Luc Ferry

Luc Ferry

L'invention de la vie de bohème

Portrait 3'57

Bonjour Luc Ferry. Merci de nous accueillir à l'occasion de la sortie au Cercle d'Art de ce très bel ouvrage « L'invention de la vie de Bohème ». On connait l'homme politique, le chroniqueur, vous êtes régulièrement convié pour donner votre position sur tel ou tel sujet.
On connait aussi le philosophe et surtout le philosophe. Quand on est enfant ou adolescent, on veut être pompier, vétérinaire ou médecin, est-ce que l'on peut avoir envie d'être philosophe ?
D'abord, je vais être honnête, j'aurais aimé être pilote de course comme mon père. C'était le premier métier à l'époque ou plutôt la première vocation, mais quand j'ai découvert la philosophie, j'avais un grand frère, plus âgé que moi, Jean-Marc,
qui est lui aussi professeur d'université en philosophie. Quand j'ai découvert grâce à lui la philosophie, il m'avait fait lire un texte de Kant, la préface de « La critique de la raison pure », je me suis rendu compte que ça ne ressemblait à rien de ce que je connaissais.
Ca parlait de l'être humain, comme la littérature, mais ça avait cette espèce de rationalité de la science qui n'appartient pas au monde littéraire. Et donc cet objet non identifié et pour moi non identifiable à l'époque m'a vraiment intrigué.
J'ai voulu savoir ce que c'était et à quinze ans j'ai décidé d'y consacré ma vie et je n'ai pas changé depuis.
Vous êtes un philosophe un peu poil à gratter. Vous n'allez pas dans le sens dans lequel vont les autres philosophes que l'on peur connaître. Est-ce que quelque part vous aimez mettre le doigt où ça fait mal ?
Non, il y a une dimension critique dans la philosophie. Il y a une dimension de recherche de la vérité. Sans vouloir être cuistre, je cite Hegel, mais ce n'est pas par cuistrerie, c'est parce qu'il dit quelque chose de très intelligent.
Il dit que la philosophie c'est « son temps saisi dans la pensée » et il y a quelque chose de cet ordre là dans la philosophie, dans le travail théorique de la philosophie. De la même manière, il y a une dimension éthique.
Il y a forcément dans l'optique de la connaissance de la vérité et dans l'optique de l'éthique une dimension critique. Donc ça fait partie du jeu. La tâche de la philosophie c'est de réfléchir à cette question de la vie bonne et éventuellement de proposer des hypothèses de travail.
Vous même, lorsque vous publiez, lorsque vous écrivez, même si vous n'êtes pas romancier, quel est le mot qui pourrait traduire votre envie vis à vis du lecteur ? C'est le partage, c'est l'échange ?
Oui. Partage, c'est un mot un peu nunuche, mais en même temps c'est le bon...
C'est le seul qui me soit venu à l'esprit...
C'est le bon. C'est ce que je vous aurai dit si vous ne l'aviez pas dit. Evidemment, ça fait un peu nunuche, un peu cul-cul, le quart d'heure partage, ce n'est évidemment pas au sens cul-cul du terme. Je vais vous dire dans quel sens exactement.
Quand vous êtes devant un paysage magnifique ou quand vous êtes dans un musée sublime – j'étais l'autre jour à Tournay dans un petit musée que pas grand monde visite aujourd'hui en Belgique où il y a des oeuvres absolument magnifiques, à tomber par terre –
si vous êtes seul, vous êtes malheureux. La joie que vous éprouvez est entachée d'une espèce de souffrance liée à la solitude, on aimerait avoir quelqu'un qu'on aime à côté de soi, partager cette beauté, cette grandeur qu'on a devant soi.
Ce qui m'intéresse, c'est d'écrire sans jargon, parce que j'ai envie de partager avec un lecteur non spécialiste le caractère sublime de ces palais magnifiques que sont les grandes philosophies.
Et en plus, je pense que si on veut un jour philosopher par soi-même, il faut d'abord, avec humilité, commencer par les autres. L'idéologie des cafés de philo est sympathique, mais elle est fausse.
On ne philosophe pas comme ça en claquant des doigts, pas plus que Bach ou Beethoven ne pouvaient se permettre d'ignorer le solfège, ça n'a pas de sens.
Merci Luc Ferry. Votre actualité, c'est donc « L'invention de la vie de Bohème » et c'est aux éditions Cercle d'Art.

Philippe Chauveau :
Bonjour Luc Ferry. Merci de nous accueillir à l'occasion de la sortie au Cercle d'Art de ce très bel ouvrage « L'invention de la vie de Bohème ». On connait l'homme politique, le chroniqueur, vous êtes régulièrement convié pour donner votre position sur tel ou tel sujet. On connait aussi le philosophe et surtout le philosophe. Quand on est enfant ou adolescent, on veut être pompier, vétérinaire ou médecin, est-ce que l'on peut avoir envie d'être philosophe ?

Luc Ferry :
D'abord, je vais être honnête, j'aurais aimé être pilote de course comme mon père. C'était le premier métier à l'époque ou plutôt la première vocation, mais quand j'ai découvert la philosophie, j'avais un grand frère, plus âgé que moi, Jean-Marc, qui est lui aussi professeur d'université en philosophie. Quand j'ai découvert grâce à lui la philosophie, il m'avait fait lire un texte de Kant, la préface de « La critique de la raison pure », je me suis rendu compte que ça ne ressemblait à rien de ce que je connaissais. Ca parlait de l'être humain, comme la littérature, mais ça avait cette espèce de rationalité de la science qui n'appartient pas au monde littéraire. Et donc cet objet non identifié et pour moi non identifiable à l'époque m'a vraiment intrigué. J'ai voulu savoir ce que c'était et à quinze ans j'ai décidé d'y consacré ma vie et je n'ai pas changé depuis.

