De son enfance en Périgord, Guillemette de la Borie a gardé le goût des paysages, des saisons, de l’indolence du temps qui s’égrène. Et si c’est à Paris qu’elle a construit sa vie, ce décor d’enfance est resté incontournable. Après avoir été enseignante en histoire-géographie, elle change de domaine d’activité au milieu des années 80 et devient journaliste. Elle signe dans la presse magazine, notamment Le Pèlerin, mais écrit aussi pour les enfants dans les revues jeunesse, de Pomme d’Api à Okapi. Des...
Samedi 6 avril 2019 de Guillemette La Borie (de) - Présentation - Suite
Philippe Chauveau : Bonjour Guillemette de La Borie.
Guillemette de La Borie : Bonjour Philippe Chauveau : Votre actualité, « La dernière héritière », vous êtes publiée chez Calmann Lévy. On va reparler de ce titre qui prend place dans une bibliographie déjà conséquente faite de romans, d'essais, de biographies. Avant l'écriture, il y a eu une autre vie qui était aussi l'écriture, vous avez été journaliste en presse jeunesse pour le groupe Bayard. Que gardez-vous de ces années durant lesquelles vous étiez au...
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Philippe Chauveau : Avec ce nouveau titre, « La dernière héritière », Guillemette de La Borie, vous venez d'obtenir le prix spécial du jury du Grand Prix Périgord de littérature. Il faut le dire, l'action se déroule essentiellement dans le Périgord, dans un petit château perdu dans cette belle région. Avec cette belle couverture, nous allons notamment faire connaissance dans les premiers chapitres de Pauline. Pauline qui va se marier un peu par amour, un peu par convenance, et puis on va faire connaissance avec toute la...
Samedi 6 avril 2019 de Guillemette La Borie (de) - Livre - Suite
Guillemette de La Borie
La dernière héritière
Présentation 3'04"De son enfance en Périgord, Guillemette de la Borie a gardé le goût des paysages, des saisons, de l’indolence du temps qui s’égrène. Et si c’est à Paris qu’elle a construit sa vie, ce décor d’enfance est resté incontournable. Après avoir été enseignante en histoire-géographie, elle change de domaine d’activité au milieu des années 80 et devient journaliste. Elle signe dans la presse magazine, notamment Le Pèlerin, mais écrit aussi pour les enfants dans les revues jeunesse, de Pomme d’Api à Okapi. Des biographies sur Mère Teresa ou sur Indira Gandhi et des essais éducatifs complètent le parcours de la journaliste. Voilà pour la version pile, version face, voici Guillemette de la Borie, la romancière, une envie concrétisée dès 2005 avec « Les dames de Tarnhac ». Suivent de nombreux autres titres où s’impose une évidence, Guillemette de la Borie aime raconter des histoires de famille, des personnages aux prises avec les secrets du temps passé, faire revivre les époques révolues, redonner vie à des campagnes oubliées et faire la part belle à des personnages féminins qui luttent pour se construire. Le nouveau titre de Guillemette de la Borie, le volà, « La dernière héritière » paru chez Calmann Lévy. Les amateurs de saga romanesque vont de régaler. Nous allons suivre la famille de Fages, dans son château de Péchagrier, au cœur de ce Périgord que l’auteur connait bien. De 1897 à 1948, trois générations confrontées aux soubresauts de l’Histoire, des destins contrariés, des amours avortés, des secrets inavoués. Avec une grande rigueur historique, une plume remarquable, classique mais jamais ampoulée, le roman est très bien construitr et on se laisse emporter par le destin de Pauline et Charles de Fages et leur progéniture. Par la description de la vie quotidienne au domaine de Péchagrier, on pourrait se rapproche de Downtown abbey, par les sujets traités l’évolution des mœurs, la culture, la guerre, les scandales économiques et politiques, il y a l’esprit de Maurice Druon et de ses grandes familles. Enfin, par le monde qui change inexorablement, emportant les habitudes et les certitudes, on se rapprocherait des « semailles et les moisson « d’Henri Troyat. Il y a un peu de tout cela dans le nouveau roman de Guillemette de la Borie. Et pourquoi ne pas évoquer aussi Alice Ferney et son « Elégance des veuves » dans la description de la condition féminine et ses chamboulement de la fin du XIXème à la première moitié du XXème siècle. Reconnaissant elle-même une influence de tous ces auteurs qui l’on forgée, Guillemette de la Borie n’en construit pas moins un univers littéraire bien à elle, sans doute éloigné de ce que la critique parisienne porte aux nues désormais mais qu’importe. De la belle ouvrage, du roman populaire au vrai sens du terme puisqu’on y parle de notre histoire, de nos familles, de nos campagnes, une écriture ciselée, juste et raffinée, voilà un roman réussi. « La dernière héritière » de Guillemette de la Borie est publié chez Calmann Lévy.
