Notre invitée du jour est Clémentine Célarié. Si l’on connait bien la comédienne et l’actrice, c’est pourtant la romancière que nous accueillons et ce n’est pas un coup d’essai puisqu’avec « A la folie », elle signe son 5ème livre.Née au Sénégal, Clémentine Célarié a vécu les douze premières années de sa vie en Afrique, au gré des affectations professionnelles de son père, journaliste. De retour en France, après avoir suivi des cours de théâtre, joué avec la troupe du Splendid et participé à...
A la folie de Clémentine Célarié - Présentation - Suite
Phillipe :
Bonjour Clémentine Célarié
Clementine :
Bonjour Phillipe
Merci d'avoir accepté notre invitation. « À la folie », c'est votre actualité littéraire. Ce n'est pas la première fois qu'on voit en librairie, c'est dejà votre 5e livre, c'est même votre 2e roman, il y avait eu « On s'aimera » il y a 2- 3 ans maintenant, on va parler de ce nouveau livre « A la folie ». Avant de parler de la romancière, de l'auteure, revenons un petit peu sur la comédienne, sur l'actrice, même si finalement j'ai...
A la folie de Clémentine Célarié - Le portrait - Suite
C'est un nouveau roman que vous nous proposez Clémentine Célarié, « À la folie » au Cherche-midi. On va faire connaissance avec Margueritte, elle est comédienne, elle est un peu paumée, elle anime aussi une émission de télé-réalité qui s'appelle « Ce que nous sommes » et il y a un moment où elle pète un peu les plombs parce qu'elle n'en peut plus. Elle va partir un soir sur les bords de Seine, elle va faire une rencontre avec un homme sympa comme tout, pas tout à fait dans la norme, on en revient toujours à la...
A la folie de Clémentine Célarié - Le livre - Suite
Clémentine Célarié
A la folie
Présentation 3'17Notre invitée du jour est Clémentine Célarié. Si l’on connait bien la comédienne et l’actrice, c’est pourtant la romancière que nous accueillons et ce n’est pas un coup d’essai puisqu’avec « A la folie », elle signe son 5ème livre.
Née au Sénégal, Clémentine Célarié a vécu les douze premières années de sa vie en Afrique, au gré des affectations professionnelles de son père, journaliste. De retour en France, après avoir suivi des cours de théâtre, joué avec la troupe du Splendid et participé à l’aventure des radios libres, elle se fait connaître du grand public au cinéma par des rôles comiques comme dans « La vengeance du serpent à plumes » ou des compositions dramatiques, notamment dans « 37,2° le matin » pour lequel elle est nommée aux Césars. Sur scène aussi, son nom prend de la valeur et on la retrouve aussi bien pour des créations contemporaines que pour jouer des classiques tels Paul Claudel ou Goldoni. En 2002, elle est nommée aux Molière pour son interprétation de « Madame sans-gêne ».
Mais l’écrivain dans tout ça. Si ses premiers livres sont inspirés de sa vie, de ses rencontres, de son travail de comédienne, Clémentine Célarié s’adonne à l’écriture romanesque en 2015 avec un titre remarqué « On s’aimera », huis-clos familial sur la difficulté de communiquer simplement dans notre époque sur-connectée.
Effectivement, si la comédienne sait faire rire ou pleurer, elle est aussi une femme engagée, impliquée, très attentive à notre monde et sans juger, elle n’hésite pas à pointer le doigt sur ce qui fait mal. La maladie et le handicap font partie de ses combats, elle l’a prouvé récemment avec la pièce « Darius » où le personnage principal est victime d’une maladie dégénérative. On la voit aussi régulièrement dans la série télé « Vestiaires » sur France 2 où elle donne la réplique à des comédiens handicapés. Car Clémentine Célarié n’hésite pas à mettre son talent au service de causes qui lui semblent justes.
Avec son nouveau titre « A la folie », Clémentine Celarié nous raconte Marguerite, un comédienne un peu paumée qui, un soir de blues, croise le chemin d’un homme pas comme les autres. Il est différent, pas tout seul dans tête, et entraine la jeune femme dans le centre où il vit, entouré d’êtres dits anormaux. Là dans cet univers parallèle, où chaque pensionnaire vit dans son propre monde, en découvrant les personnalités étonnantes et les trésors inattendus de ces femmes et de ces hommes que la société cache, Marguerite va renaître et donner un nouveau sens à sa vie. Une écriture d’une grande sensibilité et d’une fantaisie contagieuse pour traiter d’un sujet difficile. Clémentine Célarié laisse courir sa plume pour nous offrir des portraits attachants et nous inviter à la réflexion sur la différence, le regard aux autres, les travers de notre société dans ce qu’on appelle la normalité. On ressort de ce livre bouleversé et enthousiasmé.
