Depuis son premier roman « Tombent les avions » en 2004, Caroline Sers a développé un univers littéraire qui lui est propre. Elle n’hésite pas à prendre des risques, s’aventurant dans divers registres, du roman social au polar en passant par le récit. Mais le fil rouge qui unit tous les titres de Caroline Sers est bien celui de la famille. Histoires d’héritage, perte d’un enfant, rébellion intergénérationnelle, conflits, secrets ou confidences, l’auteur décortique avec finesse tout ce qui fait le charme des...
Les belles espérances de Caroline Sers - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :Bonjour Caroline Sers et merci d'être avec nous pour votre actualité, votre huitième titre déjà… Le temps passe vite ! Vous publiez chez Buchet Chastel, « Les belles espérances » avec cette jolie couverture. Je dis que le temps passe vite puisque nous avions déjà eu l'occasion de nous rencontrer pour un précédent titre. Si vous deviez définir d'un mot ce que représente l'écriture dans votre vie ? Au fil de ces romans, qui ont été dans des univers littéraires assez différents, vous avez raconté...
Les belles espérances de Caroline Sers - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :Avec ce nouveau roman, « Les belles espérances », Caroline Sers, vous nous emmenez dans le Paris des années 60. Nous sommes précisément en mai 1968 dans un appartement cossu, c'est le moins que l'on puisse dire. Avec la famille Bouillard. Il y a Charlotte, la mère et les deux fils, Pierre et Fabrice, qui observent cette société qui est en train de changer. Nous allons suivre ces protagonistes sur 50 ans, jusqu'en 2018, avec les enfants avec les petits-enfants, l’oncle et la tante aussi, Geneviève et...
Les belles espérances de Caroline Sers - Livre - Suite
Caroline Sers
Les belles espérances
Présentation 00'02'30"Depuis son premier roman « Tombent les avions » en 2004, Caroline Sers a développé un univers littéraire qui lui est propre. Elle n’hésite pas à prendre des risques, s’aventurant dans divers registres, du roman social au polar en passant par le récit. Mais le fil rouge qui unit tous les titres de Caroline Sers est bien celui de la famille. Histoires d’héritage, perte d’un enfant, rébellion intergénérationnelle, conflits, secrets ou confidences, l’auteur décortique avec finesse tout ce qui fait le charme des relations familiales.
Avec son 8ème roman « Les belles espérances », Caroline Sers nous entraine dans les beaux quartiers de Paris, entre le boulevard St Germain et la rue de Lille, où vit la famille Bouillard. Dans cet appartement cossu et bourgeois, Charlotte règne en despote depuis la mort prématurée de son époux. Sans qu’il s’agisse d’une suite, les lecteurs fidèles à Caroline Sers se souviendront du personnage de Charlotte, apparu dans un précédent roman, « Les petits sacrifices ».
Face à ces deux grands fils, Pierre et Fabrice, Charlotte a fort à faire pour maintenir à flot la famille d’autant que nous sommes en mai 1968 et que les pavés volent dans les rues de la capitale. Pierre observera ce monde qui change sans bien le comprendre, restant dans le giron familial tandis que Fabrice, par amour et idéalisme, partira vivre en communauté, élevant des chèvres en Corrèze, avant de revenir quelques années plus tard, tel le fils prodigue.
La force de ce roman est de nous raconter une famille française de 1968 à 2018 face aux soubresauts de la société. Au fil des décennies, les générations se succèdent, ceux qui tenaient les rênes sauront-ils laisser la place, ceux qui se croyaient tellement différents parviendront-ils à ne pas trahir leurs idéaux, ceux qui veulent casser les codes et sortir du moule éviteront-elles les sirènes de la liberté ?
50 ans de la vie d’une famille avec ses drames, ses blessures, ses incompréhensions mais aussi la complicité et la fierté d’être du même sang et de prendre sa place dans la ronde du monde.
L’écriture de Caroline Sers porte avec justesse et finesse cette histoire dans laquelle chacun pourra se reconnaitre.