Guillemette de La Borie
La dernière héritière
Portrait 6'38"Philippe Chauveau : Bonjour Guillemette de La Borie.
Guillemette de La Borie : Bonjour Philippe Chauveau : Votre actualité, « La dernière héritière », vous êtes publiée chez Calmann Lévy. On va reparler de ce titre qui prend place dans une bibliographie déjà conséquente faite de romans, d'essais, de biographies. Avant l'écriture, il y a eu une autre vie qui était aussi l'écriture, vous avez été journaliste en presse jeunesse pour le groupe Bayard. Que gardez-vous de ces années durant lesquelles vous étiez au contact du jeune public ?
Guillemette de La Borie : Effectivement, j'ai commencé à écrire pour les enfants de 3 à 7 ans, et c'est une école formidable parce que chaque mot compte, parce que la justesse de l'émotion doit être là, tout de suite, parce que la construction doit être réfléchie et cela a été une école formidable. J'ai grandi au fur et à mesure de ma vie …
Philippe Chauveau : Et votre public a grandi aussi, on a trouvé votre plume dans Le Pèlerin notamment Guillemette de La Borie : Oui, j'ai terminé après 35 ans de journalisme, après La Croix, à Pèlerin. Avec un public plus âgé mais aussi pour lequel chaque mot doit avoir son sens. Philippe Chauveau : On l'a dit, le public, la presse magazine et puis l'envie d'écrire des biographies, que ce soit sur mère Teresa, sur Indira Gandhi, sur des femmes qui ont compté dans l'Histoire du monde, et puis l'écriture romanesque avec « Les dames de Tarnhac », votre premier titre en 2005. Pourquoi le romanesque fait-il son entrée dans votre parcours ?
Guillemette de La Borie : Parce que le roman permet de dire ce qui est encore plus vrai que le vrai. On peut ramasser dans un destin de femme des bouleversements... J'ai connu la fin d'une époque et aujourd'hui, j'ai l'impression que ma génération peut être le passeur de tout ce qui a changé et tout ce qui est encore là. On dit toujours qu'il faut avoir des racines pour comprendre l'avenir. J'ai vu un monde se terminer, dans lequel il y avait les racines et j'ai eu envie de l'expliquer à travers les destins de femmes.
Philippe Chauveau : Justement, vous parlez des bouleversements, des destins de femmes, c'est la cause féminine qui vous intéresse au fil des décennies, au fil des siècles ? Est-ce qu'il y a une part de militantisme dans votre travail?
Guillemette de La Borie : Non, il n'y a aucun militantisme. En fait, j'ai souvent essayé de camper des personnages, de me mettre à la place d'un homme pour raconter et je n'y arrive pas. Définitivement, je crois que j'ai besoin de rentrer à l'intérieur d'une psychologie qui me ressemble pour parler du monde. Mais cela n'empêche pas que les hommes aient toute leur place, surtout pendant une période de guerre. Ils ont des destins aussi forts. J'ai besoin, sans militantisme, de rentrer dans la psychologie d'une femme pour raconter le monde tel que je le vois.
Philippe Chauveau : Lorsque l'on suit votre bibliographie, il y a toujours des personnages féminins qui sont importants, des femmes souvent portées par le tourbillon de l'Histoire, mais des femmes aux destins et à la personnalité très fortes. On retrouve également un attachement, un ancrage dans ce que l'on peut appeler le terroir, les provinces de France ; le décor pour vous est important, et vous aimez aussi traiter de thématiques bien précises dans vos romans sur l'évolution de ces femmes qui sont confrontées à certains points bien précis de nos époques révolues.
Guillemette de La Borie : Après la biographie, après les histoires pour les enfants, j'avais très envie de parler de ma région, je suis née dans le Périgord et j'y passe beaucoup de temps. Cette connaissance intime, cette manière de pouvoir trouver avec acquis, me faire raconter tel ou tel aspect de la vie d'autrefois, c'est là que je l'ai trouvé. C'est une manière de rendre hommage à une terre qui m'a beaucoup donné.