Philippe Chauveau :
Vous êtes un philosophe un peu poil à gratter. Vous n'allez pas dans le sens dans lequel vont les autres philosophes que l'on peur connaître. Est-ce que quelque part vous aimez mettre le doigt où ça fait mal ?

Luc Ferry :
Non, il y a une dimension critique dans la philosophie. Il y a une dimension de recherche de la vérité. Sans vouloir être cuistre, je cite Hegel, mais ce n'est pas par cuistrerie, c'est parce qu'il dit quelque chose de très intelligent. Il dit que la philosophie c'est « son temps saisi dans la pensée » et il y a quelque chose de cet ordre là dans la philosophie, dans le travail théorique de la philosophie. De la même manière, il y a une dimension éthique. Il y a forcément dans l'optique de la connaissance de la vérité et dans l'optique de l'éthique une dimension critique. Donc ça fait partie du jeu. La tâche de la philosophie c'est de réfléchir à cette question de la vie bonne et éventuellement de proposer des hypothèses de travail.

Philippe Chauveau :
Vous même, lorsque vous publiez, lorsque vous écrivez, même si vous n'êtes pas romancier, quel est le mot qui pourrait traduire votre envie vis à vis du lecteur ? C'est le partage, c'est l'échange ?

Luc Ferry :
Oui. Partage, c'est un mot un peu nunuche, mais en même temps c'est le bon...

Philippe Chauveau :
C'est le seul qui me soit venu à l'esprit...

Luc Ferry :
C'est le bon. C'est ce que je vous aurai dit si vous ne l'aviez pas dit. Evidemment, ça fait un peu nunuche, un peu cul-cul, le quart d'heure partage, ce n'est évidemment pas au sens cul-cul du terme. Je vais vous dire dans quel sens exactement. Quand vous êtes devant un paysage magnifique ou quand vous êtes dans un musée sublime – j'étais l'autre jour à Tournay dans un petit musée que pas grand monde visite aujourd'hui en Belgique où il y a des oeuvres absolument magnifiques, à tomber par terre – si vous êtes seul, vous êtes malheureux. La joie que vous éprouvez est entachée d'une espèce de souffrance liée à la solitude, on aimerait avoir quelqu'un qu'on aime à côté de soi, partager cette beauté, cette grandeur qu'on a devant soi. Ce qui m'intéresse, c'est d'écrire sans jargon, parce que j'ai envie de partager avec un lecteur non spécialiste le caractère sublime de ces palais magnifiques que sont les grandes philosophies. Et en plus, je pense que si on veut un jour philosopher par soi-même, il faut d'abord, avec humilité, commencer par les autres. L'idéologie des cafés de philo est sympathique, mais elle est fausse. On ne philosophe pas comme ça en claquant des doigts, pas plus que Bach ou Beethoven ne pouvaient se permettre d'ignorer le solfège, ça n'a pas de sens.

Philippe Chauveau :
Merci Luc Ferry. Votre actualité, c'est donc « L'invention de la vie de Bohème » et c'est aux éditions Cercle d'Art.

L'invention de la vie de bohème Aux éditions Cercle d'Art
  • PRÉSENTATION
  • PORTRAIT
  • LE LIVRE
  • L'AVIS DU LIBRAIRE
  • On le connait en tant que philosophe, ministre, chroniqueur, Luc Ferry a plus d'une corde à son arc, mais un seul leitmotiv, l'échange, le partage, le dialogue. Attentif à l'évolution de notre société, n'hésitant pas à aborder les sujets les plus polémiques en argumentant pour exposer ses positions quitte à faire grincer des dents, Luc Ferry suit son chemin, fidèle à ses idées, tout en flegme et en élégance, sans se départir d'une certaine originalité. Cette originalité on la retrouve d'ailleurs dans ce bel album aux...L'invention de la vie de bohème de Luc Ferry - Présentation - Suite
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    Philippe Chauveau :Luc Ferry, quel bel album que vous publiez aux éditions Cercle d'Art, « L'invention de la vie de Bohème ». J'ai envie de dire que vous êtes toujours là ou on ne vous attend pas. Comment un philosophe peut-il proposer un livre sur la Bohème et avec beaucoup d'illustrations, il y a des demi-mondaines à moitié nues à toute les pages. Qu'est ce qui vous fascine dans la vie de Bohème ?Luc Ferry :Très brièvement, c'est à la fois la pré-histoire de mai 68, l'invention de l'utopie moderne et en même temps,...L'invention de la vie de bohème de Luc Ferry - Le livre - Suite
    La Colomberie(Paris)Jean-Denys Tétier On ne s'attend pas à trouver Luc Ferry, le philosophe, auteur d'un magnifique album sur la vie de Bohème, la vie dans les années 1850-1900 à Paris, où se côtoient des écrivains, des journalistes, des sculpteurs, des peintres. Mais il semble que notre philosophe, ministre de l'Education, s'intéresse avec beaucoup de sérieux à cette période où l'art a explosé. Il en ressort un très beau livre qui nous donne de magnifiques reproductions, mais aussi un texte intéressant, documenté. On...L'invention de la vie de bohème de Luc Ferry - L'avis du libraire - Suite