Dominique Barbéris

Dominique Barbéris

L'année de l'Éducation sentimentale

Livre 5'01"

Philippe Chauveau : Dans ce nouveau roman, nous sommes au mois d'août, et nous avons Muriel qui, sur un quai de gare de province, attend deux amies de jeunesse, Anne et Florence. Elles viennent passer quelques jours chez cette amie, on va ensuite les retrouver dans le jardin de la maison à la campagne. C'est le point de départ de votre joli et mélancolique roman. Qui sont ces trois femmes?

Dominique Barbéris : Ce sont des amies de fac qui ont une cinquantaine d'années, qui se sont perdues de vues et qui, invitées par Muriel, vont trouver l'occasion de se revoir et d'échanger, de se rappeler quelques souvenirs.

Philippe Chauveau : Ce sont ces amis que l'on a gardé en mémoire, que l'on est heureux de retrouver mais très vite on n'a plus grand chose à se dire parce que le temps a passé, les souvenirs ne sont plus les mêmes, parfois il y a même quelques rivalités qui resurgissent. Il y a ces vacances en Italie, ce professeur de fac un peu trop séduisant face à ces jeunes filles et il y a aussi parfois des souvenirs douloureux qui refont surface.

Dominique Barbéris : C'est vrai qu'elles évoquent avec beaucoup de nostalgie un voyage en Italie, des cours qu'elles ont suivis et notamment un cours sur « L’Education sentimentale » qui donne son titre au roman. Très vite apparaissent toutes sortes de petites choses qui les ont opposées, qui les ont rendues rivales, et tout cela va ressurgir dans la conversation au point qu'elles s'aperçoivent qu'elles n'ont plus grand chose à se dire ou qu'elles n'arrivent pas à se dire beaucoup de choses.

Philippe Chauveau : Il y a beaucoup de non-dits entre ces trois femmes

Dominique Barbéris : Voilà, beaucoup de non-dits. Il n'y a pas beaucoup d'intersections entre notre monde et celui des autres, en tout cas la conversation fait surgir toutes sortes de petites failles et d'incompréhensions. Avec ces trois femmes, il y a le fils de l’une d'entre elles, Hugo, qui est un jeune homme charmant ; il représente pour elles la jeunesse qu'elles ont perdue. Elles sont heureuses d'être avec lui.

Philippe Chauveau : A la lecture de ce roman j'ai retrouvé l'esprit des films de Claude Sautet. Avec ces personnages qui ont des psychologies très fouillées, détaillées. C'est ce que vous aimez faire, aller dans la psychologie de vos héros?

Dominique Barbéris : C'est vrai, il ne se passe pas grand-chose, tout tient dans la conversation, dans ce dialogue qui fait mesurer le passage du temps.

Philippe Chauveau : Comme dans chacun de vos romans, l'ambiance est importante, nous sommes dans une maison à la campagne avec des prés, des champs, une forêt tout autour, la météo aussi a une importance dans l'intrigue. Et vous aimez nous raconter des ambiances, des détails, les premières gouttes de cette pluie chaude d'été, cette poire qui tombe dans l'herbe... Comment travaillez-vous ces petits détails du quotidien qui font votre roman?

Dominique Barbéris : Je travaille beaucoup la sensation. Il s'agit de faire ressentir pleinement cette nuit d'été, il y a cette présence de la nature qui est très difficile à dire et qui est au coeur de mon travail, c'est vrai.

Philippe Chauveau : Lorsque vous évoquez Flaubert, « L'éducation sentimentale », il y a ce professeur de faculté qui dit du roman de Flaubert : « un roman dans lequel rien ne se passe. Rien n'arrive... Pas de sujet. Rien de décisif, la vie, n'est-ce pas, la vie... » Est-ce que votre roman ce n'est pas aussi un peu ça?

Dominique Barbéris : Oui c'est un peu une manière de parler de mon roman même si je n'ai pas réécrit « L'éducation sentimentale », je n'ai pas du tout cette ambition là. Mais c'est très exactement ce que je cherche, cerner la vie dans ce qu'elle a de plus ordinaire, d'amener à ces points névralgiques où quelque chose de ce que nous sommes, de ce que nous vivons, devient sensible.

Philippe Chauveau : Une beauté mélancolique, ce serait une bonne définition de votre roman?

Dominique Barbéris : J'aimerais bien oui.

Philippe Chauveau : Alors on va dire ça, c'est ainsi que je l'ai lu. C'est à la fois beau et mélancolique, « L'année de l'Éducation sentimentale », chez Gallimard. Merci beaucoup.

Dominique Barbéris : Merci.

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  • Voilà une auteur discrète mais qui, doucement, se fait un nom. Dominique Barbéris a publié son 1er roman en 1996 et au fil de ses livres, elle tisse ce que l’on peut appeler une œuvre. « L’heure exquise », « Les kangourous », « Ce qui s’enfuit » ou plus récemment « La vie en marge » sont quelques-uns de ses titres. A chaque fois, des personnages à la psychologie ciselée, au bord d’un abîme, en butte avec des souvenirs et toujours, des paysages, des sensations, la description d’émotions subtiles et...Dominique Barbéris de Dominique Barbéris - Présentation - Suite
    Philippe Chauveau : Bonjour Dominique Barbéris, merci d'être avec nous. Dominique Barbéris : Bonjour. Philippe Chauveau : Votre actualité, « L'année de l'Éducation sentimentale », aux éditions Gallimard. Vous tracez votre sillon dans l'univers littéraire. Pourquoi ce goût de l'écrit dans votre vie? Dominique Barbéris : Pour beaucoup de raisons ! J'ai fait des études de lettre, j'enseigne, d'ailleurs. Depuis toujours cela m'accompagne, cette idée d'écrire. J'ai mis du temps avant de proposer quelque chose et du temps...Dominique Barbéris de Dominique Barbéris - Portrait - Suite
    Philippe Chauveau : Dans ce nouveau roman, nous sommes au mois d'août, et nous avons Muriel qui, sur un quai de gare de province, attend deux amies de jeunesse, Anne et Florence. Elles viennent passer quelques jours chez cette amie, on va ensuite les retrouver dans le jardin de la maison à la campagne. C'est le point de départ de votre joli et mélancolique roman. Qui sont ces trois femmes? Dominique Barbéris : Ce sont des amies de fac qui ont une cinquantaine d'années, qui se sont perdues de vues et qui, invitées par Muriel, vont...Dominique Barbéris de Dominique Barbéris - Livre - Suite