Voilà un jeune auteur dont nous n’avons pas fini d’entendre parler et je vous invite à retenir son nom. Il s’appelle Alexandre Delas et publie aux éditions de l’Archipel son premier roman « Les premières funérailles ».
Sept années de travail, d’écriture, de réécriture pour aboutir à ce texte qui interpelle et ne laisse pas indifférent.
Parisien d’origine, passé par des études de commerce, intégré à un grand groupe avant de monter sa propre start-up, Alexandre Delas observe le monde comme il va et le parcourt...
Les premières funérailles d'Alexandre Delas - Présentation - Suite
Philippe :Bonjour Alexandre Delas. Vous êtes dans l'actualité du livre avec ce qui est votre premier roman, votre premier livre aux éditions de l'Archipel. Ça s'appelle "Les premières funérailles". On va faire un petit peu connaissance avant de rentrer dans ce livre, même si faire connaissance avec vous, c'est aussi un peu parler du livre parce que l'un ne va pas sans l'autre. Vous êtes un garçon peut-être assez secret. On n'a pas beaucoup d'informations vous concernant. Je sais que vous avez fait des études de commerce,...
Les premières funérailles d'Alexandre Delas - Portrait - Suite
PhilippeDéjà, la couverture intrigue. Alexandre Delas, qui est votre premier roman, "Les premières funérailles", aux éditions de l'Archipel. Lorsque l'on connaît un petit peu votre votre parcours, on comprend tout de suite qu'il y a beaucoup de vous même dans cette histoire. Le narrateur s'adresse directement au lecteur. Le narrateur nous raconte son histoire et rembobine même le fil, le fil de sa vie. Qui est il, ce jeune homme que nous allons suivre ?
Alexandre DelasC'est un jeune homme qui a grandi dans un environnement assez...
Les premières funérailles d'Alexandre Delas - Livre - Suite
Alexandre Delas
Les premières funérailles
Présentation 00'02'47"Voilà un jeune auteur dont nous n’avons pas fini d’entendre parler et je vous invite à retenir son nom. Il s’appelle Alexandre Delas et publie aux éditions de l’Archipel son premier roman « Les premières funérailles ». Sept années de travail, d’écriture, de réécriture pour aboutir à ce texte qui interpelle et ne laisse pas indifférent. Parisien d’origine, passé par des études de commerce, intégré à un grand groupe avant de monter sa propre start-up, Alexandre Delas observe le monde comme il va et le parcourt aussi, au gré de ses déplacements professionnels. Ce monde, il cherche à le comprendre, à y trouver sa place et à en dénoncer les failles. C’est ainsi que nait ce roman écrit un peu comme un conte avec pour toile de fond une société fantasmée qui pourtant rappelle furieusement la nôtre. Le narrateur a 33 ans, comme le Christ. Et en 14 chapitres, comme les 14 stations de la Passion, il explique à un mystérieux homme en noir qui pourrait être le lecteur ce que fut sa vie et comment il en arrive à cette nuit ultime, là où il est, enfermé, incompris, lui qui avait tout pour réussir, être un pur produit de son époque. Le jeune garçon était né laid et de lui-même s’était mis en marge d’un monde régi par le beau et les apparences. Mais un accident de la vie et un père chirurgien esthétique lui ont permis d’acquérir un nouveau visage à la beauté diabolique. Dès lors, ceux qui l’entourent n’ont plus sur le garçon le même regard et lui-même ne voit plus le monde de la même façon. Mais a-t-il réellement vécu ce qu’il raconte ou n’est ce que le résultat d’un esprit en proie à la folie ? Avec une écriture exigeante, littéraire et moderne à la fois, Alexandre Delas raconte un monde qui court à sa perte, une jeunesse en manque de repères, un ultra capitalisme clivant mais aussi les traumatismes de l’enfance, la recherche de l’âme sœur, la fugacité des sentiments, la perception de la réalité, le piège des apparences. Comme le précise l’éditeur, il y a dans ce texte du Baudelaire, du Sallinger, du Flaubert mâtiné de David Lynch. Il y a surtout l’émergence d’un auteur au talent prometteur. Et dans ce texte fort, puissant, violent et sombre surgissent des épiphanies lumineuses et sensibles qui viennent contrebalancer la désespérance du sujet. Voilà un livre que je vous invite vivement à découvrir. « Les premières funérailles » d’Alexandre Delas, est publié aux éditions de l’Archipel.
