Françoise Bourdin

Françoise Bourdin

Le choix des autres

Portrait 7'43

Philippe : Bonjour Françoise Bourdin, bienvenue.

Francoise : Bonjour

Philippe : Le choix des autres, c'est votre nouveau titre, c'est votre actualité chez Belfond. Je fais un très rapide résumé, je survole votre carrière d'auteure. 1971 Les soleils mouillés, gros succès, ensuite vous vous mettez un peu en retrait pour construire votre vie personelle, et vous revenez en librairie au début des années 90 avec Mano a mano. Et puis ensuite, quasiment un titre par an avec un succès qui ne s'est jamais démenti. Lorsque vous repensez à ce beau parcours d'auteure, à la place que vous occupez dans les librairies, dans les bibliothèques, médiathèques... Est-ce qu'il y a des images qui reviennent ?


Francoise : Oui, des débuts, en effet, très jeune, très faciles qui me font plaisir mais qui quelque part ne m'interessent presque pas parce que c'est normal et parce que quand on a 20ans tout est normal... Retour à la publication un peu plus difficile, un petit peu plus hardue.. Beaucoup de refus, de frustratiion.. Et quand enfin Mano a mano est pris par Denoël (éditions), en même temps La Table Ronde (éditions) m'appelle pour me prendre un livre. En l'espace d'une semaine j'ai deux coup de telephone de deux éditeurs alors que ça fait des années que j'en cherche un seul ! Je me souviens d'un moment de grande joie. Et aujourd'hui, quand je me vois à la Fnac ou que je parle avec des lecteurs, je me dis que tout ce chemin parcouru m'épate moi-même !

Philippe : Vous pensez à la place de vos livres dans 20 ans, dans 40 ans, dans 50 ans ?..

Francoise : Alors je pense ques les romanciers n'ont pas forcément, après leur vie, une place évidente. Je pense qu'il y a beaucoup de gens qui écrivent très bien et qui prendront ma place comme moi j'ai pris la place de quelqu'un d'autre. Mais peu importe. Ce qui m'importe c'est le plaisir que je donne aujourd'hui, ce qui m'importe c'est de savoir qu'il y a des gens qui, au lieu d'éteindre leur lumière à 11h du soir, ne pourront l'éteindre qu'à 2h du matin, c'est ce qu'ils me disent. Et ça, ça me fait rêver.

Philippe : Lorsque vous écrivez, lorsque vous pensez à vos personnages, avez vous la sensation de donner ses lettres de noblesse à ce qu'on appelle le roman populaire et qui parfois est un peu décrié, est ce que c'est une forme de militantisme, de combat?

Francoise : Complètement, c'est une vocation. Le mot est juste, c'est un militantisme. Je revandique cette littérature que j'ai adoré jeune, cette littérature de nos romanciers français qui écrivaient des histoires de famille. On peut penser aux grandes familles de Maurice Druon, à tout ce qu'a pu écrire Troyat, Bazin, François Mauriac. Et c'était à ce moment la une littérature qu'on ne jugeait pas de manière péjorative. Je ne vois pas pourquoi aujourd'hui cette littérature qui parle aux gens d'eux mêmes, de leurs histoires de familles, a une espèce de connotation un petit peu méprisante... On peut écrire des histoires de familles en les écrivant bien, et c'est pas de la littérature à l'eau de rose. Je revandique vraiment le fait que les gens aiment ça, les gens aiments s'identifier dans un livre, ils aiment retrouver des histoires de familles, et il n'y a vraiment rien de méprisable là dedans.

Philippe : Alors justement quelque chose m'intrigue, et c'est tout le charme de vos romans, à chaque fois vous nous parlez de nous, des histoires qui pouraient être les notres, et à chaque fois vous arrivez à nous surprendre. Comment faîtes vous pour trouver tous ces personnages, toutes ces histoires ? Vous êtes une fine observatrice ? Vous glanez dans les faits divers ?

Françoise : Je suis un peu comme Didier Decoin, il a écrit un très beau Dictionnaire amoureux des Faits divers. J'écoute. J'écoute beaucoup. Je peux écouter des conversations de comptoir, écouter les gens parler dans les transports en communs.. Toutes les histoires ont une résonnance chez moi. Avec des bribes de conversation entendues je peux monter tout un roman dans ma tête, je fais vraiment éponge. Quand je lis un article de journal, j'ai des idées de romans. Je considère que j'ai beaucoup de chance, mon imagination démarre au quart de tour.

Philippe : Avez vous conscience, Françoise Bourdin, lorsque vous écrivez, que vos romans peuvent aussi aider ? Puisque vous racontez des histoires qui pourraient être nos histoires, des personnages qui nous ressemblent. Et même si très souvent vos romans se terminent bien, ce n'est pas trahir un secret. Vos personnages sont souvent confrontés à des drames personnels, et vos romans peuvent aider justement à supporter les misères du quotidien. Vous en avez conscience quand vous écrivez ?

