Gilbert Sinoué a eu deux vies : né au Caire en 1947, il arrive à Paris à l'âge de dix-neuf ans et s'inscrit à l'école normale de musique où il apprend la guitare. Rapidement il compose ses propres chansons et se produit dans les cabarets du Paris de la nuit. Isabelle Aubret le découvre, dés lors de nombreux artistes des années 70 le prennent comme parolier. Claude François, Sheila, Nicole Croisille ou encore Marie Laforêt et Dalida. Mais à l'approche de la quarantaine, Gilbert Sinoué décide de changer de vie et tourne la...
Erevan de Gilbert Sinoué - Présentation - Suite
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Bonjour Gilbert Sinoué. Merci d'être avec nous sur Web Tv Culture, « Erevan » chez Flammarion, votre nouveau roman, on y revient dans un instant, mais intéressons nous à votre parcours. Vous êtes né en Égypte, au Caire et votre enfance en Égypte vous marque toujours aujourd'hui.
Gilbert Sinoué (Erevan) : écoutez, je crois que l'on est toujours plus ou moins attaché à son enfance mais moi tout particulièrement parce que j'ai le regret de dire que j'ai eu une enfance très heureuse, dans...
Erevan de Gilbert Sinoué - Portrait - Suite
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Gilbert Sinoué, nous sommes ensemble sur Web Tv Culture. « Erevan », c'est votre nouveau roman aux éditions Flammarion. « Erevan » nous emmène au début du 20e siècle, les années 1896-1915, c'est le génocide arménien. Vous êtes égyptien, alors pourquoi un livre sur l'Arménie ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Parce qu'il y a des thèmes qui viennent à vous et auxquels on ne peut pas résister. Il y a des romans que l'on va chercher et d'autres qui viennent à vous et celui là en fait parti...
Erevan de Gilbert Sinoué - Le livre - Suite
Madame Maral Balian
Librairie Virgin Megastore Barbès
15, boulevard Barbès
75018 Paris
01 56 55 53 70
Gilbert Sinoué, ce n'est pas un nouveau venu, c'est un auteur qui écrit depuis la fin des années 80. C'est un auteur qui s'est spécialisé dans les sujets historiques en les romançant mais de manière très documentée, très sérieuse. Son dernier roman traite du génocide arménien, c'est une histoire qui existe dans chaque famille arménienne. Moi-même je suis de la 3e génération d'après le génocide. J'ai lu ce roman...
Erevan de Gilbert Sinoué - L'avis du libraire - Suite
Gilbert Sinoué
Erevan
Présentation 1'36Gilbert Sinoué
Erevan
Portrait 4'14Gilbert Sinoué (Erevan) : écoutez, je crois que l'on est toujours plus ou moins attaché à son enfance mais moi tout particulièrement parce que j'ai le regret de dire que j'ai eu une enfance très heureuse, dans un pays que j'ai adoré. En plus mon père à eu la chance de racheter un yacht qui avait appartenu au roi Farouk... enfin un yacht c'est un Mississippi Boat, un bateau fluvial. Et donc j'ai passé le plus clair de mon temps sur ce bateau et j'ai même eu la chance de remonter le Nil, alors que j'avais quatorze ans, en tenant la barre de ce bateau et ça a été des souvenirs marquants.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Et sur ce bateau un soir, il y a Jacques Brel qui vient chanter. C'est ça qui vous donne envie de monter à Paris, apprendre la guitare et la musique.
