Gilles Legardinier

Gilles Legardinier

Une fois dans ma vie

Livre 8'06

Philippe : Quelle idée originale, Gilles Legardinier de nous emmener dans un théâtre, puisque effectivement c'est le cadre, c'est le décor de votre nouveau roman « Une fois dans ma vie » et dans ce théâtre on va faire connaissance avec un trio de femmes assez insolite, il y a Eugénie, il y a Céline, il y a Juliette mais c'est Eugenie qui tient le premier rôle, elle est la gardienne des lieux, vous pouvez nous la présenter, Eugenie ? Qui est-elle cette femme qui se pose pas mal de questions au milieu de sa vie ?

Gilles Legardinier : C'est un personnage qui me touche beaucoup parce que c'est un personnage qui a tout pour être heureux, qui ne l'est pas, c'est-à-dire que souvent les gens font une espèce de bilan de leur existence et, si on parle d'une femme il leur manque un mari, il leur manque des enfants, il leur manque de l'argent, il leur manque un mode de vie, il leur manque un lieu. Mais là grosso modo elle a tout pour être heureuse pourtant ça ne fonctionne pas, et c'est quelque chose qui existe, c'est-à-dire que le bonheur est possible dans des conditions pas évidentes et le malheur est possible dans des conditions qui pourraient paraître l'être. J'aime bien ce personnage-là parce que ça me rappelle beaucoup de gens que je vois et qui ont besoin d'une espèce de prise de conscience sur eux-mêmes pour trouver leur vrai chemin.

Philippe : Elle a fait le choix de venir avec son époux, vivre et travailler dans ce théâtre, son mari Victor est un type adorable. Il est amoureux fou de sa femme et essaye de lui prouver chaque jour et puis il y a deux autres amies qui n'ont pas les mêmes âges, il y a Céline qui a quitté son mari, ça a été difficile, et puis il y a Juliette qui est une croqueuse d'hommes mais qui cherche le grand amour.

Gilles Legardinier : Parce qu'elle est jeune. En fait pour moi ce qui était important, c'était trois femmes. La base de leur relation, c'est une phrase de ma grand-mère qui, je pense, a déjà été dite par toutes les grand-mères : « si jeunesse savait ; si vieillesse pouvait » et en fait Juliette qui est à l'âge des passions, est à l'âge des illusions, elle est à l'âge des désillusions, du désir, de l'approche physique ; Céline elle, est après un premier échec, quelque chose qui l'a cassée et qui peu potentiellement la priver d'un futur, elle élève seule son fils. Et donc Eugénie qui semble avoir coché toutes les cases et pourtant des points de repères lui manquent, ses enfants notamment, un souffle qui lui manque. Et en fait, chacune ne peuvent pas s'en sortir par elles-mêmes parce que elles n'ont, soit pas les réponses soit pas les moyens. Quand elles se mettent à discuter, ou pire, à oeuvrer ensemble, elles trouvent ces moyens et ces réponses qui leur manquent et il y a une espèces de mécanique humaine qui se met en route et qui, pour moi, est jubilatoire.

Philippe : Il y a une belle amitié entre elles trois et des scènes assez cocasses, ce sont donc les trois héroïnes : Céline, Eugénie, Juliette. Une question comme ça en passant, comment choisissez vous les noms de vos personnages notamment Eugénie qui est assez suranné. C'est important le choix des prénoms pour vos personnages ?

Gilles Legardinier : Alors je ne l'explique pas mais c'est essentiel. Le prénom pour moi un prénom c'est une vibration, alors y a des gens qui expliquent qu'un prénom contient le caractère d'une personne, c'est comme les signes astrologiques. On donne à cela la valeur que l'ont veut mais ce qui est certain, c'est qu'il y a des points communs entre les personnes qui portent le même prénom et Eugénie pour moi c'est presque inclassable, qui porte le poids de l'impératrice, il y a quelque chose d'à la fois impressionant, impérial et suranné et je pense qu'Eugénie reviendra parce que c'est un prénom qui a une puissance intrinsèque qui est énorme et j'ai été heureux de me glisser dans l'image que ce prénom véhicule. Le choix du prénom est d'une importance capitale pour moi.

