Né à Toulon en 1944, Marcel Rufo est resté fidèle à ses racines. Et même si ses activités l'amènent régulièrement à Paris, c'est à Marseille qu'il passe le plus clair de son temps.
Après avoir pris une large part à la création de « La Maison de Solenn », à l'hôpital Cochin à Paris, il est aujourd'hui directeur médical de l'espace méditerranéen de l'adolescence à l'hôpital Salvator.
Les maux, les désordres, les mal-être de l'adolescence, sont les combats qu'il mène depuis des années.
Très tôt Marcel...
Tiens bon ! de Marcel Rufo - Présentation - Suite
Philippe Chauveau :Bonjour Marcel Rufo. Nous sommes ensemble à l'occasion de la sortie chez Anne Carrière de votre nouveau livre « Tiens bon ! » C'est vrai que vous avez souvent écrit, raconté votre métier, les gens que vous rencontriez. J'aimerais revenir sur votre parcours. Le Sud compte beaucoup dans votre vie. Vous êtes natif de Toulon, vous vivez à Marseille. Que représente quoi le Sud dans votre vie de tous les jours ?Marcel Rufo :Cela représente le fait par exemple que Paris n'a qu'un défaut, celui de ne pas être au...
Tiens bon ! de Marcel Rufo - Portrait - Suite
Philippe Chauveau :Marcel Rufo, votre actualité chez Anne Carrière, « Tiens bon ! ». J'ai envie de dire que c'est un petit livre, mais alors dedans il y a tout ! Il y a la vie, la souffrance, le rire, la joie, les larmes. Ce sont sept parcours, sept rencontres de votre vie professionnelle. Comment avez-vous construit ce livre ?Marcel Rufo :J'ai dû faire à peu près 40 000 consultations dans ma vie, ce qui est énorme. Et en choisir sept, c'est assez difficile. Mais les sept n'ont pas été très compliquées à choisir. Ce sont sept...
Tiens bon ! de Marcel Rufo - Le livre - Suite
Marcel Rufo
Tiens bon !
Présentation 1'16Né à Toulon en 1944, Marcel Rufo est resté fidèle à ses racines. Et même si ses activités l'amènent régulièrement à Paris, c'est à Marseille qu'il passe le plus clair de son temps.
Après avoir pris une large part à la création de « La Maison de Solenn », à l'hôpital Cochin à Paris, il est aujourd'hui directeur médical de l'espace méditerranéen de l'adolescence à l'hôpital Salvator.
Les maux, les désordres, les mal-être de l'adolescence, sont les combats qu'il mène depuis des années.
Très tôt Marcel Rufo, au-delà de son titre de pédopsychiatre, a voulu descendre du piédestal de la médecine pour s'adresser au plus grand nombre. Présent en radio et en télévision, on lui doit une trentaine d'ouvrages dans lesquels il parle avec des mots simples et efficaces de la difficulté de l'enfance et de l'adolescence.
Avec son nouveau titre « Tiens bon ! » publié chez Anne Carrière, Marcel Rufo dévoile sept cas qui l'ont particulièrement marqué dans son parcours professionnel. Et si certains de ces cas se révèlent douloureux, le livre est pourtant plein de vie, plein d'espoir.
Un témoignage capital par un homme pour qui le sourire et l'écoute sont sans doute les premières armes face à la maladie. « Tiens bon ! » c'est donc le nouveau livre de Marcel Rufo, publié aux éditions Anne Carrière.
Marcel Rufo qui est avec nous sur Web TV Culture.
Né à Toulon en 1944, Marcel Rufo est resté fidèle à ses racines. Et même si ses activités l'amènent régulièrement à Paris, c'est à Marseille qu'il passe le plus clair de son temps.
Après avoir pris une large part à la création de « La Maison de Solenn », à l'hôpital Cochin à Paris, il est aujourd'hui directeur médical de l'espace méditerranéen de l'adolescence à l'hôpital Salvator.
Les maux, les désordres, les mal-être de l'adolescence, sont les combats qu'il mène depuis des années.
