Valentine Goby

Valentine Goby

L'île haute

Portrait 00'08'31"

Philippe Chauveau

Bonjour Valentine Goby.


Valentine Goby
Bonjour.


Philippe Chauveau
Merci d'être avec nous pour votre actualité, L'Île haute. C'est votre nouveau titre chez Actes Sud. J'ai envie de vous souhaiter un bon anniversaire. Vous fêtez vos 20 ans.


Valentine Goby
Oui, c'est ça. J'ai à nouveau 20 ans.

Philippe Chauveau
Vous avez à nouveau 20 ans. La note sensible, c'était en 2002, aux éditions Gallimard. Et puis après, il y a eu ce beau parcours, avec des prix, avec des titres, des titres remarqués. 20 ans, est-ce que c'est l'occasion de tirer un bilan ou pas du tout ? Est-ce que ça vous amuse ? Ça vous énerve de regarder dans le rétroviseur ?

Valentine Goby
Ou je suis pas très rétroviseur. C'est plutôt l'occasion de célébrer en fait, la littérature et les gens qui m'ont accompagnée, puisqu'en effet, c'est un parcours assez joyeux et dense. Toutes les occasions de se réjouir sont bonnes à prendre. En voilà une !

Philippe Chauveau
Justement, vous parlez de ceux qui vous ont accompagnéE sur ce parcours. Pour vous, cette réussite en tant qu'auteur, en tant qu'autrice en l'occurrence, c'est aussi grâce aux rencontres, grâce à tous ceux qui vous ont suivie sur le chemin ?

Valentine Goby
Oui, oui, ça remonte d'ailleurs très loin, je ne suis pas rétroviseur, mais je dois quand même rendre à ceux qui m'ont accompagnée sur le chemin de l'écriture et de la lecture. C'est venu vraiment de rencontres d'abord avec des professeurs de lettres. Je le suis devenue ensuite pendant dix ans et puis ensuite, j'ai eu des éditeurs extraordinaires. J'ai commencé par publier chez Gallimard ce qui était, c'est vrai, un peu inespéré pour moi qui arrivais de mon village de Châteauneuf-de-Grace et qui regardais de très, très loin cet univers du livre qui m'était assez étranger. Et puis je suis maintenant dans une maison pour laquelle le mot maison a vraiment du sens, c'est-à-dire que je me sens chez moi, chez Actes Sud, où je suis entourée par des gens extrêmement exigeants et bienveillants aussi. Et j'ai une éditrice avec laquelle j'ai pu tisser une relation de grande confiance et dont l'accompagnement m'aide moi aussi à mieux écrire.

Philippe Chauveau
Vous disiez que lorsque vous étiez dans votre petit village, vous regardiez le monde de l'édition sans trop connaître tout ça. Ça veut dire que vous vous y intéressiez et ça veut dire que ça faisait partie d'une envie ou finalement, l'écriture arrive-t-elle comme ça un peu par hasard ?

Valentine Goby
Ah non ! J'étais vraiment très, très éloignée du monde parisien, du monde de la littérature. Mes parents étaient des gens qui vivaient à la campagne, dans une campagne extrêmement généreuse et splendide. Mon père était parfumeur, je suis fille et petite-fille de parfumeur, ma mère était tisserande. Le rapport à la nature, à la matière était constant. J'ai beaucoup appris par les sens et c'est avec ça que j'écris aujourd'hui. Donc j'ai fait mes études à Paris, à Sciences Po et c'est comme ça en fait... Sciences-Po, c'est juste à côté de chez Gallimard. C'est comme ça, en fait, que j'ai commencé un tout petit peu à apercevoir ce monde qui était très éloigné du mien. Et voilà, aujourd'hui, je suis parisienne, donc c'est un environnement qui m'est finalement devenu assez familier.

Philippe Chauveau
Vous avez déjà donné quelques quelques éléments de réponse. Néanmoins, si l'on reprend votre bibliographie, que ce soit "La note sensible", "Murène" ou plus récemment "Kinderzimmer" ou un paquebot dans les arbres et aujourd'hui "L'ïle haute", le lien au-delà de cette transmission par rapport à ce que vos parents vous avaient eux-mêmes donné, le fil rouge de votre écriture, le fil rouge de toutes ces histoires que vous avez tissées, quel est-il ?

Valentine Goby
Le rapport au corps est central, alors il s'est incarné dans des figures de femmes, assez longtemps, probablement parce que j'en suis une et que cette identité féminine, en tous cas ce corps-là, construit aussi un rapport au monde. Aujourd'hui, c'était d'ailleurs des personnages plutôt masculins. Non pas parce que je m'intéresse plus aux hommes qu'aux femmes, mais parce que je crois que j'ai eu envie de désexuer en fait mes personnages pour m'intéresser plutôt à la manière dont en effet le rapport du corps au monde nous déplisse et nous permet de déployer une identité quelle qu'elle soit. Je n'ai pas envie de rentrer dans les questions de genre et d'ailleurs, c'est pourquoi l'enfance m'intéresse en particulier. C'est un personnage d'enfant qui est ce territoire encore extrêmement malléable, qui est extrêmement sensible et imprimé directement dans sa chair par ce qu'il vit, par le paysage, par ses rencontres.