« Les belles espérances » de Caroline Sers est publié chez Buchet-Chastel
Caroline Sers
Les belles espérances
Portrait 00'06'22"Philippe Chauveau :
Bonjour Caroline Sers et merci d'être avec nous pour votre actualité, votre huitième titre déjà… Le temps passe vite ! Vous publiez chez Buchet Chastel, « Les belles espérances » avec cette jolie couverture. Je dis que le temps passe vite puisque nous avions déjà eu l'occasion de nous rencontrer pour un précédent titre. Si vous deviez définir d'un mot ce que représente l'écriture dans votre vie ? Au fil de ces romans, qui ont été dans des univers littéraires assez différents, vous avez raconté des choses très différentes. L'écriture, c'est quoi dans votre vie ?
Caroline Sers :
L'écriture, c'est un espace de liberté dans ma vie. C'est l'endroit où je peux faire ce que je veux, où je peux laisser libre cours à mon imagination et à mes émotions. C'est un univers qui n'appartient qu'à moi.
Philippe Chauveau :
Une petite bulle, un espace de liberté… Cela veut dire, qu'à certains moments de votre vie, vous vous êtes sentie enfermée, prise au piège dans un carcan ?
Caroline Sers :
Je trouve que dans la vie quotidienne, en général, on est enfermé. Pris au piège, c'est un grand mot. Mais disons qu'on est contraint quand même par tout un tas de contingences extérieures auxquelles on ne peut pas échapper. C'est normal, on en est tous là mais, du coup, dans l'écriture, c'est vraiment un moment à part, un temps à part un espace à part. Et où, vraiment, on fait ce qu'on veut.
Philippe Chauveau :
Cet espace à part, cette bulle de liberté, vous l'avez découverte aussi plus jeune avec la lecture. Qui vous a fait découvrir la lecture et quels sont les auteurs ou les titres qui vous ont fait grandir ?
Caroline Sers :
La lecture familiale, au sein de ma famille j'avais un père qui était un grand lecteur. J'ai adoré les romans classiques du XIXème siècle, à commencer par Jules Verne et Hector Malot. Ils font voyager, ils emmènent à l'aventure. Puis après, Zola que j'ai dévoré. Je l'ai lu plus âgée quand même, plutôt à l'adolescence, et j'avais vraiment l'impression de découvrir un monde et de rencontrer des personnes grâce à ces personnages que je n'aurais jamais eu l'occasion évidemment de rencontrer.
Philippe Chauveau :
Vous avez aussi découvert la stylistique et l'écriture.
Caroline Sers :
j'ai découvert l'écriture plus tard. Je pense qu'à ce moment-là, quand est adolescent, c'est quand même moins présent que, plus tard, quand on a lu plus de choses et qu'on s'est rendu compte des différents styles.
Mais c'est vrai que dans les romans du XIXème siècle, il y a un style un peu compassé que j'aimais beaucoup.
Philippe Chauveau :
Et après, il y a eu d'autres découvertes avec des auteurs plus contemporains, j'imagine, en littérature française et étrangère? Etes-vous du genre à butiner, à aller chercher un peu dans tous les registres ? Avez-vous quand même des univers bien spécifiques ?
Caroline Sers :
C’est vrai, j'ai tendance à butiner, à essayer, à voir si cela me plaît ou pas… Quand j'étais plus jeune, une fois que j'avais commencé un livre, je le terminais toujours. Maintenant, j'avoue que quand cela ne me plaît pas, je ne le termine pas parce que je n'ai pas le temps. J'ai trop de choses à lire et plus assez de temps. Mais j'ai pas mal butiné. En fait, à une époque, j'ai beaucoup lu Cendrars et lui cite beaucoup d'auteurs ; j'adorais ça. Parce qu'à chaque fois, je les notais. Et puis, j'allais voir les auteurs qu’il citait une sorte de bibliothèque idéale.
Mais c'était un procédé un peu comme ça en arborescence.
Philippe Chauveau :
Avez-vous l'impression que toutes ces découvertes littéraires vous ont menée à votre parcours professionnel puisqu'aujourd'hui vous vous travaillez dans l'univers de l'écriture ? Au-delà du fait que vous soyez vous même auteur, vous êtes dans le milieu de l'édition. Cela a été très vite une évidence ?