Très tôt Marcel Rufo, au-delà de son titre de pédopsychiatre, a voulu descendre du piédestal de la médecine pour s'adresser au plus grand nombre. Présent en radio et en télévision, on lui doit une trentaine d'ouvrages dans lesquels il parle avec des mots simples et efficaces de la difficulté de l'enfance et de l'adolescence.
Avec son nouveau titre « Tiens bon ! » publié chez Anne Carrière, Marcel Rufo dévoile sept cas qui l'ont particulièrement marqué dans son parcours professionnel. Et si certains de ces cas se révèlent douloureux, le livre est pourtant plein de vie, plein d'espoir.
Un témoignage capital par un homme pour qui le sourire et l'écoute sont sans doute les premières armes face à la maladie. « Tiens bon ! » c'est donc le nouveau livre de Marcel Rufo, publié aux éditions Anne Carrière.
Marcel Rufo qui est avec nous sur Web TV Culture.
Marcel Rufo
Tiens bon !
Portrait 3'50Philippe Chauveau :
Bonjour Marcel Rufo. Nous sommes ensemble à l'occasion de la sortie chez Anne Carrière de votre nouveau livre « Tiens bon ! » C'est vrai que vous avez souvent écrit, raconté votre métier, les gens que vous rencontriez. J'aimerais revenir sur votre parcours. Le Sud compte beaucoup dans votre vie. Vous êtes natif de Toulon, vous vivez à Marseille. Que représente quoi le Sud dans votre vie de tous les jours ?
Marcel Rufo :
Cela représente le fait par exemple que Paris n'a qu'un défaut, celui de ne pas être au bord de la mer. Cela représente aussi l'idée d'une sorte de forum, d'agora, de parler dans les bars, sur les marchés, d'écouter des histoires. Je crois que le Sud est un pays d'histoires, de légendes, de touristes qui viennent écouter des histoires et raconter les leurs. C'est ça le Sud.
Philippe Chauveau :
Et puis, il y a une autre passion, c'est le rugby.
Marcel Rufo :
Vous avez cité Toulon, donc le Rugby Club Toulonnais. Mon père, qui était très modeste puisqu'il vendait sur le marché de Toulon, adorait ce jeu compliqué. Vous vous rendez compte, pour un enfant, ce qu'était ce papa qui n'avait pas le certificat d'étude, mais qui s'intéressait à un jeu terriblement complexe.
Philippe Chauveau :
La psychiatrie, la pédopsychiatrie, qu'est-ce qui vous a donné envie ?
Marcel Rufo :
Je crois que je suis né pédopsychiatre. Quand j'étais petit, je partais en Italie avec ma grand-mère qui m'avait pris sous sa coupe. C’était une grand-mère assez puissante et elle m'avait pris comme esclave désigné de ses voyages en Italie et je l'accompagnais sans arrêt. Et je me penchais à la fenêtre des trains, je prenais une escarbille, c'était le temps des locomotives à vapeur, donc je pleurais et elle me disait « mais pourquoi tu pleures ? ». Et moi, je ne pouvais pas dire que je m'étais penché car c'était dangereux de se pencher et interdit. Et je lui disais « Oh je vois mémé, des chaumières qui s'allument et des gens auxquels je ne parlerai jamais». Alors, elle me tirait sur son sein et me disait « quel brave petit ». Pédopsychiatre !
Philippe Chauveau :
Et alors après, le parcours.
Marcel Rufo :
Après, coup de chance. Honnêtement, je voulais être journaliste sportif et chroniquer tout le reste de ma vie le rugby. Et donc je voulais m'inscrire à Science Po. Et cet été là, j'étais marin sur le bateau de Von Karajan. C'est mon autre passion, le rugby et la voile ! On avait fait croire au maestro qui gagnait sa vie à Salzbourg, puisqu'il fallait bien qu'il travaille, que les moteurs étaient en panne et on est remonté de Grèce doucement, mais très doucement, en passant plus d'un mois et demi sur cette merveille de « classe zéro » et quand je suis arrivé, Sciences Po avait clôt ses inscriptions et donc, je me suis inscrit en médecine, c'était la dernière fac ouverte. Et après, Psy évidemment.