Françoise : Tout à fait, je sais qu'à travers les romans je donne une notion d'espoir, qu'on peut toujours s'en sortir. Ce n'est pas une volonté chez moi d'avoir un message, c'est juste en racontant une histoire de dire « oui il peut y avoir une issue heureuse ». Un roman n'est pas obligé de se terminer de manière noire ou dans un bain de sang. Bien sûr que dans la vie on peut aussi s'en sortir, trouver des chemins pour s'échapper. Et particulièrement, sans être une féministe le couteau entre les dents, je défends souvent les femmes en disant « vous pouvez vous en sortir », je pense que c'est important, c'est ce que je pense profondément en tant qu'individu, c'est normal que ça transparaisse à travers mes écrits.

Philippe : L'autre grande force de votre écriture, c'est qu'il y a vos personnages, et il y a aussi le décors qui est un personnage à part entière. Vous nous faites voyager. Cette fois ci vous nous emmenez en pleine montagne. Pourquoi mettez vous un point d'honneur à choisir des décors qui ont leurs importances dans l'intrigue.

Françoise : Je pense qu'une histoire qui se déroule en montagne ne pourrait pas se dérouler en plaine. L'angoisse que met l'altitude, la montagne, la neige, la sensation d'isolement, qui me permet à moi de mettre une dose de suspens ; je ne pourrais pas l'avoir dans un autre décors. Le décors pour moi est important, c'est l'une des premières choses que je choisis. Quand je pense au prochain roman, je pense au thème que j'ai envie de développer (ici c'est la jalousie) et le décors tout de suite après. Où ? Où ça se passe ? Quelle couleur je vais donner à mon livre en choisissant telle ou telle région pour ses caractéristiques propres. C'est très important pour moi le décors. Et là en effet dans Le Choix Des Autres, le chalêt est un personnage à part entière.

Philippe : Lorsque vous êtes à votre table de travail dans votre maison en Normandie, au milieu de votre campagne et de vous animaux, que ressentez vous, qu'éprouvez vous lorsque vous êtes comme ça, toute seule avec votre manuscrit et vos personnages ?

Francoise : Ce n'est pas un métier, c'est un bonheur ! Quand je déscend le matin dans mon bureau, et que je replonge dans mon histoire, je me dis « alors ? Où ils en étaient ? », c'est un grand bonheur ! Je vis leur histoire en fait, il y a un moment ou c'est eux qui conduisent l'histoire, il y a un moment où c'est moi, c'est toujours un plaisir, une jubilation renouvelée.

Philippe : Un bonheur que vous savez nous faire partager. Votre actualité, Le choix des autres, chez Belfond. Je voudrais aussi citer ce livre qui sort également chez Belfond, une réédition de deux romans que vous aviez publié en 2001, Le secret de Clara et L'héritage de Clara, que vous proposez dans cette belle édition reliée chez votre éditeur fétiche Belfond.

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  • Est-il encore besoin de présenter Françoise Bourdin ? Toujours en bonne place en librairie, au rythme d'un livre par an, elle a su fidéliser un large public et redonner ses lettres de noblesse au roman populaire. Avec des personnages qui nous ressemblent, des histoires qui pourraient être les nôtres, des décors qui sont ceux de notre quotidien, Françoise Bourdin nous parlent de nous. Dans ces romans, l'amour, la trahison, la jalousie, la famille, l'amitié sont au rendez-vous. Et par sa plume, alerte, incisive, efficace, l'auteur...Web TV Culture lui rend hommage de Françoise Bourdin - Présentation - Suite
    Philippe : Bonjour Françoise Bourdin, bienvenue.Francoise : BonjourPhilippe : Le choix des autres, c'est votre nouveau titre, c'est votre actualité chez Belfond. Je fais un très rapide résumé, je survole votre carrière d'auteure. 1971 Les soleils mouillés, gros succès, ensuite vous vous mettez un peu en retrait pour construire votre vie personelle, et vous revenez en librairie au début des années 90 avec Mano a mano. Et puis ensuite, quasiment un titre par an avec un succès qui ne s'est jamais démenti. Lorsque vous repensez...Web TV Culture lui rend hommage de Françoise Bourdin - Portrait - Suite
    Philippe : Dans ce nouveau titre, Françoise Bourdin, Le choix des autres, et la couverture est très significative. Vous nous entraînez en pleine montagne. Nous sommes dans la région de Gap à la Joue du Loup, dans le massif du Dévoluy. Je le précise car ce décors va être important dans votre intrigue. Nous allons faire connaissance avec deux couples, il y a Virgile et Philippine qui vivent ensemble, et ils partagent un très grand chalêt, avec Clémence et Lucas qui ont aussi leurs deux petites filles. Tout ce petit monde vie en...Web TV Culture lui rend hommage de Françoise Bourdin - Livre - Suite