Caroline Sers :
Cela a été l'évidence très rapidement. Très vite, j’ai su que j'avais envie d'écrire et de travailler dans un milieu où il y avait des livres, des journaux, ou dans le domaine de l'écriture, ça oui. Après, l'édition, ça a été petit à petit au cours de mes études, plus parce que c'était un milieu dont on disait, et dont on dit toujours à l'heure actuelle, qu'il est complètement bouché, que c'est impossible d'y trouver du travail Au cours de mes études. donc au début je me disais : « Oh la la, est-ce que je vais oser me lancer dans ce monde là… ». Et puis finalement, maintenant, je suis rassurée !
Philippe Chauveau :
Je le disais en préambule. C'est votre huitième titre. Si vous deviez définir le fil rouge qui qui unit tous ces romans, qui sont souvent très différents puisque vous avez même fait une incursion dans l'univers du polar, du trhiller, que diriez-vous ? Car il y a quand même un fil rouge dans votre travail d'auteur.
Caroline Sers :
Il y a un fil rouge indéniable qui est la famille, et le clan de manière un peu plus large que la famille car dans le deuxième roman, c'était l'histoire d'un village qui fonctionnait de manière très clanique et très fermée sur lui-même. Et dans tous mes romans, je tourne autour de ces familles, de la transmission, de l'héritage. J'aime beaucoup cette thématique là parce que la famille, c'est vraiment le seul groupe dont on ne peut pas s'extraire. C'est quelque chose que l'on va traîner toute sa vie, en positif ou négatif.
Philippe Chauveau :
On revient sur l'envie de liberté dont vous parliez tout à l'heure ?
Caroline Sers :
Sans doute un peu mais je ne suis pas complètement négative sur la famille ! Mais c’est l'envie de liberté de manière plus générale. Il n'y a pas qu'il n'y a pas que ça mais c'est vrai que la famille, c'est le premier lieu d'enfermement, en tout cas dans certaines familles je ne veux pas non plus caricaturer et généraliser mais c'est quand même un lieu où l’on reçoit en héritage des idées, une tradition, et dont il faut apprendre à se sortir. A mon avis, il faut réussir à s’en libérer, pas forcément en s'échappant et en en refusant, mais au moins en étant conscient de tout ce qu'on nous impose. Cela permet d’acquérir une liberté d'esprit. De plus, je pense que, quelles que soient les relations avec les parents ou les grands-parents, c'est important de découvrir qui on est soi-même et pas de perpétuer uniquement quelque chose qu'on n'a reçu en héritage.
Philippe Chauveau :
Votre actualité Caroline serre les belles espérances. C'est votre huitième titre et vous êtes publié chez Buchet Chastel.
Caroline Sers
Les belles espérances
Livre 00'06'59"Philippe Chauveau :
Avec ce nouveau roman, « Les belles espérances », Caroline Sers, vous nous emmenez dans le Paris des années 60. Nous sommes précisément en mai 1968 dans un appartement cossu, c'est le moins que l'on puisse dire. Avec la famille Bouillard. Il y a Charlotte, la mère et les deux fils, Pierre et Fabrice, qui observent cette société qui est en train de changer. Nous allons suivre ces protagonistes sur 50 ans, jusqu'en 2018, avec les enfants avec les petits-enfants, l’oncle et la tante aussi, Geneviève et Serge, qui apparaissent à plusieurs moments du roman. Pourquoi cette envie de nous raconter une famille française sur cinquante ans ?
Caroline Sers :
En fait, j'avais plusieurs envie. J'avais envie de parler un petit peu de la France de mon enfance, de cette nostalgie qu'on peut avoir à regarder comment ça se passait avant, parce qu’évidemment c'était mieux avant, ça va sans dire… Est-ce que c'était réellement mieux ou pas ? Pour cela, rien de tel que d'avoir des personnages de générations différentes, qui vivent chacun une enfance dans des décennies différentes et qui peuvent donner des points de comparaison. J'avais envie aussi de voir comment la société justement avait évolué depuis depuis mai 68 dont on a dit que c'était la révolution avec l'évolution des mœurs etc…
Philippe Chauveau :
C'est quand même sous un angle très parisien que vous montrez la France puisque nous sommes avec une famille française, certes, mais une famille parisienne. Nous sommes dans les beaux quartiers avec la rue de Lille, le boulevard Saint-Germain, c'est le 7ème arrondissement, la rive gauche de Paris. Très vite, la mère de famille, Charlotte, va se retrouver veuve et va devoir élever ses deux grands garçons. Nous sommes dans un milieu industriel. Il y a eu une belle réussite professionnelle du père. Charlotte est une femme dure, sévère, autoritaire. Pourquoi en avoir fait, non pas un monstre, en tout cas une femme aussi difficile ?