Alexandre Delas
Les premières funérailles
Portrait 00'07'22"Philippe :Bonjour Alexandre Delas. Vous êtes dans l'actualité du livre avec ce qui est votre premier roman, votre premier livre aux éditions de l'Archipel. Ça s'appelle "Les premières funérailles". On va faire un petit peu connaissance avant de rentrer dans ce livre, même si faire connaissance avec vous, c'est aussi un peu parler du livre parce que l'un ne va pas sans l'autre. Vous êtes un garçon peut-être assez secret. On n'a pas beaucoup d'informations vous concernant. Je sais que vous avez fait des études de commerce, travaillé dans des grands groupes, dont une start-up. Pas mal voyager aussi. Vous êtes un observateur du monde. Comment vous définiriez-vous ? Quel a été votre parcours jusqu'à aujourd'hui ?
Alexandre Delas Mon parcours, justement, c'était de chercher quelle était ma voie. Je pense que je ne suis pas le seul dans le monde d'aujourd'hui à se poser des questions sur ce qu'on allait devenir plus tard. Je n'avais pas spécialement de vocation quand j'étais adolescent ou enfant. Ce qui fait que le parcours un peu classique d'école de commerce, qui m'a permis en tout cas de découvrir le monde en marche parce que j'ai, du coup, beaucoup voyagé en Asie pour mon travail, au Moyen-Orient découvrir des cultures différentes. Mais qui finalement me permettent de mieux observer ce qui se passe en Europe et dans la partie occidentale que je connais, dans laquelle j'ai grandi. La littérature, elle, est arrivée dans ma vie parce que j'étais un grand lecteur. Peut-être le fait d'être enfant unique et de s'ennuyer beaucoup quand j'étais enfant. J'ai découvert le livre, le monde des livres. Et c'est vrai que quand on aime les livres, parfois on a cette espèce d'envie d'écrire sa propre histoire. Et ça m'a permis, la littérature, en tout cas, de faire une sorte de témoignage de ce que j'avais vécu jusque-là par ces expériences.
Philippe Vous nous dites déjà pas mal de choses vous concernant. Vous êtes à la fois un observateur et un acteur du monde puisque vous voyagez pour votre métier, que vous observez ce qui se passe ailleurs et pour le mettre en parallèle de votre propre existence. Et puis, la place du livre, vous l'expliquez aussi dans votre parcours. Ça veut dire qu'il y avait une bibliothèque familiale dans laquelle peut-être vous vous êtes réfugié ? Ou est-ce qu'il y a des gens, des professeurs, des bibliothécaires qui vous ont mis des livres en main ?
Alexandre Delas Moi, c'est vrai que j'ai deux parents qui sont assez différents : un père qui ne lit absolument pas de livres et une mère qui est une grande lectrice. Et donc j'ai toujours baigné dans les livres étant enfant, et comme ils travaillaient beaucoup, je les voyais peu. Mais je pouvais puiser dans la bibliothèque de chez moi en fait. Et en fait, ça a commencé par ... vous savez, il y avait les radiocassettes pour enfants à l'époque où on pouvait avoir des livres lus par des acteurs et j'ai le souvenir d'avoir écouté en boucle des livres. Et c'est vrai que ça m'a bercé. Ça m'a surtout parfois été un refus, justement parce que la réalité du monde de l'enfance est assez cruelle, comme je peux le décrire un peu dans mon roman. Et surtout, ça donne une ouverture sur le monde quand on est enfant et on absorbe ça de manière très premier degré, au début. Et après, en grandissant, on fait ses propres expériences et on peut remettre en cause un peu même les livres qu'on a considérés comme des classiques. On fait sa propre expérience et c'est intéressant de pouvoir la confronter avec ce qu'on a imaginé enfant.
Philippe Vous dites que vous êtes devenu vous même un grand lecteur. Quels sont les livres qui ont marqué votre parcours ?
