Nicolas d'Estienne d'Orves

Nicolas d'Estienne d'Orves

Marthe ou les beaux mensonges

Portrait 06'34"

Philippe Chauveau :

Bonjour Nicolas d'Estienne d'Orves.

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Bonjour.

Philippe Chauveau :

Votre actualité chez Calmann Levy, « Marrhe ou les beaux mensonges », voilà un livre qui prend place dans une bibliographie déjà assez conséquente. J'ai l'impression que vous êtes un touche-à-tout. Il y a des récits, il y a des romans, il y a des romans d'anticipation, il y a des biographies, on se rappelle de celle consacrée à Jacques Offenbach. Si vous deviez définir votre travail d'auteur, que diriez-vous ? Qui êtes-vous Nicolas d'Estienne d'Orves ?

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Vaste question !

Philippe Chauveau :

Savez-vous vous-même ?

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Je suis, peut-être au bon sens du terme, une forme de dilettante, peut-être un touche à tout, peut-être un arlequin, je ne sais pas, surtout avec les couleurs que je porte... J'aime m'amuser ! Pour moi, l'essentiel, c'est de m'amuser. J'aime me surprendre et j'aime m'imposer des défis. Ecrire tous les ans le même livre, du même format, chez le même éditeur, ce que font certains de mes confrères avec beaucoup de talent, moi c'est quelque chose qui m'ennuie. Cela ne veut pas dire que je m'ennuie vite mais j'ai toujours besoin de nouveauté, de découvrir de nouveaux horizons tout en creusant une veine et des thèmes qui sont toujours globalement les mêmes. Pour moi, chaque livre est un nouvel exercice de style mais ce n'est pas non plus de l'artifice. J'ai envie d'essayer, j'ai envie de découvrir, j'ai envie de me surprendre moi-même et de m'amuser.

Philippe Chauveau :

Lorsque vous dites que vous avez envie de vous surprendre, c'est une façon de vous découvrir ? Vous cherchez à vous connaître peut-être parce que vous ne vous connaissez pas suffisamment ? Vous aimez vous mettre en danger ? Que cachent ces mots ?

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Ecoutez Dr Freud je ne sais pas ce que je peux vous répondre. En fait, j'aime aller ailleurs. Quand on est romancier, on a une vie très vernaculaire, en plus j'aime les îles, les lieux clos, mais j'adore le voyage. Nous sommes tous plein de contradictions… Et donc, chaque livre est un nouveau voyage. Chaque livre est une nouvelle expérience, une nouvelle petite épopée, une nouvelle petite odyssée dans un autre univers avec un autre personnage, dans une autre géographie, dans une autre temporalité. Chaque livre est un nouveau pays que j'explore et le livre, au bout du compte, est le journal de bord de ce voyage que j'ai fait tout seul face à mon ordinateur et mon imagination.

Philippe Chauveau :

Si l'on regarde votre parcours, on voit qu'il y a des fils rouges, il y a des passions. Il y a la musique, l'opéra, c'est aussi votre activité puisque vous êtes critique et chroniqueur notamment dans la presse magazine mais il y a eu aussi la biographie sur Jacques Offenbach chez Actes Sud. Il y a votre amour pour Paris avec ce « Dictionnaire amoureux de Paris » et puis, il y a l'écriture romanesque. Est-ce le même Nicolas d'Estienne d'Orves qui écrit pour la presse, qui écrit des biographies ou des romans ? Est-ce pour vous le même travail ?

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Les livres, c'est le même travail. La presse, c'est autre chose. J'écris sur la musique qui est vraiment ma passion la plus profonde. Je place personnellement la musique au-dessus de la littérature, peut-être parce que je ne la pratique pas, donc je la regarde avec une forme de dévotion. Il y a une partie de ma tête qui est le journaliste critique et une autre partie qui est l'écrivain mais je ne fais pas de différence entre ma biographie de Jacques Offenbach et mes romans ; c'est le même médium, c'est la même passion. Il y a le journaliste et l'écrivain mais dans l'écrivain, je mets tous les livres en vrac, pour moi il n'y a pas vraiment de hiérarchie.

