Valentine Goby

Valentine Goby

Kinderzimmer

Le livre 4'58

C'est votre huitième titre « Kinderzimmer », Valentine Goby. Dans ce livre, vous nous présentez Mila, que l'on va aussi appeler Suzanne,puisqu'on là découvre quand elle est une personne âgée.
Elle se balade de lycée en lycée pour raconter son histoire, elle va à la rencontre des jeunes. Elle a été déportée à Ravensbrück et puis un jour il y a une jeune élève qui lui pose une question « mais saviez-vous que vous alliez dans ce camp ?
Savez-vous où vous alliez ? » Et Mila va retracer le fil de cette douloureuse histoire. Pourquoi avoir eu envie une fois encore de nous entraîner dans cette période sombre de la seconde guerre mondiale et pourquoi ce camp de Ravensbrück ?
Il se trouve que Ravensbrück c'est un camp sans archive donc c'est un camp dont on ne sait rien. Il faut vraiment chercher. Un jour j'ai rencontré un homme qui avait 65 ans, c'était il y a deux ans et qui me dit : « je suis déporté politique ».
Réfugié politique, oui, on peut l'entendre, mais déporté politique il y avait quelque chose qui ne marchait pas. Et en fait, il était né dans un camp, qui était le camp de Ravensbrück, qui était en effet un camp de déportés politiques et un camp de travail majoritairement.
Evidemment ça m'a beaucoup intrigué. Je savais qu'il y avait des enfants dans les camps, je ne savais pas qu'il y avait eu des naissances. On a parlé et il m'a dit « je ne suis pas le seul en fait, on a été quelques uns quand même ».
Ce monsieur éclairait quelque chose qui me semblait inouï. Inouï au sens propre, j'avais moi jamais entendu parler de ça. Et en regardant sur internet, en cherchant des archives, je me rends compte qu'en effet il n'y a rien.
Et je recontacte cet homme et finalement je vais rencontrer les trois enfant qui sont sortis vivants de Ravensbrück, qui sont nés dans un endroit qui s'appelle la « Kinderzimmer ». Une sorte de pouponnière, une chambre des nourrissons dans laquelle on garde les bébés qui sont nés là.
Ce qui est fort dans votre roman, c'est qu'on est dans le camp quasiment de la première à la dernière page.
Vous nous faites partager le quotidien de ces femmes et le quotidien de Mila qui lorsqu'elle arrive à Ravensbrück ne sait pas qu'elle est enceinte puisqu'il s'agit d'une rencontre tout-à-fait fortuite avec un homme qu'elle a aimé.
Elle va découvrir qu'elle est enceinte et que faire de cet enfant ? C'est à la fois une source d'angoisse, mais aussi une source d'espoir pour toutes ces femmes qui sont réunies, qui vont l'accompagner dans son enfantement.
C'est d'abord une source d'angoisse. Il y a ces enfants qui vont venir au monde dans un lieu qui n'est pas du tout fait pour eux et qui néanmoins laisse penser que des gens on cru possible la vie ordinaire dans un lieu de barbarie
et puis il y a des femmes qui, quand elles arrivent au camp de Ravensbrück, n'ont aucune idée du lieu où elles se trouvent sur une carte. Elles ne savent pas qu'elles sont à Ravensbrück. Moi ce que je voulais, c'était qu'on revienne à cet endroit.
A cet endroit de on ne sait rien. Il y a une double ignorance. Ce sont des femmes très jeunes, elles ne savent pas de quoi est fait leur corps, elles ont aucune idée de la manière dont un corps étranger peut rentrer dans leur corps.
Elle ne savent pas ce que c'est qu'un utérus, des ovaires. Il faut imaginer l'effroi que ça suscite, ça n'est pas du tout une bonne nouvelle.
D'ailleurs c'est ce que vous écrivez : « Comment savoir si ce qui vient est un vrai enfant ou un produit de Ravensbrück ? »
C'est ça. Et en plus, il est possible que le réel joue un rôle dans ce qui se passe dans le ventre donc on ne sait pas ce qui va se passer.
Et comme dans la plupart de vos romans, de la souffrance, de la tragédie, naît aussi la lumière et l'espoir. Et c'est vrai qu'il y a les rencontres entre ces femmes.
Il y a malgré toutes les douleurs des moments très beaux de partage, de convivialité. Il y a aussi des rencontres de femmes qui sont là pour surveiller et qui vont quand même aider...
Oui. Il ne faut pas être manichéen, ni dans le bien, ni dans le mal...
Il y a les dernières pages qui sont pleine d'espoir aussi.
Oui, mais de toute façon c'est ça que je voulais dire. Moi je n'ai aucun intérêt, aucune envie d'ajouter des atrocités à celles qu'on connait déjà. Ce que je voulais, c'était de montrer comment peut naître l'espoir dans un lieu pareil.
C'est un pari en fait. Il y a une scène qui est centrale. C'est un pari. Il y a un moment où on disait le moment où le bébé semble plutôt une source de mort et tout-à-coup et tout-à-coup il devient une source de vie pour sa propre mère.
On se demande qui donne la vie à qui dans l'histoire. Et bien c'est un pari. C'est ce qui est extrêmement fort, le choix de regarder le érel dans ses scintillements. On ne regarde plus les ténèbres, ils sont bien là les ténèbres, mais c'est le scintillement.
Merci Valentine Goby. Ce roman est un vrai petit bijou. C'est effroyable bien sûr parce que l'histoire est effroyable, mais c'est un livre qui donne vraiment beaucoup d'espérance,
donc c'est un très beau roman. Merci. Valentine Goby, ça s'appelle « Kinderzimmer », c'est chez Actes Sud.