Alexandre Delas Alors, c'est assez classique. Je pense qu'à l'adolescence, j'ai été assez marqué par la "beat generation", par le côté liberté, le côté américain de cette espèce de grand road trip, d'écrire aussi certaines marges aussi. Donc, au début, c'était ça. Après, un peu plus âgé, il y a eu Bret Easton Ellis, à un moment donné, qui était un peu à la mode quand j'étais adolescent.Et ensuite, des choses un peu plus sensibles, peut-être Salinger, la poésie, Baudelaire. Je citais des classiques, Flaubert, etc. J'ai redécouvert les classiques plus tard, c'est-à-dire que la poésie m'a toujours intéressé. Mais je n'ai jamais été un érudit non plus de la littérature. Et après j'ai absorbé beaucoup de pop culture, beaucoup de choses plus larges : de l'art, le design, etc. Au-delà de la littérature, ça m'a ouvert sur l'art, d'une manière générale.
Philippe Tout l'univers artistique.
Alexandre Delas Voilà.
Philippe Et à quel moment vous dites vous :" J'ai besoin de prendre la plume, moi aussi" ?
Alexandre Delas Je crois que c'est né... C'était un fantasme, comme on peut la voir justement quand on est un lecteur. Mais de passer à l'action, ça, c'est vrai qu'il y a un élément déclencheur, c'est que quand j'ai commencé à travailler, c'est une première confrontation au monde des adultes, réel, pas fantasmé. Et ç'a été très difficile pour moi parce que je n'avais pas, justement, de vocation particulière. Je n'avais pas fait le travail nécessaire pour savoir qui j'étais avant de commencer à travailler. Je me suis dit : "ouch ça va être long, qu'est ce qui se passe ? " C'était un sentiment de, oui, un peu de désillusion et un peu de... le mot "dépression" fait un peu peur. Mais en réalité, c'est un peu ça. J'avais besoin d'exprimer ce que je ressentais. Et un livre qu'on commence à l'écrire : on se parle à soi même au début, puisqu'on n'a pas de lecteur et que tant qu'il n'existe pas, tant qu'il n'est pas fini, ça reste une sorte de fichiers numériques dans son ordinateur. Mais il y a beaucoup de moi qui a pu s'exprimer à ce moment là et ç' a été un changement. Il y a eu plusieurs versions de ce livre et il m'a accompagné justement dans l'écriture pendant sept ans. Donc c'était assez long comme un parcours.
Philippe Vous le dites, le point de départ, c'est un moment assez difficile de votre vie.
Alexandre Delas Oui
Philippe Sept ans de travail aujourd'hui, le livre est en librairie depuis quelques semaines, avec de bons frémissements, avec des critiques positives, notamment sur votre style. Comment vivez-vous tout cela ? C'est une sorte d'apaisement ou au contraire, ça vous semble vertigineux maintenant d'avoir offert ce livre ?
Alexandre Delas C'est étrange parce que assez naïvement, quand j'ai écrit mon objectif avec ce livre, c'était... je le voyais un peu comme une sorte de bouteille à la mer que j'enverrai en me disant : " Il y a quelques personnes que je ne connais pas qui vont être intrigué, le prendre et le lire et ressentir ce que je veux transmettre.Et je me disais naïvement que ces personnes là, on deviendrait amis, en fait. C'est le seul. Pour l'instant, je suis content d'avoir des retours de lecteurs, de personnes que je ne connais pas, parce que dans l'entourage proche, c'est très difficile d'avoir un avis qui est complètement objectif. Donc ç'a un peu moins de valeur. On est content mais ce n'est pas la finalité de, je pense, de l'écriture. C'est de pouvoir toucher des personnes qui, justement, pourraient venir d'horizons totalement différents, d'âges totalement différents. Et j'ai la chance d'avoir des premiers retours que je trouve intéressants. Et pour l'instant, je trouve ça joli en fait.
Philippe Alors si vos lecteurs deviennent vos amis, eh bien je suis ravi de faire partie de vos nouveaux amis. Votre actualité Alexandre Delas. Ce premier roman, c'est aux éditions de l'Archipel. Ça s'appelle "Les premières funérailles".
Alexandre Delas
Les premières funérailles
Livre 00'08'43"Philippe
Déjà, la couverture intrigue. Alexandre Delas, qui est votre premier roman, "Les premières funérailles", aux éditions de l'Archipel. Lorsque l'on connaît un petit peu votre votre parcours, on comprend tout de suite qu'il y a beaucoup de vous même dans cette histoire. Le narrateur s'adresse directement au lecteur. Le narrateur nous raconte son histoire et rembobine même le fil, le fil de sa vie. Qui est il, ce jeune homme que nous allons suivre ?
