Theresa Revay

Theresa Revay

La nuit du premier jour

Livre 00'07'43"

Philippe Chauveau :

Cette femme sur la couverture nous invite au voyage et à la réflexion, que pense-t-elle, cette femme sur la couverture? Elle symbolise Blanche. Blanche, c'est votre héroïne dans votre nouveau titre Theresa Revay, « la nuit du premier jour ». Nous sommes à la toute fin du 19ème siècle. Blanche vit à Lyon, dans le milieu des soyeux. Elle a épousé Victor, qui est un grand spécialiste de la soierie. Qui est-elle, cette femme qui vient de bien plus loin que la région lyonnaise ?

Theresa Revay :

C'est une fleur de l'Orient transplantée. C'est à dire qu'elle est française, mais elle est née au Liban, au mont Liban, puisque sa mère était partie là bas. Une petite fileuse de la Drôme qui était partie au milieu du 19ème siècle. Et elle est mariée. Son mariage est arrangé, voulu par ses parents à cet homme, Victor, qui est un soyeux, donc un fabricant négociant de Lyon qui est fou amoureux d'elle. Blanche se retrouve à 18 ans sur les quais de Saône et au pied de la colline de Fourvière et de la Croix-Rousse. Elle est profondément malheureuse.

Philippe Chauveau :

Elle entre dans une grande famille de soyeux, de soyeux lyonnais, mais elle ne va jamais réussir à vivre dans ce carcan de la bourgeoisie lyonnaise.

Theresa Revay :

Oui, parce que, comme souvent dans les villes, partout ailleurs dans le monde, il y a aussi des castes et la caste des soyeux est une armature de la société. Donc, il y a un certain nombre de familles qui se marient entre elles, qui perpétuent des traditions qui perpétuent une façon de voir la vie et le monde. Et tout cela est symbolisé par sa belle mère. Blanche ne peut pas s'intégrer parce qu'elle est indépendante d'esprit. Elle vient de loin et elle n'est pas du même milieu social. Elle est malheureuse en dépit de l'amour de son de son mari. Et d'ailleurs, elle dit qu'en fait, elle ne peut rien lui reprocher, excepté d'être lui même.

Philippe Chauveau :

Je vais donner quelques éléments de départ. Blanche et Victor sont donc mariés. Ils ont deux enfants, Oriane et Aurélien. Très souvent, Blanche va se réfugier chez un chez un tisserand dont elle est l'amie, qui lui même a un fils, Maxence, qui est le meilleur copain de Aurélien. Et puis, il y a la belle mère, la mère de Victor, qui règne en despote sur cette petite famille. Et puis, un jour, il y a cette rencontre avec Salim et pendant tout le roman, on va voyager entre Lyon et l'autre bout de la Méditerranée. Vous allez nous emmener à Damas, vous allez nous emmener à Beyrouth. Comment est née cette envie de parler des soyeux lyonnais et de toute cette histoire des bords de la Méditerranée?

Theresa Revay :

Alors, elle est venue parce que je voulais évoquer les liens entre la France et le Proche-Orient. J'ai découvert à ce moment le lien là entre le monde de la soie lyonnais et tout ce qui était la Grande Syrie. Et il se trouve que ma famille maternelle est lyonnaise et que mon arrière arrière grand-père était un soyeux et qu'il avait des magnanerie dans la Drôme. Et en fait, je rends hommage à toute ma famille lyonnaise à travers ce livre. Mais ce qui n'était pas du tout prévu quand j'ai eu envie, quand j'ai eu l'idée de cette histoire.