Gilbert Sinoué (Erevan) : C'est en écoutant Brel, en écoutant ses textes je me suis dit :« je serais écrivain ». C'est très bizarre j'avais quinze ans et d'écouter ses histoires, parce que ce sont des minis romans, avec un début, un milieu, une fin et crescendo. C'est lui qui m'a vraiment donné envie d'écrire.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : A dix-neuf ans, vous arrivez à Paris, donc l'école normale de musique, très vite on vous retrouve dans les cabarets, vous chantez vos propres chansons aussi.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Oui parce que pour moi l'écriture de chanson ça rejoignait un peu l'idée de faire des romans très concis de trois minutes.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Isabelle Aubret, Marie Laforêt... on peut en citer beaucoup d'autres. Il y a eu Jean-Claude Pascal également, Claude François. Vous gardez quels souvenirs de cette époque où vous étiez parolier ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Un mélange de grand bonheur et de frustration. Grand bonheur ça s'explique, c'est très simple, le fait de s'entendre chanter par un interprète connu vous flatte, flatte votre ego et c'est magnifique. En revanche, frustration parce que quand on écrit des chansons c'est vraiment comme faire des vêtements sur mesure. Et vous ne pouvez pas écrire vraiment ce que vous avez envie d'écrire. Quand vous écrivez pour Claude François vous devez faire du Claude François, quand vous écrivez du Isabelle Aubret, du Dalida ou du Jean Marie, puisque le dernier texte que ce que j'écris été pour Jean Marie que j'admirais infiniment, c'est pas la même chose.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Vers l'âge de quarante ans donc, vous décidez de tourner la page de la chanson et de vous lancer dans l'écriture justement. Pour combler cette frustration ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Pas pour combler cette frustration, pour concrétiser le rêve que j'avais quand j'avais quatorze ans. Et que j'avais toujours repoussé par peur, par trouille d'écrire. Et en approchant de la quarantaine, je me suis dit que le moment été venu.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Vous êtes un romancier qui s'appuie toujours sur des faits historiques, sur des personnages historiques.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Pourquoi ? Je pense que c'est d'abord les personnages hors du commun qui m'intéressent. Le présent m'ennuie beaucoup et donc je vais chercher dans le passé des événements étonnants, extraordinaires et donc des personnages hors normes. C'est pour ça que je fais du roman dans l'histoire. Je crois que c'est le mélange d'oriental et d'occidental qui fait peut-être l'esprit de mes livres.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Parfois dans vos romans, on sent aussi que vous êtes un homme engagé, on y reviendra avec « Erevan ». Mais il y a aussi, par exemple, le livre que vous avez dédié à votre fils, où là on sent que pour vous l'écologie, la nature, c'est quelque chose d'important et vous jetez un regard un petit peu désolé sur la planète.
Gilbert Sinoué (Erevan) : L'écologie, je ne savais pas ce que c'était enfin en tout cas je ne m'y intéressais absolument pas jusqu'à il y a une douzaine d'année...treize ans. Il se fait que je suis un père tardif et où mon fils à l'époque avait trois ans, à l'époque de l'Erika, lorsque l'Erika nous a fait ce merveilleux cadeau. J'étais assis devant mon poste de télé le soir, je n'arrivais pas à dormir et il y avait ces images d'oiseaux agonisant et j'avoue que tout à coup j'ai pensé à mon fils, je me suis dit : « Mais qu'est ce qu'on leur laisse ? » Et je n'ai pas pu m'empêcher de commencer à écrire le soir même ce livre qui est effectivement un pamphlet, un grand cri de colère surtout.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Gilbert Sinoué merci beaucoup. « Erevan », votre nouveau roman, c'est chez Flammarion.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Merci.
Gilbert Sinoué (Erevan) : écoutez, je crois que l'on est toujours plus ou moins attaché à son enfance mais moi tout particulièrement parce que j'ai le regret de dire que j'ai eu une enfance très heureuse, dans un pays que j'ai adoré. En plus mon père à eu la chance de racheter un yacht qui avait appartenu au roi Farouk... enfin un yacht c'est un Mississippi Boat, un bateau fluvial. Et donc j'ai passé le plus clair de mon temps sur ce bateau et j'ai même eu la chance de remonter le Nil, alors que j'avais quatorze ans, en tenant la barre de ce bateau et ça a été des souvenirs marquants.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Et sur ce bateau un soir, il y a Jacques Brel qui vient chanter. C'est ça qui vous donne envie de monter à Paris, apprendre la guitare et la musique.