Philippe Chauveau :
Donc tout ça, c'est un peu par hasard finalement ?
Marcel Rufo :
Hasard et chance ! Il n'y a pas que du hasard dans la vie, il y a aussi le fait de faire des difficultés une chance, une force. Et vous voyez, ça correspond bien à la psy de dire que rien n'est jamais joué, que tout se rejoue et qu’on peut toujours tout comprendre et tout interpréter. Alors, on n'y arrive pas toujours mais en tout cas, il faut essayer.
Philippe Chauveau :
Vous qui êtes souvent en librairie pour des dédicaces ou qui recevez beaucoup de courriers suite à vos émissions radio ou télé, quelle est la plus belle récompense ou le mot que l'on puisse vous dire et qui vous donne raison d’avoir choisi ce métier là ?
Marcel Rufo :
J'ai eu il y a quelques années le meilleur souvenir à ce propos. Je vais en Corse en voiture, c'est une autre de mes capacités à survivre, la Corse ; il y a la voile, le rugby et la Corse ! Et un étudiant qui gagnait sa vie l'été en faisant passer les voitures m'a dit en sortant un bouquin : « Rufo ! Oedipe toi-même ». Il me dit « Je vais faire ce métier ». Et puis, il passe un coup de fil. Moi, je suis ravi et une jeune fille m'arrête et elle sort un bouquin « Frères et soeurs » et elle dit : « Moi aussi, je veux faire ce métier ». C'était fabuleux ! Deux étudiants en traversant en voiture devant un ferry qui me disent « jJ veux faire ton métier parce que j'ai lu un de tes bouquins », mission accomplie...
Philippe Chauveau :
Merci beaucoup Marcel Rufo. Votre actualité, c'est donc aux éditions Anne Carrière, « Tiens bon ! »
Philippe Chauveau :
Bonjour Marcel Rufo. Nous sommes ensemble à l'occasion de la sortie chez Anne Carrière de votre nouveau livre « Tiens bon ! » C'est vrai que vous avez souvent écrit, raconté votre métier, les gens que vous rencontriez. J'aimerais revenir sur votre parcours. Le Sud compte beaucoup dans votre vie. Vous êtes natif de Toulon, vous vivez à Marseille. Que représente quoi le Sud dans votre vie de tous les jours ?
Marcel Rufo :
Cela représente le fait par exemple que Paris n'a qu'un défaut, celui de ne pas être au bord de la mer. Cela représente aussi l'idée d'une sorte de forum, d'agora, de parler dans les bars, sur les marchés, d'écouter des histoires. Je crois que le Sud est un pays d'histoires, de légendes, de touristes qui viennent écouter des histoires et raconter les leurs. C'est ça le Sud.
Philippe Chauveau :
Et puis, il y a une autre passion, c'est le rugby.
Marcel Rufo :
Vous avez cité Toulon, donc le Rugby Club Toulonnais. Mon père, qui était très modeste puisqu'il vendait sur le marché de Toulon, adorait ce jeu compliqué. Vous vous rendez compte, pour un enfant, ce qu'était ce papa qui n'avait pas le certificat d'étude, mais qui s'intéressait à un jeu terriblement complexe.
Philippe Chauveau :
La psychiatrie, la pédopsychiatrie, qu'est-ce qui vous a donné envie ?
Marcel Rufo :
Je crois que je suis né pédopsychiatre. Quand j'étais petit, je partais en Italie avec ma grand-mère qui m'avait pris sous sa coupe. C’était une grand-mère assez puissante et elle m'avait pris comme esclave désigné de ses voyages en Italie et je l'accompagnais sans arrêt. Et je me penchais à la fenêtre des trains, je prenais une escarbille, c'était le temps des locomotives à vapeur, donc je pleurais et elle me disait « mais pourquoi tu pleures ? ». Et moi, je ne pouvais pas dire que je m'étais penché car c'était dangereux de se pencher et interdit. Et je lui disais « Oh je vois mémé, des chaumières qui s'allument et des gens auxquels je ne parlerai jamais». Alors, elle me tirait sur son sein et me disait « quel brave petit ». Pédopsychiatre !