Philippe Chauveau :

Il y a bien sûr, comme dans tous vos précédents titres, le côté romanesque avec cette rencontre entre Blanche, Blanche et Salim, tous ces personnages qui vont être emportés par le vent de l'histoire. Mais justement, la grande histoire, elle est très importante dans ce roman, vous évoquez il y a Lyon et les soyeux. Il y a ces liens avec le Proche-Orient et c'est de soie qui vient, notamment de Syrie ou du Liban. Nous allons être au milieu du premier conflit mondial, mais pas que, puisque vous allez nous raconter aussi les difficultés de l'Empire ottoman avec l'indépendance de la Syrie, entre autres. Et curieusement, il y a une réflexion avec notre époque contemporaine. Là encore, comment avez-vous travaillé pour retrouver ces éléments sur Djamel Pacha, etc ? Comment avez-vous travaillé pour inclure tout ça dans votre histoire?

Theresa Revay :

D'après les livres d'histoire, les historiens, les mémorialistes, les amis libanais ou syriens que j'ai rencontrés qui m'ont parlé. C’est un travail de documentation, tout simplement, qui me prend toujours une bonne année, une année, une année et demie. Et à partir de là, je retire les éléments qui ne correspondent pas vraiment à mes personnages et j'essaye de conserver vraiment, l'armature et la substantifique moelle de toute cette immense documentation qui est en arrière plan. Et parce qu'il faut que le lecteur, ce n'est pas un livre d'histoire, c'est un roman avec des personnages, des histoires d'amour, des choix impossibles, mais le lecteur est transposé dans un autre univers. Il apprend en effet des choses que j'apprends moi-même quand je fais la documentation. Mais à partir de là, il faut que ça reste agréable à lire et divertissant.

Philippe Chauveau :

On va parler de la Première Guerre mondiale, mais je le disais, vous nous parlez aussi de ce conflit qui a peut-être moins de résonance pour nous qui sommes nous, qui sommes européens. Ce sont ces déchirements de l'Empire ottoman dans les années 1915-1920. Et qui conduise peut-être au fil des décennies, aux situations que l'on connaît aujourd'hui, il y avait cette volonté aussi peut-être, de faire écho à notre époque contemporaine racontant cette histoire.

Theresa Revay :

On ne peut pas comprendre aujourd'hui si on ne sait pas ce qui s'est passé hier. Et le hier en question, c'est surtout la Première et l'après Première Guerre mondiale. On ne peut pas comprendre le conflit monstrueux et dramatique au Proche-Orient si on ne se penche pas sur ce qui est arrivé en 1915, en 1916 et ensuite les traités de paix de 1918. Et la résonance aujourd'hui est en effet incroyable puisque la vie contemporaine, le monde contemporain ne fait que refléter les décisions qui ont été prises à l'époque.

Philippe Chauveau :

Il y a une double lecture dans ce roman. Parfois, nous sommes dans l'austérité de la bourgeoisie lyonnaise. Et puis, à d'autres moments, nous sommes dans le soleil de cet Orient que vous aimez tant. Il y a un côté très, très envoûtant. Il y a des pages de grande poésie puisque je ne trahit aucun secret. Blanche et Salim vont s'aimer. Blanche va le suivre à l'autre bout de la Méditerranée. Il y a cette fascination pour ce qui vous concerne de deux de ces pays du monde, ces pays de la Méditerranée.

Theresa Revay :

Oui, l'Orient fascine, c'est vrai. Et puis, pour une romancière, c'est un patchwork formidable à décrire et je crois que c'est ce qui m'attire dans mes livres. Et c'est vrai que l'Orient est fascinant. Et puis, c'est le cœur du monde. Nous, en Occident, on croit qu'on a toujours tout décidé et qu'on a toujours été au cœur du monde, mais pas du tout. Tout vient d'Orient. C'est la terre de l'origine du monde. Philosophiquement, d'un point de vue métaphysique, philosophique, donc, parlons en.

Philippe Chauveau :

Blanche, Salim, Oriane, Maxence, Aurélien, Armand et tous les autres. Voilà une histoire formidable. Un roman plein d'aventures, plein de panache, d'histoires très romanesques, avec la grande histoire en toile de fond, tout cela porté par une plus grande sensibilité. Ça s'appelle la nuit du premier jour. C'est votre actualité Theresa Revay, vous êtes publié chez Albin Michel. Merci beaucoup.

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