Alexandre Delas
C'est un jeune homme qui a grandi dans un environnement assez particulier puisque dans un monde d'aujourd'hui qui est assez obsédé par les apparences, lui, ses deux parents sont chirurgien esthétique. Et lui, ironie de l'histoire, c'est un enfant très laid. Ce qui lui permet finalement d'avoir une sorte de recul sur le monde dans lequel il vit et d'observer ce qui se passe sans faire partie de ce monde là.
Philippe
Comment c'est venue cette idée de la chirurgie esthétique ? C'est justement en passant beaucoup de temps en Corée du Sud et en essayant de comprendre pourquoi il y avait là-bas une obsession pour la chirurgie esthétique, pourquoi tout le monde faisait de la chirurgie esthétique. Et en fait, l'explication que m'ont donné des Coréens, c'est qu'en fait, dans le monde du travail, c'est devenu un critère de compétition supplémentaire. Et je trouvais que c'était tellement extrême que je trouvais ça intéressant de le transposer en France, dans une espèce de France fantasmé, comme dans le livre, et de voir comment un enfant va se construire avec ce qui peut être considéré comme un handicap dans le monde dans lequel il évolue, comment il va s'en défaire ou pas.
Philippe
Cet enfant qui est donc un petit peu hors norme, qui n'est pas comme les autres, qui vit un peu en marge, ça lui permet donc d'être une sorte d'observateur de ce qui l'entoure. Sauf que lorsque nous prenons le roman, cet enfant a grandi. Quel âge a t il d'ailleurs lorsque le roman commence ?
Alexandre Delas
Quand le roman commence, il a 33 ans.
Philippe
Il a 33 ans.
Alexandre Delas
Donc il a une expérience de la vie qui est plus grande. Ce n'est pas un roman sur l'enfance. Et l'enfance est très prégnant parce que j'explique à quel point les traumatismes de l'enfance vont se répercuter sur le reste de sa vie. Mais il a du recul et il vit... On sait qu'au début du roman, l'histoire commence mal puisqu'il est déjà interné dans une sorte d'hôpital psychiatrique-prison. On ne sait pas trop, mais en tout cas, on sait que l'histoire a un peu mal fini.
Philippe
Il a 33 ans et son visage aussi a changé.
Alexandre Delas
Oui.
Philippe
Lui qui était un enfant laid. Au contraire, eh bien, il a 33 ans, il est devenu un... il a une beauté assez surréaliste.
Alexandre Delas
L'ironie de l'histoire, c'est que vers l'âge de l'adolescence, il va lui arriver un accident. Il aura l'opportunité d'être transformé totalement, c'est-à-dire que physiquement, il va devenir soudain extrêmement beau.
Philippe
Ce qui veut dire que lui, qui était un peu en marge de par sa laideur, va répondre encore plus aux critères de l'apparence qu'il cherchait, qu'il cherchait pourtant.
Alexandre Delas
C'est ça, il va observer le regard des autres changer sur lui. Mais lui, au fond de lui, il est toujours la même personne. Donc la beauté n'était pas un critère important pour lui pour se développer, en fait.
Philippe
Vous le disiez dès les premières pages, on sent que ça va mal se terminer pour lui. Je vous ai volontairement demandé l'âge de votre personnage. Il a 33 ans et votre roman est découpé en quatorze stations. Vous n'avez pas appelé ça des chapitres. Vous avez bien appelé ça des stations. Un peu comme la passion du Christ. Pourquoi ce lien ? Pourquoi était important de faire ce clin d'œil au Christ ?
Alexandre Delas
En fait, ce roman, je le vois plus comme une sorte de conte, on va dire contemporain, très sombre. Et j'ai essayé d'imaginer si on prend le personnage du Christ, on l'imagine hors de la religion, mais on va dire la figure mythologique du Christ en fait l'archétype de la personne qui va se rebeller contre un système établi. Et qu'est ce qu'il en fait ? Je me disais si cette personne était née aujourd'hui dans le monde dans lequel on vit. Est ce qu'il aurait été capable de faire ce qu'il a fait ? Donc ce qui m'intéresse n'est pas l'aspect religieux, c'est plutôt l'aspect... On a un monde qu'on a envie de critiquer, on a envie de se rebeller et de se battre. Mais le système est tellement bien fait et tellement ... on va dire en cercle fermé, que finalement on est toujours rattrapé par le conformisme et la masse qui fait que comment s'engager aujourd'hui dans un monde comme ça ?