« A la folie » de Clémentine Célarié est publié au Cherche-midi
Clémentine Célarié
A la folie
Le portrait 7'44Phillipe :
Bonjour Clémentine Célarié
Clementine :
Bonjour Phillipe
Merci d'avoir accepté notre invitation. « À la folie », c'est votre actualité littéraire. Ce n'est pas la première fois qu'on voit en librairie, c'est dejà votre 5e livre, c'est même votre 2e roman, il y avait eu « On s'aimera » il y a 2- 3 ans maintenant, on va parler de ce nouveau livre « A la folie ». Avant de parler de la romancière, de l'auteure, revenons un petit peu sur la comédienne, sur l'actrice, même si finalement j'ai l'impression que tout cela est un petit peu lié. Et revenons même encore un peu plus loin : de votre jeunesse, de votre enfance passée dans différents pays d'Afrique, quelles images gardez vous et comment cela a-t-il pu infulencé votre avenir professionnel par la suite ?
Clémentine :
J'ai des images de couleurs, de beaucoup de couleurs, de mer, de chaleur, d'amour de mes parents et aussi de baby-sitters, de gens qui nous gardaient qui étaient africains. Alors pas du tout une vie de colons qui vivent entre blanc, pas du tout. Mes parents, mon père était vraiment un amoureux de l'Afrique -votre père était journaliste sur place-, papa était journaliste, absolument. Il nous élevait dans le respect, et l'admiration même, de l'Afrique, des africains – l'envie de découvrir les cultures – Absolument, on était comme tout le monde. Je pense aux marchés, aux couleurs, la mer, la chaleur évidemment, mais la chaleur du cœur, pas que la chaleur ambiante.
Philippe :
Vous passez vos 12-13 premières années en Afrique, est ce qu'il y avait déjà la présence de la littérature, en tout cas de la lecture dans votre vie ?
Clémentine :
Ah non moi je ne voulais pas lire du tout ça m'emmerdait comme beaucoup de jeunes gens. Je ne lisais pas.
Philippe :
Et vos parents ne vous incitaient pas à lire quand vous étiez petite ?
Clémentine :
Quand j'étais petite, maman me lisait des histoires, elle m'a lu : « petit prince, pierre et le loup, jean de la lune », des trucs qui m'ont marqué à vie.
Philippe :
Des comptes (?)
Clémentine :
Des comptes, des histoires merveilleuses, et ça, ça forge, c'est très important de lire. Moi j'ai lu beaucoup à mes enfants petits, j'adorais ça.. Pour moi c'était super important, et je pense que C'EST absolument important l'amour qu'on peut donner à vos enfants.
Philippe :
Et ca veut dire que lorsqu e vous pensez aux comptes que vous racontait votre mère, c'est plus ce sentiment de relation d'amour maternel qui revient plus que le fait de raconter des histoires ?
Clémentine :
Oui, vous ne l'identifiez pas mais c'est une transmission qui est super importante, et puis, il n'y a que l'amour qui nous construit quand on est petit. Alors après, par rapport aux livres, il y a une transmission d'histoire de merveilleux et c'est ce merveilleux que j'aime, que j'ai gardé. Après, lire des romans qu'on nous fait lire, genre Maupassant, que après j'ai adoré, pour moi c'est comme un frère, c'est comme si je l'avais rencontré, je me sens connecté à lui, completement, il a une émotion, un truc incroyable.
Philippe :
Si je vous entend bien Clémentine, c'est finalement après quand vous êtes devenue jeunes adulte quand vous aviez fait vos premiers pas au cinéma et au théatre que vous découvrez la littérature, que vous découvrez le plaisir de vous perdre dans un livre ?
Clémentine :
Même pas, je lisais pas parce que j'avais envie d'écrire donc j'écrivais. Et je n'avais encore pas découvert Maupassant, je lisais des pièces qu'on me proposait... j'étais tardive. J'avais pas le sens de ça.. Enfin.. Je dis des conneries un peu... Si, si, vers 15-16 ans j'ai lu des romans qui m'ont.. j'avais l'impression d'être comprise par l'auteur : Sallinger « L'attrape Coeurs », ensuite j'ai lu « C'est idiot de mourrir » de Mario Puzo, enfin des trucs complètement romanesque. Je suis dans le romanesque, le reste ça m'emmerde, j'ai besoin de trucs qui sont supers émouvants et impossibles, sinon c'est pas drôle...
Philippe :
Après, dans votre vie de comédienne vous vous confrontez à Claudel, à Goldoni, ou à Victorien Sardou, vous découvez aussi ce qu'est l'écriture théâtrale, ça vous fait quelle impression ?
