déjà dans la tendance.

Christian Signol
Un prophète !

Philippe Chauveau
Un prophète, en quelque sorte.

Christian Signol
Non, ce serait beaucoup dire. Mais c'est vrai que j'ai toujours écrit sur ce genres de sujets parce que je pensais que c'était vraiment indispensable. Michel Serres dit par exemple que le plus grand drame du 18ème siècle, c'est justement que depuis la révolution industrielle, les gens se sont précipités vers les grandes métropoles et qu'en agissant ainsi, ils ont rompu l'équilibre qui, pendant des siècles, avait assuré la permanence de l'humanité. Et c'est vrai que ça a été un grand effondrement cette manière de fuir le monde naturel pour aller dans les grandes villes et je pense que les gens en subissent aujourd'hui les conséquences et surtout qu'ils en prennent conscience. Et que donc, on va probablement assister à une inversion de cette tendance. D'ailleurs, il paraît que dans le Limousin, en Périgord ou en Courcy, il n'y aurait plus actuellement aucune résidence secondaire à vendre.

Philippe Chauveau
C'est plutôt bon signe.

Christian Signol
C'est plutôt bon signe, à mon avis.

Philippe Chauveau
Votre actualité, Christian Signol chez Albin Michel, là où vivent les hommes, c'est votre nouveau titre.

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