Gilbert Sinoué (Erevan) : C'est en écoutant Brel, en écoutant ses textes je me suis dit :« je serais écrivain ». C'est très bizarre j'avais quinze ans et d'écouter ses histoires, parce que ce sont des minis romans, avec un début, un milieu, une fin et crescendo. C'est lui qui m'a vraiment donné envie d'écrire.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : A dix-neuf ans, vous arrivez à Paris, donc l'école normale de musique, très vite on vous retrouve dans les cabarets, vous chantez vos propres chansons aussi.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Oui parce que pour moi l'écriture de chanson ça rejoignait un peu l'idée de faire des romans très concis de trois minutes.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Isabelle Aubret, Marie Laforêt... on peut en citer beaucoup d'autres. Il y a eu Jean-Claude Pascal également, Claude François. Vous gardez quels souvenirs de cette époque où vous étiez parolier ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Un mélange de grand bonheur et de frustration. Grand bonheur ça s'explique, c'est très simple, le fait de s'entendre chanter par un interprète connu vous flatte, flatte votre ego et c'est magnifique. En revanche, frustration parce que quand on écrit des chansons c'est vraiment comme faire des vêtements sur mesure. Et vous ne pouvez pas écrire vraiment ce que vous avez envie d'écrire. Quand vous écrivez pour Claude François vous devez faire du Claude François, quand vous écrivez du Isabelle Aubret, du Dalida ou du Jean Marie, puisque le dernier texte que ce que j'écris été pour Jean Marie que j'admirais infiniment, c'est pas la même chose.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Vers l'âge de quarante ans donc, vous décidez de tourner la page de la chanson et de vous lancer dans l'écriture justement. Pour combler cette frustration ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Pas pour combler cette frustration, pour concrétiser le rêve que j'avais quand j'avais quatorze ans. Et que j'avais toujours repoussé par peur, par trouille d'écrire. Et en approchant de la quarantaine, je me suis dit que le moment été venu.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Vous êtes un romancier qui s'appuie toujours sur des faits historiques, sur des personnages historiques.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Pourquoi ? Je pense que c'est d'abord les personnages hors du commun qui m'intéressent. Le présent m'ennuie beaucoup et donc je vais chercher dans le passé des événements étonnants, extraordinaires et donc des personnages hors normes. C'est pour ça que je fais du roman dans l'histoire. Je crois que c'est le mélange d'oriental et d'occidental qui fait peut-être l'esprit de mes livres.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Parfois dans vos romans, on sent aussi que vous êtes un homme engagé, on y reviendra avec « Erevan ». Mais il y a aussi, par exemple, le livre que vous avez dédié à votre fils, où là on sent que pour vous l'écologie, la nature, c'est quelque chose d'important et vous jetez un regard un petit peu désolé sur la planète.
Gilbert Sinoué (Erevan) : L'écologie, je ne savais pas ce que c'était enfin en tout cas je ne m'y intéressais absolument pas jusqu'à il y a une douzaine d'année...treize ans. Il se fait que je suis un père tardif et où mon fils à l'époque avait trois ans, à l'époque de l'Erika, lorsque l'Erika nous a fait ce merveilleux cadeau. J'étais assis devant mon poste de télé le soir, je n'arrivais pas à dormir et il y avait ces images d'oiseaux agonisant et j'avoue que tout à coup j'ai pensé à mon fils, je me suis dit : « Mais qu'est ce qu'on leur laisse ? » Et je n'ai pas pu m'empêcher de commencer à écrire le soir même ce livre qui est effectivement un pamphlet, un grand cri de colère surtout.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Gilbert Sinoué merci beaucoup. « Erevan », votre nouveau roman, c'est chez Flammarion.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Merci.