Philippe Chauveau :
C'est votre huitième titre « Kinderzimmer », Valentine Goby. Dans ce livre, vous nous présentez Mila, que l'on va aussi appeler Suzanne,puisqu'on là découvre quand elle est une personne âgée. Elle se balade de lycée en lycée pour raconter son histoire, elle va à la rencontre des jeunes. Elle a été déportée à Ravensbrück et puis un jour il y a une jeune élève qui lui pose une question « mais saviez-vous que vous alliez dans ce camp ? Savez-vous où vous alliez ? » Et Mila va retracer le fil de cette douloureuse histoire. Pourquoi avoir eu envie une fois encore de nous entraîner dans cette période sombre de la seconde guerre mondiale et pourquoi ce camp de Ravensbrück ?

Valentine Goby :
Il se trouve que Ravensbrück c'est un camp sans archive donc c'est un camp dont on ne sait rien. Il faut vraiment chercher. Un jour j'ai rencontré un homme qui avait 65 ans, c'était il y a deux ans et qui me dit : « je suis déporté politique ». Réfugié politique, oui, on peut l'entendre, mais déporté politique il y avait quelque chose qui ne marchait pas. Et en fait, il était né dans un camp, qui était le camp de Ravensbrück, qui était en effet un camp de déportés politiques et un camp de travail majoritairement. Evidemment ça m'a beaucoup intrigué. Je savais qu'il y avait des enfants dans les camps, je ne savais pas qu'il y avait eu des naissances. On a parlé et il m'a dit « je ne suis pas le seul en fait, on a été quelques uns quand même ». Ce monsieur éclairait quelque chose qui me semblait inouï. Inouï au sens propre, j'avais moi jamais entendu parler de ça. Et en regardant sur internet, en cherchant des archives, je me rends compte qu'en effet il n'y a rien. Et je recontacte cet homme et finalement je vais rencontrer les trois enfant qui sont sortis vivants de Ravensbrück, qui sont nés dans un endroit qui s'appelle la « Kinderzimmer ». Une sorte de pouponnière, une chambre des nourrissons dans laquelle on garde les bébés qui sont nés là.

Philippe Chauveau :
Ce qui est fort dans votre roman, c'est qu'on est dans le camp quasiment de la première à la dernière page. Vous nous faites partager le quotidien de ces femmes et le quotidien de Mila qui lorsqu'elle arrive à Ravensbrück ne sait pas qu'elle est enceinte puisqu'il s'agit d'une rencontre tout-à-fait fortuite avec un homme qu'elle a aimé. Elle va découvrir qu'elle est enceinte et que faire de cet enfant ? C'est à la fois une source d'angoisse, mais aussi une source d'espoir pour toutes ces femmes qui sont réunies, qui vont l'accompagner dans son enfantement.

Valentine Goby :
C'est d'abord une source d'angoisse. Il y a ces enfants qui vont venir au monde dans un lieu qui n'est pas du tout fait pour eux et qui néanmoins laisse penser que des gens on cru possible la vie ordinaire dans un lieu de barbarie et puis il y a des femmes qui, quand elles arrivent au camp de Ravensbrück, n'ont aucune idée du lieu où elles se trouvent sur une carte. Elles ne savent pas qu'elles sont à Ravensbrück. Moi ce que je voulais, c'était qu'on revienne à cet endroit. A cet endroit de on ne sait rien. Il y a une double ignorance. Ce sont des femmes très jeunes, elles ne savent pas de quoi est fait leur corps, elles ont aucune idée de la manière dont un corps étranger peut rentrer dans leur corps. Elle ne savent pas ce que c'est qu'un utérus, des ovaires. Il faut imaginer l'effroi que ça suscite, ça n'est pas du tout une bonne nouvelle.