Caroline Sers :
Charlotte est effectivement une personne élevée dans un beau quartier, héritière d'une tradition bourgeoise faite de de principes. Mais ce n'est pas uniquement ça. Parce que ça ne suffit pas à faire des personnes dures ou méchantes. Vraiment, c'est un personnage de roman qui a son histoire particulière. En fait, l'histoire de Charlotte, je l'ai racontée dans un précédent livre, « Les petits sacrifices ». Il lui est arrivé tout un tas de choses qui ont fait qu'elle est devenue cette personne-là. Elle cache ses souffrances et ses failles. Elle est complètement murée, elle s'est fabriqué une carapace parce qu’en fait, elle n'a pas suffisamment d'assurance, de force en elle, pour faire autrement. Au contraire de sa sœur Geneviève qui elle est une femme libre.
Philippe Chauveau :
Il y a ses deux garçons, Pierre et Fabrice. Ce sont finalement peut-être eux les deux personnages centraux du roman puisqu'on va les suivre en tant que jeune homme, puis e en tant que père et en tant que grand père. Pierre, c’est le bon fils, celui qui va rester proche de sa mère même s'il n'est pas toujours en accord avec elle. Et puis Fabrice, lui, qui va avoir envie d'ailleurs. C'est mai 68 alors on va partir élever des chèvres en Corrèze avec sa petite amie du moment, Valérie.
Puis, très vite, il y a les petits-enfants qui vont arriver. Vous avez choisi de nous emmener, pour suivre ces personnages, tous les cinq ans, voir comment ils évoluent, voir les enfants arriver et prendre leur place. Ces personnages vous ont-ils surpris à l'écriture ? Saviez-vous, dès le départ, où vous alliez les emmener où, finalement, sont-ce eux qui ont pris des chemins que vous ne soupçonniez pas ?
Caroline Sers :
Effectivement, ils m'ont surprise ! Je savais, au départ, que les deux frères allaient connaître des destinées différentes parce qu’il faut quand même un peu d'antagonisme pour créer de la tension dramatique. Je savais que Fabrice allait sortir dans la rue en mai 68, que ça allait l'influencer, que ça allait lui montrer autre chose que ça allait le sortir de sa classe en quelque sorte, si on veut utiliser ce type de vocabulaire, alors que Pierre lui allait rester dans le droit chemin entre guillemets. Mais je ne savais pas du tout après ce que ça allait donner.
Philippe Chauveau :
Ce sont peut-être les générations suivantes qui vous ont surprise ?
Caroline Sers :
Bien sûr ! Les enfants sont nés les uns après les autres, évidemment, et à chaque fois, en ajoutant un personnage, je me disais : « Ah tiens, alors lui, c'est l'aîné ou c'est le second. Qu'est-ce qu'il va devenir ? Qu'est ce qui va être différent dans son éducation ? Qu'est ce qui va. Comment est-ce qu'il va regarder son frère aîné ? ». et tous ces petits détails s'ajoutent. Effectivement, on dessine des personnages qu'on n'avait pas forcément envisagés au départ.
Philippe Chauveau :
Forcément, cette famille que l'on suit de 1968 à 2018 nous parle. Chacun pourra y retrouver des similitudes plus ou moins importantes avec sa propre histoire familiale. Sur l'image de la France que vous avez eu envie de donner, c'est parfois compliqué de raconter la France sur 50 ans. C’est comme défi ! Comment avez-vous travaillé ?
Caroline Sers :
En fait, j'ai choisi le biais romanesque. J'ai choisi de garder des détails, de garder de petits éléments d'atmosphère, d'ambiance, d'époque. Je n'ai pas voulu faire un roman historique avec de grandes descriptions épiques de la France plutôt faire sortir, mettre en exergue des éléments qui sont importants dans la vie des personnages et qui sont caractéristiques des époques successives.
Philippe Chauveau :
En tout cas voilà un roman très réussi Un roman qui nous parle de la famille et qui nous parle surtout d'une famille française. « Les belles espérances », votre nouveau roman est publié chez Buchet-Chastel. Merci beaucoup Caroline.