Philippe : Alors on parle beaucoup de ces trois femmes, de ces trois héroïnes mais les hommes sont très présents dans ce roman il y a une belle galerie de portraits puisque nous sommes au coeur même de ce théâtre, un théâtre que les promoteurs voudraient bien s'approprier pour le raser mais le propriétaire qui fait tout pour le sauver, et puis on va faire connaissance avec toute cette troupe dont Eugénie est en quelque sorte la marraine, elle est la gardienne des lieux, elle couve tout ce petit monde de ses soins, c'est une vrai famille, une famille qui se débat entre les rôles qu'elle joue sur scène et les rôles qu'elle joue dans la vie.

Gilles Legardinier : Tout à fait, j'ai choisi le théâtre pour moi c'est important, c'est pas tant qu'il soit comme beaucoup de lieux, comme un cliché guetté par les promoteurs, mais ces lieux là sont moins rentables, moins au centre des vies qu'ils ne l'étaient à une époque, et qu'on leur préfère des commerces. C'est la faiblesse de lieux qui ont eu un âge d'or, qui l'ont un peu perdu, parce que la société a évolué, d'autres médias sont nés. Je ne suis pas un passéiste, mais le théâtre est pour moi particulier. Je viens du cinéma, j'écris, j'aime la musique, la sculpture, tout ce qui véhicule les émotions. Le théâtre a une particularité, c'est qu'au moment de la performance, il y a un contact physique entre ceux qui jouent et le public, tout le monde est dans le même lieu. C'est le seul art qui permet ça. Et je trouve ça extraordinaire que des gens, la première fois, aient eu l'idée de venir exhiber leurs sentiments intimes, leur fragilité, leurs failles sur scène pour permettre à ceux qui restent dans l'ombre de les épier anonymement et de trouver des réponses à leurs vies. La démarche est extraordinaire, c'est la démonstration de ses faiblesses et de ses forces pour que d'autres puissent venir y picorer leurs réponses. Il n'y a que le théâtre qui permet ça. L'essence du théâtre, c'est une émotion, ce n'est pas une abstraction. C'est quelque chose de très concret. Les pièces où des gens tout nus se roulent dans des sacs poubelle en tenant une note.... Honnêtement ça me fait beaucoup rire, et je crois que ça n'est pas fait pour ça. Mais ça ne me touche pas alors que dans un Britanicus ou du Vaudeville, il y a toujours une scène dans laquelle il y a de la vie, quelque chose de joli, c'est après ça que je cours moi.

Philippe : Il me semble que par rapport à vos précédents romans, c'est celui où il y a vraiment une communauté avec cette troupe qui vit quasiment en permanence, avec cette figure tutellaire d'Eugenie. Il me semble qu'il y a peut être moins de solitude que dans vos précédents titres.

Gilles : Je pense que c'est le lieu qui donne cette illusion car ce sont tous des personnages très seuls au début. Que ce soit Eugénie, qui est en doute et très seule, même si elle a un mari aimant et qu'elle travaille là où elle veut travailler, elle porte une solitude qui est peut être plus marquée que pour beaucoup de mes personnages. Le lieu donne l'illusion, -et c'est tout l'art du théâtre- d'une vie et d'une communauté.

Philippe : Vous savez que vos livres font du bien, je le dis sans flagornerie... Ce sont des histoires qui nous ressemblent, ce sont des histoires du quotidien. Par fois est-ce difficile à assumer ?

Gilles : Je ne me suis pas mis de filtres avec une obligation de faire rire ou d'émouvoir. Le seul diapason c'est ma personnalité, ce que je suis. C'est à dire un mélange de sensibilité, d'envie de s'en sortir et de rire. Pour le reste, une fois que c'est fini, ça ne m'appartient plus, je suis déjà dans l'histoire d'après. Vous imaginez le maçon qui voudrait garder ses murs, ou le boulanger qui voudrait garder tout ses pains ? L'alchimie de l'écriture est ailleurs que dans la possession de l'histoire, elle est dans le partage de l'histoire, dans la transmission, surtout dans le véhicule que cette histoire peut permettre aux sentiments de voyager. Elle est là, la vraie utilité de la littérature.

Philippe : Un livre plein de bienveillance, plein d'humanité, d'humour et d'amour. C'est votre actualité Gilles Legardinier, ça s'appelle « Au moins une fois dans ma vie » vous êtes publié chez Flammarion.

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