Philippe Chauveau :
Et alors après, le parcours.
Marcel Rufo :
Après, coup de chance. Honnêtement, je voulais être journaliste sportif et chroniquer tout le reste de ma vie le rugby. Et donc je voulais m'inscrire à Science Po. Et cet été là, j'étais marin sur le bateau de Von Karajan. C'est mon autre passion, le rugby et la voile ! On avait fait croire au maestro qui gagnait sa vie à Salzbourg, puisqu'il fallait bien qu'il travaille, que les moteurs étaient en panne et on est remonté de Grèce doucement, mais très doucement, en passant plus d'un mois et demi sur cette merveille de « classe zéro » et quand je suis arrivé, Sciences Po avait clôt ses inscriptions et donc, je me suis inscrit en médecine, c'était la dernière fac ouverte. Et après, Psy évidemment.
Philippe Chauveau :
Donc tout ça, c'est un peu par hasard finalement ?
Marcel Rufo :
Hasard et chance ! Il n'y a pas que du hasard dans la vie, il y a aussi le fait de faire des difficultés une chance, une force. Et vous voyez, ça correspond bien à la psy de dire que rien n'est jamais joué, que tout se rejoue et qu’on peut toujours tout comprendre et tout interpréter. Alors, on n'y arrive pas toujours mais en tout cas, il faut essayer.
Philippe Chauveau :
Vous qui êtes souvent en librairie pour des dédicaces ou qui recevez beaucoup de courriers suite à vos émissions radio ou télé, quelle est la plus belle récompense ou le mot que l'on puisse vous dire et qui vous donne raison d’avoir choisi ce métier là ?
Marcel Rufo :
J'ai eu il y a quelques années le meilleur souvenir à ce propos. Je vais en Corse en voiture, c'est une autre de mes capacités à survivre, la Corse ; il y a la voile, le rugby et la Corse ! Et un étudiant qui gagnait sa vie l'été en faisant passer les voitures m'a dit en sortant un bouquin : « Rufo ! Oedipe toi-même ». Il me dit « Je vais faire ce métier ». Et puis, il passe un coup de fil. Moi, je suis ravi et une jeune fille m'arrête et elle sort un bouquin « Frères et soeurs » et elle dit : « Moi aussi, je veux faire ce métier ». C'était fabuleux ! Deux étudiants en traversant en voiture devant un ferry qui me disent « jJ veux faire ton métier parce que j'ai lu un de tes bouquins », mission accomplie...
Philippe Chauveau :
Merci beaucoup Marcel Rufo. Votre actualité, c'est donc aux éditions Anne Carrière, « Tiens bon ! »
Marcel Rufo
Tiens bon !
Le livre 4'12Philippe Chauveau :
Marcel Rufo, votre actualité chez Anne Carrière, « Tiens bon ! ». J'ai envie de dire que c'est un petit livre, mais alors dedans il y a tout ! Il y a la vie, la souffrance, le rire, la joie, les larmes. Ce sont sept parcours, sept rencontres de votre vie professionnelle. Comment avez-vous construit ce livre ?
Marcel Rufo :
J'ai dû faire à peu près 40 000 consultations dans ma vie, ce qui est énorme. Et en choisir sept, c'est assez difficile. Mais les sept n'ont pas été très compliquées à choisir. Ce sont sept histoires dans leur progression, la première redoutable et puis la dernière interactive et qui ont marqué ma vie et qui m'ont transformé. Ce sont sept rencontres avec des patients et leurs familles qui ont modifié ma façon d'être pédopsychiatre. Ce ne sont pas uniquement des histoires, c'est aussi comment un pédopsychiatre évolue dans sa pratique grâce à la clinique.
Philippe Chauveau :
Il y a sept histoires avec un personnage central à chaque fois qui est le patient – des jeunes, des adolescents, des enfants pour la plupart d'entre eux – et puis il y a aussi tous les gens qui gravitent autour, que ce soit la famille, les proches, les amis et on se rend compte que c'est important ces personnages qui gravitent autour.