Gilbert Sinoué
Erevan
Le livre 4'39Gilbert Sinoué (Erevan) : Parce qu'il y a des thèmes qui viennent à vous et auxquels on ne peut pas résister. Il y a des romans que l'on va chercher et d'autres qui viennent à vous et celui là en fait parti de ces romans qui vous appellent. J'ai connu la communauté arménienne au Caire quand j'ai grandi là-bas, j'ai écouté la voix de leur père, de leur grand père, j'ai écouté les récits des rescapés, des survivants et ça m'a longtemps travaillé. Et quand il a été question de l'adhésion de la Turquie au marché commun, là j'avoue que je n'ai pas pu résister à l'envie d'écrire ce livre. Ça m'a paru indispensable.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Peut-on rappeler brièvement la genèse de ce drame, de ce génocide arménien ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : 1915, c'est l'époque où la Turquie n'est plus l'Empire Ottoman. C'est un empire qui s'est déconstruit, qui est l'homme malade de l'Europe. Et là va se développer en Turquie, sous la tutelle de ce que l'on appelle les jeunes-turques, ce que moi je surnomme une crise de paranoïa aigue, ils sont convaincus que cette minorité chrétienne, les arméniens en l'occurrence, vont à un moment donné se retourner contre eux. Quand en 1915 la Guerre Mondiale éclate, leur paranoïa est absolument acquise à ce moment-là et ils sont décidés à éradiquer ces chrétiens pour ne pas que, pensent-ils, ils les poignardent dans le dos.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Pourquoi ça a dégénéré, ce sont les politiques finalement ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Non non, ça a dégénéré parce que l'Empire l'Ottoman a dégénéré. Cet empire avant était peuplé d'un tiers de chrétiens. Et donc finalement, quand l'empire s'écroule les turcs désirent l'unifier, il y a une poussée nationaliste et tout ce qui n'est pas musulman, turc les gênent et leur posent problème. Hors les arméniens vivent là depuis 2000 ans, il y a eu l'Arménie, l'Arménie était un pays qui allait de la mer caspienne à la méditerranée. Donc à un moment donné, il y a cette espèce défoulement et de peur, panique des trucs.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Votre roman commence donc en 1896 et l'on suit une famille d'arméniens ; les Tomassian et plus spécifiquement deux enfants. C'était important de faire vivre cette histoire, ce génocide au travers de deux enfants ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Oui parce que je crois qu'il n'y a rien de plus terrifiant que l'injustice faite aux enfants. J'ai voulu effectivement prendre comme symbole ces enfants parce que je crois que c'est peut-être la meilleure manière de faire passer une émotion. Donc les enfants sont importants, le roman est important, je crois que c'est comme ça qu'on fait passer les messages.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Vous vous appuyez sur des faits historiques, il y a eu beaucoup de recherche, j'imagine, pour être au plus près de ce qui s'est réellement passé.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Les documents sont là, les témoignages sont là, les récits sont là. Et de voir que la Turquie continue aujourd'hui à nier ce qui s'est passé est affligeant parce que l'on a tous les documents. Bien sûr on n'a pas de sépultures et c'est ce qu'il y a de plus terrifiant dans cette affaire, c'est qu'il y a un million et demi de morts sans sépultures. Mais les récits des consuls, des ambassadeurs qui ont vécu en Turquie, à cette époque-là, démissionnèrent, qui ont vécu aussi en Anatolie en Cilicie tout est là.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Certaines scènes sont très dures, certaines descriptions sont parfois même insoutenables, mais en même temps c'était indispensable de le faire ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : C'est ça qui est le plus terrifiant, c'est que je n'ai rien inventé. Il m'a suffi de lire les récits des survivants, d'écouter...parce qu'il y a des arméniens qui vivent encore, Dieu merci, et qui vivent en France, il y a une communauté très importante. Vous parlez à ces familles et vous découvrez que chacune d'entre elles à son histoire, chacune d'entre elles a eu un père ou un grand père, une grand-mère qui a souffert ou qui a disparu. Moi ce que je souhaite c'est que ce livre soit lu non pas par la communauté arménienne qui connaît son histoire mais partout, par la plus grande majorité de lecteurs qui ne savent rien de ce qui s'est passé. Par les turques aussi, je souhaite que ce livre soit traduit en Turquie et qu'aujourd'hui la nouvelle génération fasse table rase de cette période.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Ce livre c'est votre façon à vous peut-être d'aider la communauté arménienne à faire reconnaître ce pan de son histoire.