Philippe Chauveau : Vous nous avez expliqué que le goût de l'écriture romanesque venait par l'envie de raconter des destins mais j'imagine qu'il y aussi des influences. Quelle lectrice êtes-vous ? Quels sont les grands souvenirs, les grandes découvertes littéraires dans votre adolescence, dans votre parcours de femme, y a-t-il eu des marqueurs ?
Guillemette de La Borie : Je pense à « Jalna », ce sont des sagas qui m'ont beaucoup marquée, plus personne ne lit « Jalna » de Mazo de la Roche. Il y avait cette idée de montrer comment de génération en génération, les destins étaient bousculés par la grande Histoire. Je pense aussi à une série que j'ai beaucoup aimée quand j'étais adolescente, « Les gens de Mogador ».
Philippe Chauveau : Tout le monde se rappelle des adaptations télévisées... Guillemette de La Borie : Oui c'est vrai. Il y a aussi eu des périgourdins, des périgourdines qui m'ont marquée, je me rappelle en lisant Puynègre et Fontbrune qui sont des livres où je me suis dit que j'aimerais rendre avec la même force les émotions, les parcours, les destins des hommes du XXe siècle.
Philippe Chauveau : Vous qui avez imaginé, raconté des histoires aux enfants dans la presse magazine, qui avez surement aussi raconté des histoires à vos quatre enfants, avez-vous l'impression vous êtes restée une conteuse dans l'âme ?
Guillemette de La Borie : Je pense que je sais mieux écrire que parler. Peut-être que justement j'ai besoin de passer par l'écriture et par la réflexion sur les mots et par le temps. Dans l’écriture, il n'y a pas l'immédiateté de la conteuse, qui raconte tout de suite. Peut-être que je me sens moins à l'aise qu'en ayant réfléchi à ce que je veux dire, au sens que je veux donner à travers les mots, par l'écrit.
Philippe Chauveau : Pourquoi cette envie de vous raccrocher à l'Histoire ?
Guillemette de La Borie : Je suis prof d'histoire à l'origine. J'ai enseigné pendant une dizaine d'années. l'Histoire, c'est ma formation donc effectivement c'est mon terreau. Peut-être aussi que je crois fondamentalement que pour être bien dans l'avenir, il ne s'agit pas de vivre dans le passé, mais pour comprendre où on veut aller dans l'avenir, il faut savoir d'où on vient.
Philippe Chauveau : Votre actualité, Guillemette de La Borie, « La dernière héritière », vous êtes publiée chez Calmann Levy.
Guillemette de La Borie
La dernière héritière
Livre 6'58"Philippe Chauveau : Avec ce nouveau titre, « La dernière héritière », Guillemette de La Borie, vous venez d'obtenir le prix spécial du jury du Grand Prix Périgord de littérature. Il faut le dire, l'action se déroule essentiellement dans le Périgord, dans un petit château perdu dans cette belle région. Avec cette belle couverture, nous allons notamment faire connaissance dans les premiers chapitres de Pauline. Pauline qui va se marier un peu par amour, un peu par convenance, et puis on va faire connaissance avec toute la famille. D'où vient-elle Pauline et qu'avez-vous eu envie de nous raconter avec « La dernière héritière » ?
Guillemette de La Borie : J'ai eu envie de me promener à travers le XXe siècle. On commence effectivement à la fin du XIXe siècle par un mariage arrangé, de convenance, d'amour, tout cela à la fois, c'était comme ça que cela se faisait. Ce qui m'a intéressé, c'est de rentrer dans la mentalité, dans la manière de penser, de vivre, d'aimer, de nos arrières grand-mères et de voir comment au cours de ce siècle absolument effroyable et en même temps passionnant, tous ces bouleversements ont transformé le destin profondément de la fille et la petite fille du personnage de Pauline, très loin à la fois du Périgord et de ce qu'elles étaient censées devenir.
Philippe Chauveau : Le roman va de 1893 à 1948, on fait donc connaissance au tout début avec Mr et Mme de Fages, Charles et Pauline, puisque nous sommes dans la petite noblesse de province.
Guillemette de La Borie : Très loin de l'aristocratie parisienne, ils vont prendre de plein fouet la crise agricole, les changements de structures, et vont être obligé de se réinventer. Philippe Chauveau : Ils vont aussi être confrontés aux deux guerres Guillemette de La Borie : Confrontés aux deux guerres, confrontés à la révolution russe aussi.