Philippe Chauveau :

Lorsque vous écrivez ce que l'on peut appeler des romans d'anticipation comme « Othon ou l'aurore immobile » qui fut votre premier titre en 2002, lorsque vous écrivez des romans plus contemporains comme « La dévoration », lorsque vous écrivez à 4 mains avec votre mère, lorsque vous écrivez des romans ou il y a un décor historique comme « La gloire des maudits », vous cherchez à dérouter votre lectorat où, là aussi, c'est votre envie de vous mettre un peu en danger ?

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Non, cela se présente comme ça, je ne cherche pas à dérouter mon lectorat. Ce serait plus tactique d'avoir plus de régularité dans mes inspirations mais je suis comme ça. J'aime alterner des livres différents parce que j'ai envie de me surprendre, j'ai envie de me promener, c'est un tout. Effectivement j'ai beaucoup écrit, c'est mon 27e livre en une petite vingtaine d'années mais c'est ma nature, j'ai un côté un peu boulimique, enthousiaste, et, à chaque fois, j'ai envie d'essayer. Au lieu de tourner autour de la piscine il faut que je saute dedans !

Philippe Chauveau :

Quels sont vos rituels d'écriture ? Y-en-a-t-il d'ailleurs ?

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Oui, des rituels très précis et très ennuyeux, surtout pour les gens qui partagent ma vie. Je me lève à 5h tous les matins, j'écris à mon ordinateur globalement entre 5h et 10h du matin. J'ai besoin que ma conscience s'éveille en même temps que le soleil. On est vraiment en harmonie… Au départ, je suis un peu brumeux, je commence à lancer des phrases, c'est difficile, ça sort mal et petit à petit le jour se fait, le soleil sort, et la conscience est de plus en plus claire et il y a un moment qui dure peut-être une heure ou deux où là, ça marche, l'inspiration est au rendez-vous. Parfois le résultat est très mauvais ensuite mais j'ai besoin de cette harmonie avec, pas le cosmos, mais disons la nature, même si je fais ça en ville.

Philippe Chauveau :

Vous vous êtes défini comme un dilettante mais l'écriture, la publication, c'est aussi une façon de laisser une trace. Vous pensez à cela ? Vous pensez à ce que vont devenir vos livres dans vingt ans ou cinquante ans ?

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Franchement non. Ce qui m'amuse, c'est le livre en cours. Les gens me disent toujours « tel livre que tu as écrit en telle année » mais pour moi c'est du passé. J'ai presque tendance à dire qu'un livre publié est un livre mort.

Philippe Chauveau :

Diriez-vous que l'écriture est pour vous une sorte de rempart ? Une façon d'être bien avec vous-même face au monde qui vous entoure ou pas du tout ?

Nicolas d'Estienne d'Orves :

Sûrement, on a tous des fantômes, on a tous des angoisses, on a tous des terreurs. L'écriture est un rempart aussi contre une forme de folie ou d'angoisse parce que je suis quelqu'un de naturellement anxieux et j'écris souvent des choses assez épouvantables qui sortent très naturellement de mon imaginaire, parfois je me demande pourquoi et mon entourage s'inquiète... C'est aussi un rempart contre les autres parce que cela permet de se cacher derrière ses livres, à tout point de vue. C'est à dire que je dis aux gens « foutez moi la paix, j'écris » et on me fout une paix royale et j'adore être tranquille.

Philippe Chauveau :

En tout cas, continuez à nous surprendre avec vs ouvrages. Nicolas d'Estienne d'Orves, votre actualité, « Marthe ou les beaux mensonges », vous êtes publié pour ce livre chez Calmann-Levy.

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  • PORTRAIT
  • LIVRE
  • Nicolas d’Estienne d’Orves est une sorte de zébulon dans le milieu littéraire, un touche à tout qui sait vous entrainer dans ses enthousiasmes. Ses passions sont nombreuses. Au premier chef, il y a la musique, la grande musique et spécialement l’opéra. Il est d’ailleurs chroniqueur et critique pour France Musique, Le Figaro ou le magazine Classica. De l’opéra à l’opérette, il n’y a qu’un pas et on ne s’étonnera pas donc pas qu’en 2010, Nicolas d’Estienne d’Orves publie une passionnante biographie de...Arletty, un coeur libre de Nicolas d'Estienne d'Orves - Présentation - Suite
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