Philippe Chauveau :
D'ailleurs c'est ce que vous écrivez : « Comment savoir si ce qui vient est un vrai enfant ou un produit de Ravensbrück ? »


Valentine Goby :
C'est ça. Et en plus, il est possible que le réel joue un rôle dans ce qui se passe dans le ventre donc on ne sait pas ce qui va se passer.

Philippe Chauveau :
Et comme dans la plupart de vos romans, de la souffrance, de la tragédie, naît aussi la lumière et l'espoir. Et c'est vrai qu'il y a les rencontres entre ces femmes. Il y a malgré toutes les douleurs des moments très beaux de partage, de convivialité. Il y a aussi des rencontres de femmes qui sont là pour surveiller et qui vont quand même aider...

Valentine Goby :
Oui. Il ne faut pas être manichéen, ni dans le bien, ni dans le mal...

Philippe Chauveau :
Il y a les dernières pages qui sont pleine d'espoir aussi.

Valentine Goby :
Oui, mais de toute façon c'est ça que je voulais dire. Moi je n'ai aucun intérêt, aucune envie d'ajouter des atrocités à celles qu'on connait déjà. Ce que je voulais, c'était de montrer comment peut naître l'espoir dans un lieu pareil. C'est un pari en fait. Il y a une scène qui est centrale. C'est un pari. Il y a un moment où on disait le moment où le bébé semble plutôt une source de mort et tout-à-coup et tout-à-coup il devient une source de vie pour sa propre mère. On se demande qui donne la vie à qui dans l'histoire. Et bien c'est un pari. C'est ce qui est extrêmement fort, le choix de regarder le érel dans ses scintillements. On ne regarde plus les ténèbres, ils sont bien là les ténèbres, mais c'est le scintillement.

Philippe Chauveau :
Merci Valentine Goby. Ce roman est un vrai petit bijou. C'est effroyable bien sûr parce que l'histoire est effroyable, mais c'est un livre qui donne vraiment beaucoup d'espérance, donc c'est un très beau roman. Merci. Valentine Goby, ça s'appelle « Kinderzimmer », c'est chez Actes Sud.

  • PRÉSENTATION
  • PORTRAIT
  • LE LIVRE
  • L'AVIS DU LIBRAIRE
  • Après des études à Sciences Po, Valentine Goby s'est installlé en Asiie où elle a notamment travaillé pour des associations humanitaires. De retour en France, c'est l'enseignement des lettres et du théâtre, métier qu'elle exerce pendant 8 ans avant de décider que finalement, sa vie, c'est l'écriture.Effectivement, Valentine Goby a toujours eu soif d'écrire, de partager, de raconter.En 2002, elle publie avec succès son 1er roman, « la note sensible » qui sera primé à plusieurs reprises. Alternant littérature adulte et...L'île haute de Valentine Goby - Présentation - Suite
    Philippe Chauveau :Bonjour Valentine Goby. Votre actualité « Kinderzimmer » chez Actes Sud. C'est déjà votre huitième roman qui prend place dans une très large bibliographie puisqu'il y a aussi tout le travail pour la jeunesse que vous faites notamment. Mais avant l'écriture, avant la littérature, avant d'être publiée, vous avez eu en quelque sorte une autre vie puisque vous avez beaucoup voyagé, vous êtes beaucoup allée en Asie.Valentine Goby :Je crois que j'ai eu plusieurs vies en fait.Philippe Chauveau :Vous avez eu...L'île haute de Valentine Goby - Portrait - Suite
    Philippe Chauveau :C'est votre huitième titre « Kinderzimmer », Valentine Goby. Dans ce livre, vous nous présentez Mila, que l'on va aussi appeler Suzanne,puisqu'on là découvre quand elle est une personne âgée. Elle se balade de lycée en lycée pour raconter son histoire, elle va à la rencontre des jeunes. Elle a été déportée à Ravensbrück et puis un jour il y a une jeune élève qui lui pose une question « mais saviez-vous que vous alliez dans ce camp ? Savez-vous où vous alliez ? » Et Mila va retracer le fil de...L'île haute de Valentine Goby - Le livre - Suite
    Philippe Lecomte Le Livre écarlate31, rue du Moulin Vert75014 ParisTél : 01 45 42 75 30« Kinderzimmer », de Valentine Goby. C'est un livre d'une émotion énorme. Ca aborde un sujet difficile que l'Histoire nous a donnée, que les événements nous ont donnés. Et Valentine Goby s'en est emparée avec un talent incroyable. Elle fait en sorte de nous donner à vivre, à lire, à connaître, à sentir au travers du mot, au travers des phrases, un événement qui est hors du commun.C'est magnifique, c'est très émouvant, c'est...L'île haute de Valentine Goby - L'avis du libraire - Suite