En 1962 sort sur les écrans le film d'Orson Welles « Le procès » interprété par Anthony Perkins, Romy Schneider, Jeanne Moreau et Orson Welles lui-même. Celui-ci s'est lancé l'année précédente dans l'adaptation cinématographique du roman éponyme de Kafka. Et dans ce document, on découvre la précision avec laquelle le réalisateur prépara ce tournage. Ce manuscrit contient 91 croquis en couleurs et des notes de la main de Welles détaillant les décors dans lesquels évolueront les acteurs. Tout en respectant l'écriture de Kafka, Welles a cherché à personnaliser son film, étant lui-même très engagé politiquement et désireux de mettre en lumière les abus de la justice. Dans Le Procès, Orson Welles a choisi de créer des décors futuristes, absolument inédits, aménageant l'espace pour filmer à sa guise entre plongées et contre-plongées, décadrages et lumières contrastées. Sur les 91 feuillets de diverses tailles, aux feutres en couleurs ou ombrés au crayon noir, Orson Welles a croqué ces lieux et les a annotés rapidement, le plus souvent à la main, parfois à la machine à écrire. Il s'agit du tout premier jet de son projet de décors. On y découvre le tribunal, les rues, l'église, la chambre d'interrogatoire, l'appartement des avocats, la bibliothèque, et la chambre du héros principal, Joseph K. La préparation du tournage sera compliquée, les points d'interrogation témoignant du stade tout à fait primitif de l'élaboration du projet. Orson Welles travaillant toujours dans l'urgence, faute de moyens, la plupart de ces croquis serviront de projet abouti. Nombreuses sont les notes, destinées à son chef décorateur, trahissant le manque cruel de finances du réalisateur, obligé pour cela de commander des décors à matériaux peu coûteux, astucieux, amovibles, réutilisables si possible. Au final, un film âpre, remarquable, oppressant dont les scènes capitales, au tribunal, seront tournées dans la Gare d'Orsay alors désaffectée.