Marcel Rufo :
Oui ! C'est la question : le psychothérapeute est-il seul dans la confrontation singulière de son patient et de lui, d'inconscient à inconscient, dans le plus grand classicisme psychanalytique ? Honnêtement, je crois pas. Je crois que les gens qui vous sont confiés ont une famille, une histoire, un passé, des possibilités ou non d'avenir et tout cela, ça joue beaucoup. Et en plus, un pédopsychiatre tout seul ça n'existe pas. Il a besoin d'une équipe, d'infirmiers, de psychologues, d'aides-soignants, des alliances les plus incroyables. Quand je vous dis ça, je pense à un garçon de « La Maison de Soleen », à l'hôpital Cochin, que j'ai dirigée quelques années, qui lors d'une Fête de la Musique me dit « Je peux y être moi ? ». C'était un type qui gardait l'hôpital. C'était un formidable guitariste. Depuis on l'a mis à l'école de musique de l'établissement. Vous voyez, c'est cette richesse des gens ensemble qui nous permet d'aller plus loin dans une sorte de relance psychique, culturelle, une relance du plaisir du patient malade.
Philippe Chauveau :
Cette histoire, et tous les autres patients que vous avez côtoyés jusqu'à aujourd'hui, vous ont-ils tous fait grandir quelque part ?
Marcel Rufo :
J'espère quand même que je garde une névrose infantile active. J'espère que je reste encore l'enfant que j'ai été parce qu'il y a deux types de personnes sur Terre. Il y a ceux qui se souviennent qu'ils ont été des enfants et ceux qui l'ont oublié. Evidemment, il faut basculer dans la première catégorie. Bien sûr que ça me fait grandir, mais pas trop j'espère ! L'autre jour, en consultation télévisée avec des étudiants du service, je fais un passage à l'acte incroyable. Les parents étaient un peu pénibles, un peu casse-pied et le gosse très sympathique. Je ne savais pas comment m'en sortir de ces parents qui étaient très agressifs envers lui, et moi j’essayais de les respecter parce que peut-être qu'ils ne comprenaient pas ce qu'ils faisaient, et lui qui était en train d'être en souffrance et je dis comme ça, sans me rendre compte, en étant télévisé et avec soixante-dix étudiants à côté « Ecoutez, laissez nous entre enfants !». Et les étudiants étaient sidérés. Vous voyez, c'est sorti de mon inconscient.
Philippe Chauveau :
Que souhaitez-vous que le lecteur trouve à la lecture de ces pages ?
Marcel Rufo :
En fait, je rempli un mandat que m'a proposé un de mes maîtres en psy. Quand j'étais étudiant ou chef de clinique en psychiatrie, j'essayais, comme l'un de mes maîtres, d'être théorique, d'être plus proche. Par exemple, si je disais : « N'est-il pas dans une position schizo-paranoïde pour arriver à une phase dépressive ?», je disais des termes un peu incompréhensible, mais qui faisaient chic lorsqu'on les dit. Et cet homme, avec sa grande sagesse, me disait : « Rufo, raconte des histoires ! ». Parce que l'histoire a une puissance métaphorique incroyable. Tu racontes une histoire et puis les gens s'en emparent ou pas, en tout cas, ça retentit chez eux et comme ça tu peux faire comprendre ce que tu veux dire. Donc je remplis un mandat de maître à élève.
Philippe Chauveau :
Merci beaucoup Marcel Rufo. Votre actualité, c'est donc aux éditions Anne Carrière, « Tiens bon ! »
Philippe Chauveau :
Marcel Rufo, votre actualité chez Anne Carrière, « Tiens bon ! ». J'ai envie de dire que c'est un petit livre, mais alors dedans il y a tout ! Il y a la vie, la souffrance, le rire, la joie, les larmes. Ce sont sept parcours, sept rencontres de votre vie professionnelle. Comment avez-vous construit ce livre ?
Marcel Rufo :
J'ai dû faire à peu près 40 000 consultations dans ma vie, ce qui est énorme. Et en choisir sept, c'est assez difficile. Mais les sept n'ont pas été très compliquées à choisir. Ce sont sept histoires dans leur progression, la première redoutable et puis la dernière interactive et qui ont marqué ma vie et qui m'ont transformé. Ce sont sept rencontres avec des patients et leurs familles qui ont modifié ma façon d'être pédopsychiatre. Ce ne sont pas uniquement des histoires, c'est aussi comment un pédopsychiatre évolue dans sa pratique grâce à la clinique.