Clémentine :
Quand je lis un texte de cinéma, de théâtre ou de télévision : un texte à jouer ; et bien c'est different parce que là je me projette tout de suite, j'imagine le personnage que je vais incarner et j'ai du mal parce que je met trop d'émotion. Il faut lire en ayant un peu plus de recul, chose que j'ai beaucoup de mal à avoir.
Philippe :
Et alors la romancière dans tout ca ? Pourquoi ce besoin d'écrire ?
Clémentine :
Ça m'a pris très vite, j'écris mon rêve, c'est pour ça que j'écris. J'ai un projet de vie, d'expression en tout cas. J'en ai un. Je dis ça en toute humilité. Je ne suis pas romancière, mon but c'est pas de faire un succès, mon but c'est de faire quelque chose qui correspond à un projet, comme je vois le monde si vous voulez.
Philippe :
Vous aimez aussi mettre dans votre travail, que ce soit sur scène ou au cinéma ou dans vos romans, des sujets qui vous tiennent à cœur. Je pense spontanemment lorsque vous participez à la série télévisée Vestiaires, lorsque, sur scène, vous montez Darius avec ce héros qui est atteint d'une maladie dégénérative. Là dans « A la folie » on parle aussi du handicap, de ceux qui ne sont pas tout à fait dans la norme. C'est important pour vous de mettre le doigt là ou ça fait mal, et de dire : j'ai parler de ça ?
Clémentine :
Moi je mets le doigt sur le truc qui fait de la lumière. Parce que je me rend compte que la lumière elle est là, elle est dans la différence ! Elle est dans des gens qui vivent dans des conditions atroces, ils doivent se dépasser tout le temps, ils doivent dépasser leur maleur. Et ducoup ils sont absoluments exceptionnels. Ce sont eux qui sont exceptionnels, on devrait se pencher, aller s'interesser à eux. Parce que eux, avec la lumière qu'ils doivent créer tout le temps, ils nous en apporteraient drôlement de la lumière.
Philippe :
Si je vous pousse dans ces retranchements c'est parce que, vous le savez, ce sont des sujets que l'on aborde assez peu, même en littérature. Et justement c'est un petit peu ce qui fait votre particularité, c'est de vous emparer de ces sujets là pour dire aux lecteurs « interessez vous »
Clémentine :
C'est tout à fait égoiste en fait, parce que moi quand je suis avec ces potes de vestiaire, que je tourne avec eux, il y a une espèce de réjouissance et de reconnaissance. Moi ca me rend plus heureuse de voir des gens qui sont étranges. On est là, on a un rapport immédiat, il y a une urgence. C'est cette urgence qui me manque avec les êtres « valides » et plus « classiques » pour ne pas di re « normaux ».
Philippe :
Si je revient à nos premiers echanges, lorsque l'on parlait de l'Afrique et de ces comptes que vous racontait votre maman, vous parliez du partage, du souvenir du partage de ces moments là ; c'est un petit peu le même rôle que vous jouez aujourd'hui avec les livres que vous offrez aux lecteurs ? C'est le partage que vous cherchez à offrir ?
Clémentine :
Oh oui, c'est un besoin de raconter une histoire parce que je veux qu'elle existe, j'imagine la faire un jour en film, mais je suis obligée de passer par le roman parce que je suis libre, c'est la liberté. Aujourd'hui l'écriture c'est le seul domaine, pour moi, de liberté absolue.
Philippe :
C'est votre actualité Clémentine Célarié, ça s'appelle « À la folie », c'est au Cherche-midi.
Clémentine Célarié
A la folie
Le livre 6'25C'est un nouveau roman que vous nous proposez Clémentine Célarié, « À la folie » au Cherche-midi. On va faire connaissance avec Margueritte, elle est comédienne, elle est un peu paumée, elle anime aussi une émission de télé-réalité qui s'appelle « Ce que nous sommes » et il y a un moment où elle pète un peu les plombs parce qu'elle n'en peut plus. Elle va partir un soir sur les bords de Seine, elle va faire une rencontre avec un homme sympa comme tout, pas tout à fait dans la norme, on en revient toujours à la norme... Il n'est pas tout seul dans sa tête dirions nous gentillement, il s'appelle Raoul, et Raoul va l'amener dans son univers à lui. Une première question qui concerne Margueritte, pourquoi avoir fait de votre héroine une comédienne, une actrice, une femme de télévision ?