Gilbert Sinoué (Erevan) : C'est prétentieux, mais si ça pouvait être une pierre de plus posé sur l'édifice je serais ravi.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Raison de plus donc pour inviter les lecteurs à découvrir ce très beau roman. « Erevan », Gilbert Sinoué, c'est aux éditions Flammarion. Merci beaucoup.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Merci.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Parce qu'il y a des thèmes qui viennent à vous et auxquels on ne peut pas résister. Il y a des romans que l'on va chercher et d'autres qui viennent à vous et celui là en fait parti de ces romans qui vous appellent. J'ai connu la communauté arménienne au Caire quand j'ai grandi là-bas, j'ai écouté la voix de leur père, de leur grand père, j'ai écouté les récits des rescapés, des survivants et ça m'a longtemps travaillé. Et quand il a été question de l'adhésion de la Turquie au marché commun, là j'avoue que je n'ai pas pu résister à l'envie d'écrire ce livre. Ça m'a paru indispensable.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Peut-on rappeler brièvement la genèse de ce drame, de ce génocide arménien ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : 1915, c'est l'époque où la Turquie n'est plus l'Empire Ottoman. C'est un empire qui s'est déconstruit, qui est l'homme malade de l'Europe. Et là va se développer en Turquie, sous la tutelle de ce que l'on appelle les jeunes-turques, ce que moi je surnomme une crise de paranoïa aigue, ils sont convaincus que cette minorité chrétienne, les arméniens en l'occurrence, vont à un moment donné se retourner contre eux. Quand en 1915 la Guerre Mondiale éclate, leur paranoïa est absolument acquise à ce moment-là et ils sont décidés à éradiquer ces chrétiens pour ne pas que, pensent-ils, ils les poignardent dans le dos.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Pourquoi ça a dégénéré, ce sont les politiques finalement ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Non non, ça a dégénéré parce que l'Empire l'Ottoman a dégénéré. Cet empire avant était peuplé d'un tiers de chrétiens. Et donc finalement, quand l'empire s'écroule les turcs désirent l'unifier, il y a une poussée nationaliste et tout ce qui n'est pas musulman, turc les gênent et leur posent problème. Hors les arméniens vivent là depuis 2000 ans, il y a eu l'Arménie, l'Arménie était un pays qui allait de la mer caspienne à la méditerranée. Donc à un moment donné, il y a cette espèce défoulement et de peur, panique des trucs.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Votre roman commence donc en 1896 et l'on suit une famille d'arméniens ; les Tomassian et plus spécifiquement deux enfants. C'était important de faire vivre cette histoire, ce génocide au travers de deux enfants ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : Oui parce que je crois qu'il n'y a rien de plus terrifiant que l'injustice faite aux enfants. J'ai voulu effectivement prendre comme symbole ces enfants parce que je crois que c'est peut-être la meilleure manière de faire passer une émotion. Donc les enfants sont importants, le roman est important, je crois que c'est comme ça qu'on fait passer les messages.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Vous vous appuyez sur des faits historiques, il y a eu beaucoup de recherche, j'imagine, pour être au plus près de ce qui s'est réellement passé.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Les documents sont là, les témoignages sont là, les récits sont là. Et de voir que la Turquie continue aujourd'hui à nier ce qui s'est passé est affligeant parce que l'on a tous les documents. Bien sûr on n'a pas de sépultures et c'est ce qu'il y a de plus terrifiant dans cette affaire, c'est qu'il y a un million et demi de morts sans sépultures. Mais les récits des consuls, des ambassadeurs qui ont vécu en Turquie, à cette époque-là, démissionnèrent, qui ont vécu aussi en Anatolie en Cilicie tout est là.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Certaines scènes sont très dures, certaines descriptions sont parfois même insoutenables, mais en même temps c'était indispensable de le faire ?
Gilbert Sinoué (Erevan) : C'est ça qui est le plus terrifiant, c'est que je n'ai rien inventé. Il m'a suffi de lire les récits des survivants, d'écouter...parce qu'il y a des arméniens qui vivent encore, Dieu merci, et qui vivent en France, il y a une communauté très importante. Vous parlez à ces familles et vous découvrez que chacune d'entre elles à son histoire, chacune d'entre elles a eu un père ou un grand père, une grand-mère qui a souffert ou qui a disparu. Moi ce que je souhaite c'est que ce livre soit lu non pas par la communauté arménienne qui connaît son histoire mais partout, par la plus grande majorité de lecteurs qui ne savent rien de ce qui s'est passé. Par les turques aussi, je souhaite que ce livre soit traduit en Turquie et qu'aujourd'hui la nouvelle génération fasse table rase de cette période.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Ce livre c'est votre façon à vous peut-être d'aider la communauté arménienne à faire reconnaître ce pan de son histoire.