Philippe Chauveau
Au-delà de votre travail d'écriture, de ce que vous souhaitez transmettre, vous êtes une autrice qui ne reste pas dans sa tour d'ivoire. Vous allez à la rencontre des lecteurs, on en parlera, mais vous êtes aussi une femme auteur, impliquée, engagée. Vous avez collaboré avec plusieurs institutions du livre. Aujourd'hui, vous êtes à la SOFIA dans cet organisme. Pourquoi est-ce important pour vous, en tant qu'autrice justement, de vous impliquer, de faire vivre le monde du livre ? Est-ce qu'il y a une part de militantisme dans ce travail ?

Valentine Goby
Je ne sais pas si le mot militantisme est le bon. En tout cas, je suis intéressée par la vie réelle, économique, quotidienne, de la littérature. C'est-à-dire que, de la même façon qu'une librairie, c'est un endroit pour penser, pour rêver. Mais c'est aussi une entreprise avec des gens qui travaillent et donc il faut prendre en compte cet environnement économique. Je pense que l'auteur n'est pas simplement un poète et un créateur éthéré. Il est aussi quelqu'un d'abord qui agit dans la cité, qui a sa part dans la réflexion collective, qui peut peut-être aider à la faire avancer, qui lui-même est un citoyen. Et puis, c'est aussi un être économique et je trouve important de ne pas tenir à distance ces considérations comme si elles étaient obscènes. Je crois que la vie culturelle et littéraire est d'autant plus dynamique et forte que les gens peuvent vivre correctement de leur métier. Et donc j'ai à cœur de prendre ma part.

Philippe Chauveau
Et je le disais. Vous êtes aussi une autrice qui aimez aller à la rencontre de vos lecteurs, avec des salons notamment. Et vous avez aussi cette particularité depuis quelques années de monter sur les planches. Vous avez fait du théâtre quand vous étiez ado, mais c'est vrai que c'est complètement différent, mais c'est une occasion de faire parler vos textes avec un accompagnement musical, avec de l'image, avec de la lumière. Qu'est-ce qui vous a donné cette envie et pourquoi cette particularité ?

Valentine Goby
C'est une autre création. Ce n'est pas une déclinaison du livre. C'est vraiment à partir du livre, créer, autre chose qui peut se nourrir aussi d'images, de musique comme vous l'avez dit, puisque je travaille avec un musicien compositeur qui ne fait pas qu'accompagner, qui prend vraiment en charge aussi le récit, les émotions, les sensations. Et donc, je trouve ce travail assez passionnant parce que c'est une manière de regarder autrement le travail qu'on a fait.
C'est presque un exercice de traduction. On crée à plusieurs. Le collectif c'est vraiment intéressant. Et toute la solitude dont a besoin un auteur ou une autrice peut se trouver aussi enrichie dans un deuxième temps par ce travail de collaboration. J'aime bien l'idée aussi qu'en allant sur une scène, on va vers le lecteur. Ce n'est pas seulement le lecteur qui vient vers nous.
Je crois qu'il faut accepter et cultiver toutes ces opportunités que nous offrent le recul parfois de la lecture pure pour peut-être amener autrement la littérature dans la société.


Philippe Chauveau
Eu égard à tout ce que vous venez de nous dire, et on l'a rappelé, cela fait 20 ans maintenant que vous êtes présente en librairie, aujourd'hui à l'instant T, votre ressenti d'un mot, si vous deviez définir ce que vous êtes en tant qu'autrice, ce que vous avez envie de transmettre, ce que vous avez envie de dire par les mots ? Que diriez vous ?


Valentine Goby
Il y a un mot qui me vient comme ça, enfin, il y en a deux... En fait, je crois qu'ils marchent ensemble. Et d'ailleurs, ils évoquent probablement aussi ce livre, "L'île haute". C'est le doute et l'émerveillement. J'ai vraiment envie de montrer la poésie et la beauté du monde, qui sont les seules sources profondes que nous avons pour tenter justement de contrer ce grand mouvement noir qui nous entoure.

Philippe Chauvea
Valentine Goby, c'est votre actualité aux éditions Actes Sud, L'île Haute.

  • PRÉSENTATION
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  • LIVRE
  • Née au pays de la lavande, d’un père parfumeur et d’une mère tisserande, Valentine Goby suit ses études à Sciences Po avant de partir quatre ans en Asie avec des associations humanitaires. De retour en France, elle enseigne les lettres en collège et le théâtre et se lance dans l’écriture.Passionnée de littérature, elle publie son premier roman en 2002, chez Gallimard, « La note sensible » salué par la critique. Très vite, la jeune femme se fait un nom auprès des lecteurs mais aussi auprès de ses collègues auteurs...L'île haute de Valentine Goby - Présentation - Suite
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