Philippe
Ce personnage que nous allons suivre, on sent que c'est sa dernière nuit. Il a 33 ans. Vous allez raconter son histoire en quatorze chapitres, en quatorze stations, donc c'est une sorte de chemin de croix. Comment en est il arrivé ? Comment est il arrivé jusque là ? Et c'est l'occasion donc pour vous de parler de ce garçon, de son enfance, de ses mal être d'enfance, de comment il a grandi et surtout comment il a grandi dans un monde en pleine évolution, parce qu'on est aussi dans un monde un peu surréaliste. Vous avez dit tout à l'heure que ce roman est écrit un peu comme un conte. On est dans un Paris qui n'est pas le Pari- que nous connaissons. Il y a eu de la violence, il y a eu des destructions, il y a eu des morts. Et pourtant, nous ne sommes peut être pas dans un futur si éloigné. On ne sait pas précisément d'ailleurs à quelle époque nous sommes. Vous racontez beaucoup de choses parce que vous dénoncez aussi beaucoup de choses. Vous dénoncez notre monde finalement, dans ce livre.
Alexandre Delas
Volontairement, il y a plusieurs réalités qui se mélangent dans ce roman. Mais elles rattrapent la réalité d'aujourd'hui parce qu'en fait, j'imagine un Paris qui aurait été reconstruit en plus beau après une guerre dont personne n'a le droit de parler mais qui a déjà eu lieu. Et on sait que Paris a déjà été détruit une première fois. Alors toute ressemblance avec l'actualité n'est pas purement fortuite, c'est que on n'a jamais... On vit dans une réalité qui n'a jamais été aussi dystopique, on nous parle de guerre mondiale potentielle, on a l'influence de la technologie d'intelligence artificielle, des sujets qui sont assez anxiogènes et j'essaye d'imaginer ce monde d'après qui serait encore pire que le nôtre.
Philippe
Votre personnage évolue dans un décor qui est magnifique puisque effectivement il y a eu destruction mais reconstruction. Mais un décor où tout n'est qu'apparence parce que c'est bien aussi le sujet du livre. C'est que se cache-t-il derrière les apparences ? C'est un système de castes. C'est un système autocrate que vous racontez.
Alexandre Delas
Ouais.
Philippe
Et puis vous expliquez aussi le mal être d'une jeunesse qui n'a plus de repères.
Alexandre Delas
Parce que la jeunesse se perpétue de génération en génération. Donc ce mal être, il est, je pense, assez ancestral. Je pense que ce n'est pas propre à notre époque. La seule différence avec notre époque, c'est qu'aujourd'hui le système économique a les moyens technologiques, en les pervertissant un petit peu de vraiment toucher à l'intime et au niveau mondial, en instantané, dans le monde entier, en même temps. Il y a une sorte d'uniformisation de ce mal être. Une jeunesse qui n'a plus trop de repères aura tendance à chercher une sorte de gourou, un peu de de réponse, une sorte de parents de substitution pour trouver des réponses. Et le cœur du livre, c'est comment justement ne pas faire ça ? Mon ambition, ma volonté avec ce livre, c'était plutôt d'essayer de voir comment survivre à ces traumatismes d'enfance, comment s'affranchir de son milieu social, des codes. Et c'est pour ça que je l'appelle plutôt un roman de "désapprentissage", parce que la clé de tout ça, c'est apprendre à désobéir. On n'est pas son ADN, on n'est pas sa couleur de peau, on n'est pas son milieu social, on n'est pas ses parents, on est un être unique qui doit arriver à devenir unique.
Philippe
En tout cas, ce roman est un choc de par les sujets qu'il traite, de par le personnage qu'il raconte. Et puis ce livre aussi est un choc par la qualité littéraire. C'est un livre dans lequel il y a une profonde désespérance, il y a de la violence. C'est un livre assez sombre. Et puis, très régulièrement, il y a des fulgurances, il y a des moments très lumineux qui viennent nous raconter que tout n'est pas, que tout n'est peut être pas perdu. En tout cas, c'est une belle réussite. Voilà un auteur dont je vous invite vivement à retenir le nom, que je vous invite vivement à découvrir. Alexandre Delas. Ça s'appelle "les Premières funérailles". C'est aux éditions de l'Archipel. Merci beaucoup.