Philippe Chauveau : Il y a toute la grande Histoire en toile de fond de ce roman et puis on découvre aussi la vie au quotidien au château de Péchagrier avec ses habitudes. Vous nous emmenez régulièrement dans les cuisines pour voir comment vit toute la domesticité. Comment avez-vous travaillé ? On sent qu'il y a beaucoup de recherche pour coller au plus près de la réalité.
Guillemette de La Borie : Pour ce livre, j'ai essayé de rentrer le plus possible dans les mentalités, j'ai lu énormément de correspondances, d'archives, de journaux, de cahiers et de livres de comptes, tout ce qui permettait de comprendre de l'intérieur comment on vivait, comment on pensait, comment on cherchait son chemin.
Philippe Chauveau : De ces cinquante années de la fin du XIXe jusqu'aux années 1950, nous allons côtoyer beaucoup de personnages, c'est pour cela d'ailleurs qu'à la fin du livre, il y a des arbres généalogiques et puis vous nous rappelez quels sont les personnages principaux du roman. On s'attache à ces personnages, que ce soit Charles et Pauline, avec leur façon de s'aimer, que ce soit tous les enfants, beaucoup de personnages féminins, il y a toutes les petites que nous allons voir grandir, que ce soit Marguerite, que ce soit Renée, qui va choisir une autre forme de vie, et il y a aussi tous les garçons, certains qui vont avoir envie de prouver leur bravoure sur le front... Tous ces personnages, comment les avez-vous conçus ?
Guillemette de La Borie : Les sept enfants sont venus de cette idée que les femmes étaient vraiment épuisées par les grossesses successives, cela a commencé comme ça, dans la masse de documentation que j'ai trouvé. J'ai eu envie de les incarner à travers les uns et les autres. Vous avez dit tout à l'heure que j'avais essayé de montrer à la fois les cuisines et le salon, cela me fait très plaisir que vous disiez cela parce que ce qui m'a frappé aussi, en cherchant, c'est à quel point tout le monde faisait partie de la même entité, avec des domaines un peu autarciques où chacun imprimait sa marque, avec toutes les injustices, toutes les hiérarchies sociales lourdes, mais j'ai essayé de rendre hommage à chacun, pour la place qu'ils ont tenu dans ce petit théâtre de Péchagrier, ce domaine périgourdin où je situe mon roman.
Philippe Chauveau : Personnellement, ce que j'ai apprécié dans ce roman, c'est qu'on retrouve un peu l'esprit « Downtown Abbey » puisque vous nous racontez la vie d'un petit château de province. Il y a aussi dans l'esprit, dans l'écriture, la sensibilité de Maurice Druon avec « Les grandes familles », j'ai aimé la finesse dans votre écriture et la qualité de votre style. Comment avez-vous travaillé justement cette écriture qui n'est peut-être plus celle qui a cours aujourd'hui ?
Guillemette de La Borie : C'est probablement par influence justement, à force de plonger dans les archives, cela m'intéresse aussi de faire rentrer dans mon écriture des éléments de vocabulaire, des tournures d'esprit et d'écriture qui correspondent à l'époque. Merci de le remarquer parce que cela fait partie de mes efforts de faire coller dans l'écriture et dans la manière de voir les choses selon les époques. On allait plus lentement, il y a aussi un rythme des jours qui est beaucoup plus lent au début du siècle qu'à la fin. Cela fait partie de ce que j'ai essayé de montrer.
Philippe Chauveau : La vie s'écoule lentement à Péchagrier, ce qui n'empêche pas nos personnages d'être emportés par le vent de l'Histoire. Avez-vous eu du mal à laisser vos personnages ? C'est une grande saga sur trois ou quatre générations, j'imagine qu'ils sont devenus un peu votre famille ?
Guillemette de La Borie : J'essaie de garder de la distance parce que chaque personnage est une composition et ce n'est certainement pas le décalque de telle ou telle personne qui existe. Il y a un danger à vouloir en faire des personnages... Bien sûr, j'imagine bien comment ils ont continué à vivre mais à leur manière et pas comme des calques de véritables personnes.
Philippe Chauveau : C'est l'histoire d'une famille de 1893 à 1950, c'est aussi une partie de notre Histoire de France. C'est un très beau roman, porté par une écriture très maitrisée. Guillemette de La Borie, votre actualité, « La dernière héritière », vous êtes publiée par Calmann Lévy, merci beaucoup.
Guillemette de La Borie : Merci.