Clémentine :
Je voulais la mettre dans les pires conditions, dans les pires circonstances d'une comédienne qui souffre beaucoup de cette période difficile où les projets se font moins, les films se font moins, les projets de théâtre... Et elle, elle est bloquée parce qu'elle a beaucoup de dettes, elle a les uissiers aux fesses, ses enfants sont loin, elle a des histoires d'amour un peu complexe, elle ne sent pas d'attaches. Elle ne voit plus pourquoi elle vivrait. Le déclencheur c'est qu'elle apprend la mort d'un ami à elle, et là elle fout le camp, elle part, elle laisse tout. Elle jette sa saloprie de smartphone. Et là, elle rencontre un gars, et ce gars il est bizarre, elle pense qu'il est bourré, il est déguisé en père noël.. Et ce gars, en fait il n'est pas bourré. Il titube parce qu'il a un handicap physique, et il croit qu'elle va se jeter dans l'eau, il fait très froid, c'est l'hiver. Et donc il la sauve. Je voulais raconter l'histoire de quelqu'un de « normal », en tout cas de « normé », Margueritte, qui est sauvée par quelqu'un qui est considéré comme anormal. C'est quelqu'un qui est rejeté qui lui tend le bras et qui la sort de cette gadoue dans laquelle elle se laisse perdre.
Philippe :
Il va y avoir une soirée mémorable au Queen qu'ils vont vivre tout les deux, et puis ensuite Raoul va emmener Margueritte dans le centre où vit, dirigé par Adama, qui lui même est handicapé moteur. Et là Margeritte va faire connaissance avec tous les membres de cette communauté, ils ont tous leurs problèmes à eux, mais finalement ils sont biens dans leur univers, dans leur monde à eux.
Clémentine :
Ils sont mis en dehors, comme beaucoup de gens différents, ils sont mis de côté, complètement. Et ça va plus ou moins, on va dire qu'on les laisse un peu à leur propre compte, ils sont un petit peu à l'abandon quand même, ils n'ont pas assez d'éducateurs dans ce centre, et ils sont souvents sous médicaments. Quand Margueritte voit cet endroit, elle se dit que c'est un lieu de rêve car elle a l'impression qu'il y a une liberté totale.
Philippe :
Elle est touchée par leur liberté et leur folie
Clémentine :
C'est ça, elle voit de la poésie. Ils se bagarrent, il y a beaucoup de violence. Mais elle voit qu'ils jouent comme des enfants, et ça ça lui plait, elle voit un tas d'expressions libres qu'il n'y a plus du tout ici. Ils font les pitres, ils font les clowns, pour elle, ils font du théâtre ; et c'est ce qui lui donne l'idée de monter un atelier de théâtre. Alors ils vont faire du théâtre, parce que c'est à travers la créativité qu'ils renaissent et qu'on redécouvre leurs trésors intérieurs. Je pense qu'il y a des trésors chez tout le monde. Elle, elle voit chez eux des enfants. Elle cherche ça justement : cette enfance, cette innocence.
Philippe :
Alors justement ce qui est interessant c'est que plus on avance dans le roman, bien sûr vous nous invitez à réfléchir sur ce qu'est la normalité, très vite on se rend compte que ceux qui sont hors de ce centre sont aussi enfermés dans une sorte de vie qui de leur ressemble pas, qui ne leur plait pas, je pense à toutes ces femmes que l'on va rencontrer au pressebytère chez monsieur le curé. Il y a plein de personnages en parallèle qui sont peut être encore moins dans ce qu'on pourrait appeler la normalité, elles sont en pleines souffrance.
Clémentine :
Oui, elles sont en souffrance. Je pense qu'il y a beaucoup de gens en souffrance. On est tous en souffrance un peu...
Philippe :
On va évoquer aussi votre écriture, parce que vous parlez de l'urgence. Elle se ressent cette urgence dans votre écriture, le livre est très rythmé, il y a beaucoup d'action, la vie de Margueritte est completement chamboulée par la rencontre de ces personnes. Et puis il y a beaucoup d'humour dans les échanges, dans les contacts entre ces différentes personnes, et puis vous parlez de la lumière. C'est vrai que ce livre est très lumineux, c'est du bonheur à chaque page.
Clémentine :
Merci, c'est gentil de me dire ça. Mais oui, c'est du bonheur qu'elle reçoit, elle ne reçoit que de la lumière, elle tombe dans une espece de monde paralel de gens qu'on rejète un peu alors qu'ils sont géniaux. C'est souvent chez êtres qui ont vécu des choses très difficile qu'on voit la lumière. Il y a un provèrbe qui dit « il faut bien être fêlé pour voir passer la lumière ».
Philippe :
Merci pour votre sinécrité, merci pour votre écriture. Voilà un livre qui vous chamboule, mais un livre très lumineux. Un très beau roman que je vous recommande vivement. Ça s'appelle « À la folie » c'est l'actualité de Clémentine Célarié au Cherche-Midi.