Gilbert Sinoué (Erevan) : C'est prétentieux, mais si ça pouvait être une pierre de plus posé sur l'édifice je serais ravi.
Philippe Chauveau (Web Tv Culture) : Raison de plus donc pour inviter les lecteurs à découvrir ce très beau roman. « Erevan », Gilbert Sinoué, c'est aux éditions Flammarion. Merci beaucoup.
Gilbert Sinoué (Erevan) : Merci.
Gilbert Sinoué
Erevan
L'avis du libraire 1'52Madame Maral Balian
Librairie Virgin Megastore Barbès
15, boulevard Barbès
75018 Paris
01 56 55 53 70
Gilbert Sinoué, ce n'est pas un nouveau venu, c'est un auteur qui écrit depuis la fin des années 80. C'est un auteur qui s'est spécialisé dans les sujets historiques en les romançant mais de manière très documentée, très sérieuse. Son dernier roman traite du génocide arménien, c'est une histoire qui existe dans chaque famille arménienne. Moi-même je suis de la 3e génération d'après le génocide. J'ai lu ce roman d'abord en ayant une petite appréhension, en me disant : « Qu'est ce qu'un non arménien pourrait raconter sur ce sujet ? ». Et en fait mes doutes ont été très vite balayés, j'ai été encore une fois émue par l'histoire, j'en ai coulé quelques larmes, quand même, malgré le fait que je connaissais l'histoire depuis toute petite. Gilbert Sinoué prend la vie d'une famille type arménienne qui vit dans l'est de la Turquie, dans l'Anatolie. Une région qui était énormément peuplée d'arméniens, de turcs et de kurdes à l'époque, avant le génocide, avant la 1e Guerre Mondiale. Turcs, Kurdes et Arméniens vivaient très bien ensembles en harmonie jusqu'à ce que les persécutions commencent. C'est un livre que l'on peut conseiller à quelqu'un qui ne sait pas ce qu'est le génocide arménien. C'est vrai qu'on en parle, c'est un mot qui englobe beaucoup de choses mais c'est typiquement le roman à offrir éventuellement à des gens qui veulent en savoir plus.
Madame Maral Balian
Librairie Virgin Megastore Barbès
15, boulevard Barbès
75018 Paris
01 56 55 53 70
Gilbert Sinoué, ce n'est pas un nouveau venu, c'est un auteur qui écrit depuis la fin des années 80. C'est un auteur qui s'est spécialisé dans les sujets historiques en les romançant mais de manière très documentée, très sérieuse. Son dernier roman traite du génocide arménien, c'est une histoire qui existe dans chaque famille arménienne. Moi-même je suis de la 3e génération d'après le génocide. J'ai lu ce roman d'abord en ayant une petite appréhension, en me disant : « Qu'est ce qu'un non arménien pourrait raconter sur ce sujet ? ». Et en fait mes doutes ont été très vite balayés, j'ai été encore une fois émue par l'histoire, j'en ai coulé quelques larmes, quand même, malgré le fait que je connaissais l'histoire depuis toute petite. Gilbert Sinoué prend la vie d'une famille type arménienne qui vit dans l'est de la Turquie, dans l'Anatolie. Une région qui était énormément peuplée d'arméniens, de turcs et de kurdes à l'époque, avant le génocide, avant la 1e Guerre Mondiale. Turcs, Kurdes et Arméniens vivaient très bien ensembles en harmonie jusqu'à ce que les persécutions commencent. C'est un livre que l'on peut conseiller à quelqu'un qui ne sait pas ce qu'est le génocide arménien. C'est vrai qu'on en parle, c'est un mot qui englobe beaucoup de choses mais c'est typiquement le roman à offrir éventuellement à des gens qui veulent en savoir plus.