Blandine de Caunes

Blandine de Caunes

La mère morte

Portrait 00'06'22"

Philippe Chauveau :

Bonjour Blandine De Caunes, merci d'avoir accepté notre invitation. « La mère morte », c'est votre actualité aux éditions Stock. Faisons un peu plus connaissance au préalable, même si on vous connaît bien. En tout cas, vous avez un nom qui parle, un nom qui claque, la famille de Caunes. Vous êtes la fille de Georges de Caunes, le journaliste. Vous êtes aussi la fille de Benoîte Groult, l'écrivaine. Et ça, vous le précisez très souvent ! Vous mettez bien le "e" puisque votre maman a beaucoup milité pour cela. On a souvent tendance à dire qu'il est difficile de pousser à l'ombre des grands arbres. Avez-vous ressenti cela lorsque vous étiez enfant, adolescente ?

Blandine de Caunes :

Pas du tout. Je trouve que j'ai eu une chance folle d'avoir des parents aussi exceptionnels, talentueux, brillants, cultivés. Je trouve que c'est une grande chance et c'est beaucoup plus difficile de pousser à côté d'arbrisseaux, par exemple. Non, je pense que mon enfance a été un privilège.

Philippe Chauveau :

Je ne trahis aucun secret en disant que votre beau-père, Paul Guimard, a aussi été très présent, puisque votre père avait soif de liberté

Blandine de Caunes :

C'est lui qui m'a élevée. Mes parents ont divorcé quand j'avais environ deux ans et demi. Donc moi, je n'ai que le souvenir de Paul Guimard a la maison, qui m'a élevée.

Philippe Chauveau :

Un père journaliste et lui-même auteur, une mère essayiste et écrivaine, un beau-père lui-même romancier, "Les choses de la vie", par exemple, pour ne citer qu'un de ses titres. Ce qui veut dire que le livre, l'écriture, la littérature, vous êtes tombée dedans lorsque vous étiez petite ? C'était une évidence ?

Blandine de Caunes :

J'ai baigné dedans ! Les gens qu'on recevait à la maison étaient beaucoup d’écrivains. Il y eut aussi Léo Ferré qui écrivait des poèmes, un poète, des hommes politiques aussi à partir des années 1970. Paul était éditeur aussi, en plus d'être écrivain. Donc, j'ai vraiment baigné dans ce milieu-là.

Philippe Chauveau :

Avez-vous l'impression que, parfois, on vous a imposé le livre ? Est ce qu'on vous a forcée à lire ?

Blandine de Caunes :

Ah non, pas du tout ! Moi, j'avais cette passion dès l'enfance. C'est tout naturellement que je lisais. On était très libre chez nous.

J'ai commencé à lire vraiment jeune et je lisais tout, de la littérature contemporaine mais aussi les classiques. J'avais des livres de poche que j'ai toujours. J'ai lu Proust en livre de poche. J'en ai perdu un dans le train et j'en suis très malheureuse.

Philippe Chauveau :

Vous lancez un message ?

Blandine de Caunes :

Oui, je lance un message, mais sans grand espoir…

Philippe Chauveau :

Vous avez même écrit. Il y avait eu « L'involontaire » en 1976, qui est réédité chez Phébus dans l'actualité de ces mois-ci. Mais c'est surtout en tant qu’attachée de presse dans l'édition que vous vous êtes fait un prénom. Qu'avez-vous aimé dans ce contact entre les auteurs et leurs lecteurs ?

Blandine de Caunes :

D'abord, j'ai adoré rencontrer des écrivains. Cela ne me changeait pas beaucoup, mais j'étais très contente de mon sort. Je défendais les livres des écrivains. Évidemment, il y en a que l’on préfère plus ou moins, mais il y en avait beaucoup que j'aimais énormément. J'ai eu beaucoup de rencontres formidables. Je pense à Jorge Amado par exemple, dont j'ai été l'attachée de presse. Je pense à beaucoup d'autres encore. J'ai beaucoup aimé défendre les livres des autres.

Philippe Chauveau :

Aujourd'hui, quel regard portez-vous sur le monde littéraire ?

Blandine de Caunes :

Je crois que c'est de plus en plus difficile. Avant, il y a vingt ans par exemple, vous changiez de maison facilement. Vous en aviez marre, envie d’aller ailleurs, vous donniez votre démission et trois mois après maximum, vous étiez quelque part. Aujourd'hui, les gens hésitent à changer parce que les places sont chères, l'édition marche moins bien. Le tirage moyen des livres a baissé. Donc, c'est difficile. Mais il y a toujours de petites maisons d'édition qui se montent et ça, c’est formidable. Donc, il y a encore des gens qui investissent, non seulement du temps, mais de l'argent. Il faut en trouver, mettre beaucoup d'argent, ça coûte cher une maison d'édition, et je trouve ça formidable qu'il y ait toujours cette passion.