Philippe Chauveau :
Il y a sept histoires avec un personnage central à chaque fois qui est le patient – des jeunes, des adolescents, des enfants pour la plupart d'entre eux – et puis il y a aussi tous les gens qui gravitent autour, que ce soit la famille, les proches, les amis et on se rend compte que c'est important ces personnages qui gravitent autour.
Marcel Rufo :
Oui ! C'est la question : le psychothérapeute est-il seul dans la confrontation singulière de son patient et de lui, d'inconscient à inconscient, dans le plus grand classicisme psychanalytique ? Honnêtement, je crois pas. Je crois que les gens qui vous sont confiés ont une famille, une histoire, un passé, des possibilités ou non d'avenir et tout cela, ça joue beaucoup. Et en plus, un pédopsychiatre tout seul ça n'existe pas. Il a besoin d'une équipe, d'infirmiers, de psychologues, d'aides-soignants, des alliances les plus incroyables. Quand je vous dis ça, je pense à un garçon de « La Maison de Soleen », à l'hôpital Cochin, que j'ai dirigée quelques années, qui lors d'une Fête de la Musique me dit « Je peux y être moi ? ». C'était un type qui gardait l'hôpital. C'était un formidable guitariste. Depuis on l'a mis à l'école de musique de l'établissement. Vous voyez, c'est cette richesse des gens ensemble qui nous permet d'aller plus loin dans une sorte de relance psychique, culturelle, une relance du plaisir du patient malade.
Philippe Chauveau :
Cette histoire, et tous les autres patients que vous avez côtoyés jusqu'à aujourd'hui, vous ont-ils tous fait grandir quelque part ?
Marcel Rufo :
J'espère quand même que je garde une névrose infantile active. J'espère que je reste encore l'enfant que j'ai été parce qu'il y a deux types de personnes sur Terre. Il y a ceux qui se souviennent qu'ils ont été des enfants et ceux qui l'ont oublié. Evidemment, il faut basculer dans la première catégorie. Bien sûr que ça me fait grandir, mais pas trop j'espère ! L'autre jour, en consultation télévisée avec des étudiants du service, je fais un passage à l'acte incroyable. Les parents étaient un peu pénibles, un peu casse-pied et le gosse très sympathique. Je ne savais pas comment m'en sortir de ces parents qui étaient très agressifs envers lui, et moi j’essayais de les respecter parce que peut-être qu'ils ne comprenaient pas ce qu'ils faisaient, et lui qui était en train d'être en souffrance et je dis comme ça, sans me rendre compte, en étant télévisé et avec soixante-dix étudiants à côté « Ecoutez, laissez nous entre enfants !». Et les étudiants étaient sidérés. Vous voyez, c'est sorti de mon inconscient.
Philippe Chauveau :
Que souhaitez-vous que le lecteur trouve à la lecture de ces pages ?
Marcel Rufo :
En fait, je rempli un mandat que m'a proposé un de mes maîtres en psy. Quand j'étais étudiant ou chef de clinique en psychiatrie, j'essayais, comme l'un de mes maîtres, d'être théorique, d'être plus proche. Par exemple, si je disais : « N'est-il pas dans une position schizo-paranoïde pour arriver à une phase dépressive ?», je disais des termes un peu incompréhensible, mais qui faisaient chic lorsqu'on les dit. Et cet homme, avec sa grande sagesse, me disait : « Rufo, raconte des histoires ! ». Parce que l'histoire a une puissance métaphorique incroyable. Tu racontes une histoire et puis les gens s'en emparent ou pas, en tout cas, ça retentit chez eux et comme ça tu peux faire comprendre ce que tu veux dire. Donc je remplis un mandat de maître à élève.
Philippe Chauveau :
Merci beaucoup Marcel Rufo. Votre actualité, c'est donc aux éditions Anne Carrière, « Tiens bon ! »