Philippe Chauveau :

Selon vous, qu'est-ce qu'un bon livre ?

Blandine de Caunes :

Il y a une phrase de Kafka que j'aime beaucoup : « Un livre doit fendre la mer gelée qui est en nous." Je trouve ça beau, parce que cela veut dire que ça nous emmène dans d'autres univers. Cela nous oblige à comprendre des choses auxquelles on n'avait pas pensé forcément, auxquelles on n’aurait pas été sensible. Je pense que la littérature nous ouvre l'esprit et le cœur.

Philippe Chauveau :

Est-ce que, parfois, les livres ont aussi été pour vous des remparts, des moyens pour vous, de vous abriter des épreuves que vous envoyait la vie. Est-ce que le livre sert aussi à cela ?

Blandine de Caunes :

Oui, oui, parce qu'on y retrouve un chagrin d'amour. Je pense à Goethe et à Werther, beaucoup de jeunes gens se sont suicidés après avoir lu ça, mais d'autres ont continué à vivre et ça, ça les a aidés. Moi, je pense que cela m'a aidée plusieurs fois dans ma vie ou dans des moments heureux ou dans des moments malheureux.

Philippe Chauveau :

Je le disais, là, il s'agit d'un récit dont nous allons reparler, vous avez également collaboré à certains ouvrages de votre maman, Benoîte Groult, il y avait eu une œuvre romanesque avec ce roman en 1976. Auriez-vous encore cette envie ? Est-ce que la plume romanesque vous démange ?

Blandine de Caunes :

Et bien oui, maintenant, voyez-vous, j'ai arrêté de travailler dans l'édition, je travaille pour moi. Oui, parce que je me suis occupé des « Journaux d'Irlande » de maman, ces « Carnets de pêche et d'amour » qui sont sortis en 2016. Donc, j'ai fait tout le travail que la maladie l'avait empêchée de faire. Je les ai mis en ordre, je les ai construits. Et puis il y a ce livre là, i y a eu la réédition, début janvier, de « L'involontaire ». Puis j'ai deux ou trois idées encore...

Philippe Chauveau :

On va vous suivre de près, Blandine De Caunes. Votre actualité en ce début d'année 2020, c’est « La mère morte ». Vous êtes publiée aux éditions Stock.

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  • LIVRE
  • Si elle-même a publié un roman en 1976, « L’involontaire » qui ressort ces temps-ci chez Phébus, c’est avant tout en tant qu’attachée de presse dans l’édition que Blandine de Caunes s’est fait un nom, voire même un prénom. Quand ses propres parents s’appellent Benoîte Groult et Georges de Caunes, il faut assurer, ce n’est jamais facile de pousser à l’ombre des grands arbres. Sur son père, souvent absent et peu attaché aux contingences familiales, elle reste discrète. S’agissant de son beau-père, en...La mère morte de Blandine de Caunes - Présentation - Suite
    Philippe Chauveau : Bonjour Blandine De Caunes, merci d'avoir accepté notre invitation. « La mère morte », c'est votre actualité aux éditions Stock. Faisons un peu plus connaissance au préalable, même si on vous connaît bien. En tout cas, vous avez un nom qui parle, un nom qui claque, la famille de Caunes. Vous êtes la fille de Georges de Caunes, le journaliste. Vous êtes aussi la fille de Benoîte Groult, l'écrivaine. Et ça, vous le précisez très souvent ! Vous mettez bien le "e" puisque votre maman a beaucoup milité...La mère morte de Blandine de Caunes - Portrait - Suite
    Philippe Chauveau : Vous avez choisi, Blandine de Caunes, de vous adresser aux lecteurs de façon très directe. C'est un peu comme un journal ce que vous nous proposez avec « La mère morte ». Le titre est très parlant, le titre claque. On va bien sûr reparler de ce titre que vous avez choisi. Il y a aussi le bandeau sur la couverture où vous êtes avec votre maman et avec votre fille Violette. Vous nous racontez la maladie d'Alzheimer qui va s'emparer de cette femme que fut Benoîte Groult et qui fut surtout votre mère....La mère morte de Blandine de Caunes - Livre - Suite